Coup de théâtre au Burkina Faso. Le procès de l'assassinat de Thomas Sankara est reporté. En effet, les avocats de la défense affirment que le chef d'accusation « d'attentat à la sûreté de l'État » ne tient plus, dès lors que le Conseil constitutionnel a adoubé le lieutenant-colonel Damiba, dont le pouvoir est issu précisément d'un « d'attentat à la sûreté de l'État ». Du coup, le tribunal militaire demande au Conseil constitutionnel de trancher. Luc Marius Ibriga est contrôleur général d'État et a longtemps enseigné le droit public à l'université Thomas-Sankara. En ligne de Ouagadougou, il répond à Christophe Boisbouvier.
RFI : Au procès des assassins présumés de Thomas Sankara, plusieurs avocats de la défense affirment que le crime d’« attentat à la sûreté de l’État » ne tient plus dès lors que le Conseil constitutionnel a légitimé le dernier coup d’État qui était justement un « attentat à la sûreté de l’État »…
Luc Marius Ibriga : Non. Je ne pense pas que l’on puisse tirer cette conclusion. L’article 167 de la Constitution, qui n’a pas été révisé, est clair à son alinéa 2 qui dit : « Tout pouvoir qui ne tire pas sa source de cette Constitution, notamment celui issu d’un coup d’État, est illégal ». Donc, c’est une interprétation malheureuse que le Conseil constitutionnel a eu à faire en prenant en compte l’acte 1 du MPSR [Mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration]. Mais, je ne pense pas que cette sortie puisse prospérer en droit.
Oui, ce que vous dites professeur, c’est que le 16 février, quand le Conseil constitutionnel a adoubé le lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba, il s’est appuyé sur un autre texte que la Constitution, qui est l’acte 1 du Mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration (MPSR), issu du coup d’État du 24 janvier. C’est ça ?
Oui. C’est cette erreur originelle du Conseil constitutionnel qui l’a conduit de façon détournée à reconnaître le coup d’État, comme si le coup d’État était un mode constitutionnel d’accès au pouvoir. Donc, je ne crois pas que cette exception d’inconstitutionnalité puisse prospérer pour empêcher qu’on applique les peines à ceux qui ont attenté à la sûreté de l’État ou ceux qui, dans le coup d’État de 2015, aujourd’hui purgent leur peine.... suite de l'article sur RFI