Aujourd’hui, 25 juillet 2022, les Tunisiens sont appelés aux urnes. Cette fois-ci, il ne s’agit pas d’élections générales (présidentielle et législatives), mais plutôt d’un référendum constitutionnel. Si elle est adoptée, la nouvelle Constitution mettra fin au régime parlementaire en vigueur depuis 2014, et accordera les pleins pouvoirs au président Kaïs Saïed qui, face à la grave crise politique que traversait la Tunisie, avait décidé de dissoudre l’Assemblée nationale et mis fin aux fonctions des membres du gouvernement. C’était le 25 juillet 2021, soit un an jour pour jour. S’étant octroyé les pleins pouvoir, Robocop, ainsi que l’on surnomme Kaïs Saïed, gouvernait par ordonnance et ce, en dépit de la clameur qui va crescendo. C’est dans ce contexte de tensions qu’il souhaite doter la Tunisie d’une nouvelle Constitution qui, en plus d’accorder une reconnaissance limitée à l’Islam, entend consacrer la parité des sexes au sein des Assemblées élues. Si l’on en juge par certaines de ses dispositions, la nouvelle Constitution que Robocop appelle de tous ses vœux, n’a rien de rétrograde sauf qu’elle fait de lui, un demi-dieu quand elle n’ouvre pas la voie à la patrimonialisation du pouvoir avec toutes les dérives qui vont avec. En fait, quand on regarde la manière dont Kaïs Saïed dirige son pays, l’on a envie de dire que l’homme n’a pas tiré leçon de l’histoire récente de la Tunisie tant et si bien qu’il se croit tout permis.
Robocop gagnerait à changer son fusil d’épaule en descendant de son piédestal
Se targuant d’un quelconque soutien populaire qui s’est d’ailleurs effrité avec le temps, il nargue son opposition et donne l’impression de minimiser la capacité de mobiliser de cette dernière qu’il a, pour ainsi dire, fini par museler. A preuve, ils se comptent par centaines, les partisans de l’opposition qui, pour s’être opposés au référendum de ce 25 juillet, ont été embastillés sans autre forme de procès. Ce qui fait dire à bien des observateurs que Robocop est sur les traces de Ben Ali, du nom de cet autre despote qui a dirigé la Tunisie d’une main de fer et ce, pendant plus de deux décennies, avant d’être chassé du pouvoir par la rue. Exilé en Arabie Saoudite, il y trouva la mort en 2019 et fut enterré dans les circonstances que l’on sait, loin de la mère-patrie. Pour autant qu’il ne veuille pas subir le même sort, Robocop gagnerait à changer son fusil d’épaule en descendant de son piédestal. Il se doit de comprendre qu’aucun dictateur, aussi sanguinaire soit-il, n’a jamais triomphé d’un bras de fer engagé avec son peuple. Et ce n’est pas en réussissant le tour de force de faire adopter la nouvelle Constitution, qu’il va se croire à l’abri de ce qui est arrivé à Ben Ali. Bien au contraire, surtout quand on sait que le locataire du palais de Carthage a déçu beaucoup de ses compatriotes pour n’avoir pas réussi à juguler la grave crise économique que traverse la Tunisie. Laquelle crise, on le sait, s’est d’ailleurs aggravée à cause de la pandémie du Covid-19 et la guerre en Ukraine. C’est dire que s’il continue de faire l’autruche, Robocop risque de se tirer finalement une balle dans le pied.