Dans le cadre du Débat d’orientation budgétaire (DOB), le gouvernement burkinabè a présenté son Document de programmation budgétaire et économique pluriannuelle (DPBEP) 2023-2025, à l’Assemblée législative de la Transition (ALT), le jeudi 30 juin 2022, à Ouagadougou.
Selon la Loi organique n° 073-2015/CNT du 6 novembre 2015 relative aux lois de finances, le pouvoir exécutif doit soumettre à la représentation nationale, dans le cadre du débat d’orientation budgétaire, le Document de programmation budgétaire et économique pluriannuelle (DPBEP), au plus tard à la fin du mois de juin. Cette exigence légale a été respectée ce 30 juin 2022 où le gouvernement a soumis à l’appréciation de l’Assemblée législative de la Transition (ALT) le DPBEP 2023-2025. Dans sa présentation dudit document de programmation pour les trois prochaines années, le ministre de l’Economie, des Finances et de la Prospective, Séglaro Abel Somé, a décliné la situation d’exécution du budget 2022 à fin mars, les priorités et choix stratégiques budgétaires de 2023, les projections budgétaires sur la période 2023-2025 et les risques budgétaires potentiels et mesures d’atténuation. Pour ce qui est de l’état de mise en œuvre du budget exercice 2022, il ressort, à fin mars, un niveau d’exécution de 659 milliards FCFA sur un crédit de paiement ajusté de 2 919 milliards FCFA, soit un taux d’exécution de 22%, contre une cible de 25 % escomptée au premier trimestre. Quant aux dépenses ordinaires sur la même période, elles s’établissent à 554 milliards FCFA sur des crédits de paiement ajustés de 1 913 milliards FCFA, soit un taux d’exécution de 28%, contre une cible escomptée de 25%. Les priorités du gouvernement, selon le ministre, sont celles du Plan d’action de la Transition (PAT) adopté par le Conseil des ministres le 6 mai 2022 et sont bâties autour des quatre piliers de l’Agenda de la Transition. Il s’agit de lutter contre le terrorisme et restaurer l’intégrité du territoire, répondre à la crise humanitaire, refonder l’Etat et améliorer la gouvernance et d’œuvrer à la réconciliation nationale et à la cohésion sociale.
Les actions prioritaires
Pour libérer les zones occupées par les groupes terroristes et créer les conditions sécuritaires nécessaires au retour de l’Etat et des populations dans les zones libérées, le gouvernement a prévu, entre autres, des actions de renforcement des capacités opérationnelles des Forces de défense et de sécurité (FDS), d’amélioration de la participation citoyenne dans la lutte contre le terrorisme et des Volontaires pour la défense de la patrie (VDP) dans la lutte contre le terrorisme, d’intensification de la lutte contre la criminalité et le grand banditisme, d’assèchement des sources d’approvisionnement des groupes armés terroristes en ressources de tout genre, a indiqué le ministre Somé. En ce qui concerne le plan de réponse du gouvernement à la crise humanitaire, il repose sur le soutien au retour volontaire des personnes déplacées dans leurs zones d’origine et la garantie de leur sécurité, la mise en place d’un plan de soutien à la réinstallation des Personnes déplacées internes (PDI) et autres personnes affectées par le terrorisme, leur prise en charge psycho-sociale, la mise en œuvre de programmes de soutien aux initiatives entrepreneuriales des jeunes.
A ces actions s’ajoutent, le plafonnement des dépenses des campagnes électorales, la révision du code électoral et la refonte du fichier électoral, l’adoption d’une nouvelle Constitution, la dépolitisation de l’administration publique et la promotion du mérite, la valorisation de la préférence nationale en matière de commande publique, l’allègement des conditions d’accès au financement des PME/PMI, la rationnalisation de l’achat et de l’utilisation des moyens roulants de l’Etat, la poursuite des réformes en matière de foncier urbain et rural, le développement de la production agricole sous maitrise d’eau, etc. Pour concrétiser ces priorités, l’exécutif de la Transition va opérer des choix stratégiques en matière de recettes et de dépenses, reposant sur la couverture de plus en plus importante des charges du budget par les recettes propres, l’optimisation de l’allocation des ressources et la qualité de la budgétisation, a souligné Dr Somé. S’agissant des projections budgétaires, les recettes budgétaires totales seraient de 2 552 milliards FCFA en 2023, 2 633 milliards de FCFA en 2024 et de 2 813 milliards de FCFA en 2025, soit un accroissement annuel moyen de 5,0%. Quant aux prévisions sur les dépenses budgétaires totales, elles s’établiraient à 3 157 milliards FCFA en 2023, 3 206 milliards FCFA en 2024 et à 3 303 milliards FCFA en 2025, soit un taux annuel moyen de progression de 2,3%.
Les préoccupations de l’ALT
En 2023, 628 milliards FCFA du budget de l’Etat iront au secteur de la sécurité et de la défense contre 440 milliards FCFA en 2022, soit une variation de 42 %. Ce qui représente 20 % du budget de 2022 et 27% de celui de 2023. Les projections sur des indicateurs de convergence laissent entrevoir un taux d’inflation annuel moyen de moins de 3% sur la période 2023-2025, un ratio masse salariale sur recettes fiscales de 54 % en 2023 et 50 % en 2025. Au cours du débat général, les préoccupations des membres de l’ALT ont porté, entre autres, sur la baisse des allocations de certains secteurs comme la santé, les risques internationaux et sociaux sur le budget, l’impact de la crise sécuritaire sur la mobilisation des recettes minières, les réformes fiscales, la prise en compte de l’inflation, la maitrise de la masse salariale, les contraintes liées aux transferts des ressources aux collectivités, les mesures d’accompagnement au secteur agricole et de l’élevage, l’éducation dans les zones à fort défi sécuritaire,.
Sur ces dernières préoccupations, le ministre Somé a indiqué qu’elles sont prises en compte dans le plan de réponse humanitaire du gouvernement. L’exécutif compte gagner à termes la bataille de la maitrise de la masse salariale, non en réduisant les salaires ou les effectifs, mais en rationnalisant les recrutements dans la fonction publique et en contrôlant les effectifs réels. Sur l’optimisation de la mobilisation des recettes, elle repose sur les niches fiscales comme l’impôt foncier, l’économie numérique, la réforme de la contribution des micros entreprises. Répondant à la proposition du premier vice-président relative à l’institution d’une para-taxe fiscale sur les boissons en guise de soutien citoyen aux VDP, le ministre a fait savoir que son département examinerait sa faisabilité. Le gouvernement ne dispose pas d’indices qui montrent que la crise sécuritaire va jouer sur les prévisions de mobilisation des recettes, notamment minières, a indiqué Séglaro Abel Somé. Et d’ajouter que la baisse des allocations budgétaires à certains secteurs s’explique par la priorité accordée à la défense et la sécurité. Sur la question du manque d’ambition du gouvernement en matière de prévisions de recettes propres, le patron des finances burkinabè est catégorique : les prévisions de l’exécutif sont réalistes, fondées sur la prudence au regard du contexte national.