Depuis la nuit du dimanche 22 septembre 2013, les candidats burkinabè au Hadj partent pour la Mecque. Cette année, l’incertitude sur les différents vols en direction de la terre sainte de l’islam s’est dissipée. Cependant, le manque d’encadrement des pèlerins est toujours perceptible. Kolgo, gombo sec, bassi,… des provisions pour la cuisine, étaient dans les bagages de certains.
A quelle heure partiront les Burkinabè pour la Mecque ce lundi 23 septembre 2013 ? «C’est quand l’avion va venir qu’on saura exactement l’heure du vol. Pour le moment, on a demandé aux gens de venir à 19h pour les formalités». Manque de précision d’un agent sous pression ou aveux d’une défaillance d’organisation, ces propos d’un membre du comité de suivi du pèlerinage ont annoncé un pied de grue, surtout que la veille, les 500 premiers candidats au hadj cette année avaient quitté le pays à l’insu de L’Observateur Paalga. Comme annoncé, les principaux concernés et leurs proches ont commencé dès 19h à prendre d’assaut l’aéroport international de Ouagadougou. Par convois de véhicules, minicars, motos…personne ne semble vouloir se laisser conter le départ de son parent à la Mecque, bravant pour cela les agents de sécurité et leurs multiples dispositifs. Au pied de la dernière barrière de sécurité avant d’accomplir les formalités relatives au vol, les accompagnateurs sont priés de retourner.
Après quelques minutes d’attente et de négociation, certains se résolvent à se retirer face à l’intransigeance des agents. D’autres, par contre, se mettent par petits groupes et dévisent. Ceux qui ne tiennent pas le coup finissent par tomber dans les bras de Morphée sur le bitume, aidés en cela par le confort qu’offrent leurs pagnes, nattes et tapis. Au milieu de ce beau monde, un des voyageurs se dissimule pour passer incognito. Il s’agit de l’ancien ministre délégué chargé de l’Agriculture, Abdoulaye Combary. L’homme reconnaît devant le micro que sa supercherie n’a pas marché. Contrairement aux autres, il ne porte pas une tenue à l’effigie de son agence de voyage et du pays. «J’ai l’uniforme mais de la formation que j’ai reçue, le port ici n’est pas obligatoire. Quand tous les pèlerins du monde se retrouvent en Arabie Saoudite, les gens se perdent. D’année en année, le comité d’organisation a instauré l’uniforme avec le drapeau du pays. Ainsi, même si un pèlerin se perd, il sera facile de le retrouver», se justifie-t-il. Avec ce voyage, c’est une intention vieille de vingt (20) ans qu’il traduit en actes. Sa joie est d’autant grande que ce voyage-là, il va l’effectuer avec son fils.
Au fur et à mesure que les minutes s’égrènent, les accompagnateurs lèvent le camp. 23h05mn, seuls les derniers pèlerins arrivent à la barrière de sécurité. Ceux qui franchissent ce cap retrouvent à l’intérieur les représentants de leurs agences de voyage respective. Ils sont conduits sous des cantiques distillés par des hauts-parleurs installés dans la cour, sous un grand chapiteau, divisé en trois compartiments: l’aile gauche est réservée aux femmes et la droite aux hommes. Au milieu, c’est la salle mixte qui sert de salle d’embarquement.
Dans la partie réservée aux femmes, les différentes équipes travaillent sous la coordination du commissaire Issaka Compaoré. Trois étapes sont nécessaires pour chaque voyageur avant d’avoir accès à la salle d’embarquement : la Régie où la carte d’embarquement est fournie ; la Police pour les fiches de renseignement et viser la carte d’embarquement ; et la Fouille où les pèlerins sont dépourvus de tout ce que la sécurité désigne sous le vocable «articles interdits». C’est à ce niveau surtout que ça coince. «La sensibilisation a été faite au niveau des agences, mais nous constatons toujours des dérives. Certaines femmes veulent partir avec du tout : des bouillons de cuisine, de la cola…elles ne sont pas contentes, mais nous sommes obligés de les leur retirer», affirme, désolé, le commissaire Compaoré. Et comme pour corroborer ces dires, il est interpellé par une discussion, un de ses agents et une dame. Priée de se débarrasser de certains de ses produits, cette dernière se fond en explication : «c’est du Bassi pour moi et mon mari. Il est de l’autre côté….». Mais face à l’insistance des femmes en uniforme, elle se résout, pince-sans-rire, à abandonner les provisions qu’elle avait faites pour elle et son homme.Il est 23h 42 à la Régie réservée aux femmes. Là, les agents de la Régie chargée de l’assistance en escale (RACGAE) ont sous la main un problème de passeport. Une femme se plaint de n’avoir pas reçu le sien après les vérifications. «Ce n’est pas moi sur la photo. Je ne porte jamais de voile noir. Ces papiers ne sont donc pas les miens», affirme-t-elle. C’est le branle-bas. Celle qui a le document recherché sortira quelques minutes plus tard sous l’escorte d’un membre de son agence de voyage. «J’ai entendu mon nom dans le haut parleur mais ma voisine m’a dit de ne pas sortir, car je risque de ne plus rentrer». Ainsi s’est-elle confondue en excuses. Tout rentre dans l’ordre et le travail à ce niveau tire à sa fin.
00h12mn, les cars se positionnent à l’entrée de la salle d’embarquement. Les futurs hadj sortent alors de leur torpeur. Les bagages sur la tête ou en main, chacun veut franchir le portail le premier. Sentant la bousculade venir, le speaker a vite fait un rappel à l’ordre : «Ne vous bousculez pas. La première personne à monter dans l’avion ne sera pas la première à atterrir à la Mecque. Vous partirez tous, il y a de la place pour tout le monde. Allez-y doucement, les femmes d’abord». Son vœu est exaucé. En file indienne, les femmes sont effectivement les premières à prendre place dans les véhicules qui les conduiront dans l’avion stationné quelques centaines de mètres plus loin. Cette opération de transfert va au rythme des voyageurs. Au pied de l’avion, les badges et les chasubles ne sont pas suffisants pour avoir accès à l’intérieur. Pour les agents de sécurité, cela ne relève plus de leurs compétence, mais de celle de l’avionneur. Mais la baraka est avec l’équipe de reportage, un de ses représentants de la société qui a affrété l’avion est un confrère. Il facilite la tâche. 05 mn, c’est le temps pour y jeter un coup d’œil. Le photographe-reporter se lance alors dans une course à l’intérieur de «l’oiseau de fer». Quelques clichés à gauche. Autant à droite. Une pause avec l’équipage pour la postérité. Et le voilà prié de libérer les lieux pour permettre la poursuite de l’installation des pèlerins. 01h50, les agents de sécurité quittent leurs différents postes. «Bonne soirée, c’est le repos !», lance l’un d’entre eux à son collègue toujours sur la piste pour les dernières formalités. Une dizaine de minutes plus tard, les différentes portes de l’avion se ferment et la passerelle se retire. A 2h16 mn, l’avion quitte son stationnement pour rejoindre la piste de décollage. C’est parti ainsi pour le deuxième vol des candidats burkinabè au Hadj 2013.