Ceci est une tribune de Germain Bitiou NAMA, sur le dossier du juge Salifou Nebié, mort il y a de cela 8 ans. Lisez plutôt !
Il est sans doute écrit que nous ne connaitrons jamais la vérité sur la mort du juge Salifou Nébié. Contrairement à l’affaire Norbert Zongo, le dossier du juge n’a pas eu la chance de passer sous les fourches caudines d’une commission d’enquête.
Même en l’absence de la vérité judiciaire, l’affaire Norbert Zongo est d’une clarté telle que les Burkinabè n’en attendent aucune surprise d’un éventuel jugement, sauf à combler leur curiosité sur des faits de détail. Ce n’est malheureusement pas le cas en ce qui concerne l’affaire Nébié, retrouvé mort le 25 mai 2014 à quelques mètres de sa voiture sur la route de Sapouy, qui gît sous une épaisse chape de plomb. Deux faits incitaient pourtant à l’espoir.
Etant un haut magistrat, on aurait pensé que la corporation se mobiliserait pour traquer les auteurs de cette forfaiture. Mais depuis que le dossier a été confié à un des leurs, celle-ci s’en est pratiquement détournée, pensant peut-être que cela suffirait. L’on constate hélas que le temps s’est figé, le dossier avec, et aucune parole depuis ne sort de ce fameux cabinet d’instruction numéro 6 du Tribunal de grande instance Ouaga I où il semble s’être définitivement enseveli. L’opinion publique est en droit de s’interroger sur ce mutisme du cabinet d’instruction. Pourquoi la hiérarchie judiciaire ne communique-t-elle pas sur le dossier ? Doit-on comprendre que c’est sa manière de se faire bonne conscience ? Le procureur général près la Cour d’appel de Ouagadougou et le président du Conseil supérieur de la magistrature sont interpellés ! La justice doit se faire un point d’honneur à faire aboutir cette affaire.
Autre raison de notre optimisme, c’est l’arrivée aux affaires de Roch Marc Christian Kaboré et ses amis qui sont non seulement des camarades proches du défunt mais les promotionnaires de quartier avec qui ils ont longtemps crapahuté. Il n’est pas exclu que ce soit cette proximité qui ait été fatale au juge, au regard du contexte de l’époque, particulièrement tendu.
Tout en restant attaché à Blaise Compaoré pour de multiples raisons, le malheureux juge n’était pas moins proche de ses camarades et amis de jeunesse alors en rupture de ban avec le système Compaoré.
Contre toute attente, une fois au pouvoir, Roch et ses amis n’ont pas accordé d’importance au dossier Nébié. On ne peut nullement invoquer ici la séparation des pouvoirs car l’exemple de la Transition de 2014 montre bien ce qui peut être fait pour mettre un dossier judiciaire à flot. Ils ne sont plus aujourd’hui au pouvoir mais ils peuvent toujours aider à faire avancer le dossier par leur connaissance des réseaux.
Qu’attendre de Paul Henri Sandaogo Damiba et du Mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration (MPSR) qui, on s’en doute, ont d’autres chats à fouetter ? Sauf à espérer qu’advienne la refondation tant souhaitée par de nombreux Burkinabè dans laquelle l’institution judiciaire trouverait un réel dynamisme.
En ce 8ème anniversaire de l’assassinat du juge Nébié, nous nous inclinons sur la mémoire de cet illustre magistrat. La république ne doit en aucun cas oublier ses serviteurs valeureux. Nous n’aurons de cesse d’en appeler à la chancellerie afin que soient posés des actes mémoriels en souvenir de ce grand serviteur de l’Etat !