La covid-19 sévit toujours au Burkina Faso et dans le monde entier. Du 27 décembre 2021 au 2 janvier 2022, 1005 nouveaux cas de la maladie à Coronavirus ont été confirmés aux pays des hommes intègres. Un chiffre qui peut être qualifié de record, depuis l’apparition de la maladie au pays en mars 2020. Dans les Hauts-Bassins, quelle est la situation de la maladie ? Quel est le point de la campagne de vaccination contre cette pandémie ? Ces questions trouveront réponses dans l’interview suivante accordée à L’Express du Faso, le 5 janvier 2022, par le Dr Watton Rodrigue Diao, médecin épidémiologiste, Directeur régional de la santé des Hauts-Bassins.
Quelle est la situation de la Covid-19 dans les Hauts-Bassins ?
Le Service d’information du gouvernement a fait le point de la pandémie à covid-19 au niveau national. Nous constatons une augmentation significative du nombre de cas ces dernières semaines. Pour la semaine 52, nous avons enregistré au total 117 nouveaux cas de maladie à Covid-19 dans la région des Hauts-Bassins avec 2 cas de décès. Ce qui porte le total de l’ensemble des cas durant l’année 2021 à 1902 cas positifs et 49 décès. Pourtant à la semaine 51, avant donc la semaine 52 qui permet de clore l’année 2021, on était à 44 cas positifs. Ce qui donne une augmentation du double carrément. La semaine 50 quant à elle, a enregistré à 6 cas de maladie à Covid-19. C’est que nous sommes en train d’observer une augmentation du nombre de cas. Cela mérite toute l’attention afin que nous puissions trouver toutes les mesures pour continuer à riposter efficacement contre cette maladie.
Qu’est ce qui peut expliquer cette hausse des cas de Covid-19 au Burkina et particulièrement dans la région ?
Il faut noter que les mois de novembre, décembre et janvier sont déjà des mois propices au développement des grippes saisonnières. C’est donc habituellement la période à laquelle nous avons des grippes avec le phénomène de l’harmatan. A cela il faut noter que le niveau de vaccination de la population reste toujours en deçà de ce que nous souhaitons. A côté de cela, un peu partout dans le monde et particulièrement en Europe, ils sont à leur 5ème vague et depuis l’ouverture des frontières, il y a eu pas mal d’échanges même si certains pays ont fermé les leurs. On sent tout de même beaucoup de mouvements au niveau des différentes frontières du Burkina Faso. Il ne faut pas occulter le variant Omicron qui a fait l’objet d’un communiqué du ministre de la Santé où on a notifié 2 cas, à travers le séquençage fait à Bobo au centre Muraz. En termes de surveillance quand vous avez 2 cas d’une maladie que le système de surveillance a pu capter, alors qu’on est dans une surveillance passive, c’est dire qu’il y a au moins une centaine de cas certainement quelque part, qu’il faut aller chercher. Et quand on sait que le variant Omicron, un peu partout dans le monde a montré une tendance à une propagation très rapide. Ce sont ces différents facteurs qui peuvent expliquer cela. Mais il faut retenir que les populations de façon générale, ont baissé la garde devant cette maladie. Nous voyons de plus en plus rarement les gens porter les masques. Les kits de lavage de mains qui étaient devant la plupart des services sont recouverts de poussière, ce qui veut dire que ce n’est plus utilisé. Le gel hydroalcoolique n’est plus trop utilisé et la population ne respecte plus la distanciation physique prônée pour pouvoir rompre la chaine de transmission.
Quel est le point de la campagne de vaccination contre la covid-19 dans les Hauts-Bassins ?
Depuis le 7 juin 2021, nous avons commencé la vaccination dans la région des Hauts-Bassins avec le vaccin Astra-Zeneca. Par la suite on a intégré le vaccin Johnson and Johnson, après on a eu le vaccin Sinopharm et tout dernièrement on a reçu le vaccin Pfeizer qui se trouve uniquement à Ouagadougou et à Bobo-Dioulasso. On a commencé à utiliser ce dernier le 23 décembre 2021. On pourrait penser que le bilan de la vaccination est satisfaisant dans les Hauts-Bassins parce que c’est l’une des régions où on sent que les populations ont le plus adhéré à la vaccination. Donc depuis que nous avons commencé la vaccination, nous sommes à 326.405 personnes qui ont reçus une dose. Et cela représente, sur une population de 18 ans et plus dans notre région estimée à plus de 1.114.000 personnes, une couverture de 29,30% de cible couverte. Mais quand nous prenons le nombre de personnes effectivement vaccinées, c’est-à-dire pour les vaccins à deux doses qui ont reçu toutes les doses, celles que nous appelons les personnes immunisées, ça fait un total de 167.307 personnes. En rapportant cela à la cible de notre région, cela nous fait une proportion de 15,2% de personnes immunisées. Alors que nous devons atteindre au moins 80 à 85% pour espérer une immunité collective.
Face à cette recrudescence, qu’elles sont les dispositions prises à votre niveau pour contrer la propagation de cette pandémie ?
Dans le cadre de la riposte, le personnel de santé a toujours été prompt et engagé. Plusieurs activités ont été menées et nous avions même anticipé en nous disant qu’avec la période de la grippe saisonnière, il y aura forcément une augmentation de cas, parce que l’année passée c’était pareil. Cela fait près de deux mois que nous avons renforcé la communication et la sensibilisation. Nous avons rencontré toutes les sensibilités possibles. C’est ce qui nous a conduits à mener la campagne d’intensification de la vaccination. On voulait avoir le maximum de personnes pour éviter que la période de la grippe saisonnière ne puisse être greffée à une recrudescence des cas de maladie à Coronavirus. Nous avons mené cette campagne de vaccination et à côté de cela nous avons communiqué avec l’ensemble des parties prenantes et l’ensemble des acteurs clés de notre société au niveau de notre région. Nous avons rencontré les journalistes qui ont accepté de se faire vacciner, ils étaient une centaine à le faire. Nous avons rencontré tous les chefs de services déconcentrés et décentralisés pour échanger avec eux pour pouvoir leur donner l’information juste. Ils ont été également vaccinés avec le premier responsable de la région en la personne du gouverneur Antoine Atiou qui a fait ses deux doses. Ce que nous avons médiatisé. Les députés et maires de la région y ont adhéré également, les associations de femmes, de jeunes, d’imams (près de 300 imans à travers leur faitière) et la société civile se sont tous engagés et se sont vaccinés après la rencontre de plaidoyer de nous avons organisée. A l’heure où je vous parle, plusieurs imams viennent prendre leur carte pour aller sensibiliser dans leur mosquée. Nous sommes allés dans les marchés, nous avons sensibilisé et des gens ont arrêté de vendre et d’acheter pour se faire vacciner. Nous avons rencontré la faitière des transporteurs et les acteurs se sont vaccinés et nous avons initié une rencontre avec eux pour le lundi 10 janvier 2022 pour encore échanger au tour de cette maladie. Cela pour éviter tout ce qui est tracasserie liée à la frontière pour les personnes non vaccinées ou n’ayant pas fait leur test de Covid. Nous sommes allés même dans les trous d’orpaillage, nos équipes sont allées pour vacciner les populations. Nous avons beaucoup communiqué et vous allez voir que d’ici le lundi 10 janvier 2022, nous allons faire plusieurs émissions radios pour pouvoir donner l’information, donner les différents sites de vaccination. L’ensemble de nos formations sanitaires publiques sont des sites de vaccination et les acteurs sont mobilisés. Nous les avons formés pour bien accomplir la mission. Quelque chose qu’il ne faut pas oublier, aujourd’hui nous sommes à près de 100% d’agents de santé vaccinés pour qu’ils puissent montrer l’exemple. C’est ce qui a amené les gens à comprendre que le vaccin est vraiment bien et sérieux. Nous sommes aussi organisés pour la prise en charge des cas, parce que toutes personnes qui a des symptômes, nous sommes prêts à faire le test pour confirmer la maladie et faire une prise en charge à domicile ou dans un centre de santé. Nous avons mis à niveau notre réanimation et nos structures pour prendre en charge les cas graves. Présentement, nous avons cinq cas graves en réanimation. Je précise que sur les 49 cas de décès enregistrés dans notre région en 2021, aucun n’était vacciné et les deux dont je faisais cas, il y a un jeune de 30 ans.
Quelle est la conduite à tenir pour ceux présentant des signes suspects de Covid-19 ?
Il ne faut pas paniquer, il ne faut pas avoir peur. Le personnel de santé est à la disposition des populations. Les centres de santé sont ouverts à la population et le numéro vert, le 3535 est toujours fonctionnel. Toute personne qui a une question ou des symptômes, peut nous joindre. Nous sommes dans une période de grippe déjà et il y a des comportements que nous devrions avoir. Il faut éviter au maximum de sortir sans avoir le masque. Quelqu’un qui est grippé, si vous lui serrer la main vous serez contaminés, si la personne éternue à côté de vous sans masque, vous allez vous enrhumer. Vous faites des accolades parce que c’est le début de l’année vous allez être contaminés par la personne. Il ne faut pas croire que si on est vacciné contre la Covid-19 nous le sommes pour les autres germes responsables de grippe. On peut être vacciné contre la Covid-19 et faire une grippe avec un virus qui n’a rien à voir avec la Covid-19. Car il y a plusieurs virus responsables de grippe. L’essentiel est que pour toutes les grippes, ce sont les mêmes mesures de protection, il faut porter le masque, laver régulièrement les mains au savon ou utiliser un gel hydro-alcoolique et bien sûr respecter la distanciation physique. Devant tout symptôme, nous invitons les gens que ce soit une grippe que la personne trouve banale, ou réellement un cas de Covid-19, à se rendre dans les centres de santé pour qu’on puisse réellement faire la part des choses et assurer une prise en charge adaptée, précoce et donner des chances à la personne de guérir rapidement.
Pour votre mot de fin, un conseil à l’endroit de la population du Burkina Faso et celle des Hauts-Bassins en particulier.
J’exhorte l’ensemble de la population burkinabè et ceux de la région des Hauts-Bassins en particulier, à adhérer à la vaccination. Que ceux qui ne sont pas vaccinés viennent dans nos centres de santé ou qu’ils nous appellent pour que nous organisions la vaccination pour eux. La vaccination est le moyen le plus efficace pour la lutte contre une maladie pour laquelle il y a un vaccin. Ayez confiance aux agents de santé, nous sommes formés pour vous, pour vous servir. C’est réellement à ce prix que nous allons contrer cette maladie qui impacte notre quotidien et qui joue sur le panier de la ménagère.