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Art et Culture

Burkina Faso: Des monuments en délabrement à Ouagadougou : qui, pour sauver ces lieux symboliques ?

Publié le jeudi 16 juin 2022  |  Libreinfo.net
Burkina
© Autre presse par DR
Burkina Faso: Des monuments en délabrement à Ouagadougou : qui, pour sauver ces lieux symboliques ?
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Les monuments, érigés dans la capitale burkinabè, sont destinés à perpétuer le souvenir des héros, des martyrs ainsi que des personnes qui ont marqué l’histoire du pays. Ils font la fierté de la ville et du tourisme au Burkina Faso. Cependant, certains sites symboliques que nous avons visités semblent être abandonnés. Nous avons fait le tour de quelques monuments à savoir le Mémorial aux héros nationaux de Ouaga 2000, le Monument des martyrs situé au quartier Tampouy et le Square Naaba Koom, à côté de la gare ferroviaire de Ouagadougou. Le constat est amer : ils sont et resteront dans un délabrement progressif si rien n’est fait pour redonner à ces lieux leur visage d’antan.

Par Daouda Kiekieta

Au cœur du quartier huppé de Ouaga 2000, trône, de loin, un majestueux monument qui attire du monde les soirs pour des séances de sport. L’image que l’on a de cette architecture s’érode au fur et à mesure que l’on se rapproche et s’éteint quand on visite le site.

Des vitres cassées, des toilettes délaissées, la surface transformée en champs de culture. C’est l’état actuel du Mémorial aux héros nationaux situé à quelques jets de pierre de la Présidence du Faso.

A pied, nous prenons le risque de traverser les herbes sèches qui s’élèvent au niveau de nos jambes , pour faire un tour du monument, afin de toucher du doigt l’état du site . Là, nous voulons comprendre les raisons liées à la casse des vitres des différentes portes. Sur cette préoccupation n’avons eu gain de cause. L’agent de sécurité, Denis Sankara, dit être nouvellement affecté sur les lieux.

Le principal gestionnaire du site, visiblement un septuagénaire, vient de subir une intervention médicale et se trouve indisposé à répondre à nos questions. Le moins que l’on puisse dire de cette visite, c’est que ce monument souffre d’un problème d’entretien.
Malgré l’état de délabrement dans lequel il se trouve, le site reste quand même fréquenté.

Plus loin, deux hommes discutent au pied de la calebasse retournée, entre les quatre grandes structures de la bâtisse qui représentent, selon le décryptage, les quatre étapes de la lutte du peuple pour : l’indépendance, la république, la révolution et la démocratie. Nous accédons à la partie close du monument par la porte principale.

Le site reste quand même fréquenté malgré son état de délabrement.
Sous les hangars qui entourent (en dehors de la partie close avec des barbelés) le monument, Arnaud Yaméogo, étudiant en génie civil, nous confie qu’il y vient de temps en temps pour réviser ses leçons. « C’est un endroit calme et intéressant où bosser, c’est pourquoi je viens ici souvent », a-t-il dit.

« Mais je n’ai pas encore pris l’initiative d’entrer visiter l’intérieur du monument », a précisé l’étudiant. De son côté, Ismaël Ilboudo, adossé au mur de l’enclos du monument, dit être venu pour rencontrer un de ses amis. « Je ne sais pas mais, je n’ai pas encore envie de me déplacer spécialement pour visiter le monument », a-t-il laissé entendre. Pour lui, le visage du site n’inspire pas l’envie d’y visiter.

Ce Mémorial n’est pas le seul à subir le phénomène de délabrement.
Et ce monument n’est pas le seul à être délaissé. A 15 kilomètres du Mémorial aux Héros nationaux, le monument des martyrs, situé au quartier Tampouy.

Construite dans le cadre de la célébration de la journée nationale du pardon, on peut discerner une calebasse brisée, une colombe, deux mains en signe de prière et une étoile flamboyante. La colombe nous interpelle par cette phrase « plus jamais ça ! ».On voit aussi des traces de raccommodage sur les fissures de la calebasse. Ce monument nous rappelle que toute réparation laisse toujours des traces indélébiles, tout comme le pardon pas la douleur.

Ce même constat amer a été fait au monument sur le site de ce monument. Des arbres dressés tout autour du site, l’on se croirait dans une forêt. L’espace réservé au divertissement est insalubre.
Marie Nikiéma est un agent de sécurité depuis trois ans sur le site du monument. Elle surveille le site le jour et est remplacée la nuit par deux hommes. A la question de savoir s’il y a des opérations ponctuelles ou permanentes de nettoyage du site. Marie Nikiéma dit n’avoir jamais assisté à une telle opération.

Malgré cet état de délabrement et d’insalubrité, le site connaît étonnamment par moment des visites. « De temps en temps, il y a des gens qui viennent visiter pour prendre des photos » , reconnaît l’agent de sécurité. C’est dire donc que ces lieux pouvaient attirer des visiteurs si on leur redonnait leur look d’antan. Mais hélas ! Qui, pour sauver ces lieux symboliques qui incarnent la mémoire de nos vaillants patriotes qui seraient illustrés au service de la patrie ?

Les élus pointés du doigt par certains citoyens.
En tout cas, certains citoyens pointent du doigt la responsabilité des élus locaux. C’est le cas de certains riverains du Square Naba Koom, monument, situé en face de la gare ferroviaire de Ouagadougou. « Le lieu était géré par un monsieur qui faisait de la restauration ici. Depuis son départ, le site est devenu comme un dépotoir », nous confie un riverain qui a requis l’anonymat.

Des paillotes dégradées et déchaumées, des fleurs visiblement en manque d’eau, c’est l’entretien réservé à ce site. Notre interlocuteur poursuit en laissant entendre : « pourtant, ce monument représente Naaba Koom, une figure très importante dans l’histoire de notre pays ».
Somé Amos est chauffeur de bus, il vient souvent s’aérer dans la cour du monument, au milieu des arbres. Il souhaite que le site soit réaménagé pour un lieu de repos. Construit en 1986, le Square Naba Koom est aujourd’hui caché par les feuillages des grands arbres qui l’entourent.

Nos monuments sont laissés pour compte peut-on tenter de dire. Alors que ces lieux, qui constituent des sites touristiques, pouvaient générer des ressources financières pour le budget de la commune s’ils étaient bien gérés.

L’on s’interroge donc sur l’intérêt de dépenser des milliards pour construire des monuments aussi symboliques que ceux-ci et assister indifféremment à un délabrement progressif de ce qui devrait constituer une source de richesse pour le pays. Les autorités chargées de gérer ces lieux symboliques et touristiques sont donc interpellées, afin de redonner à ces lieux leur visage d’antan.
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