Le Centre d’études, de recherche appliquée en finances publiques (CERA-FP) a animé une conférence sur le regard alternatif des organisations de la société civile sur le projet de budget de l’Etat exercice 2022, le jeudi 14 octobre 2021, à Ouagadougou.
La plateforme nationale des organisations de la société civile pour une justice fiscale, sous la houlette du Centre d’études, de recherche appliquée en Finances publiques (CERA-FP) veut jouer pleinement son rôle d’interpellation du gouvernement pour une meilleure prise en compte des besoins des populations dans les allocations budgétaires. Dans cet objectif, elle a livré une analyse alternative des dotations budgétaires des secteurs prioritaires dans le projet de budget de l’Etat exercice 2022, présentement en examen à l’Assemblée nationale.
Les conclusions de leur analyse du projet de loi de finances initiale de 2022 a fait l’objet d’une conférence publique, le jeudi 14 octobre 2021, à Ouagadougou. Selon le président du conseil d’administration du CERA-FP, Yoropo Abdoul Dembélé, l’analyse citoyenne du budget par les OSC porte de façon particulière sur le projet de loi de finances initiale, exercice 2022, sous l’angle des effets de la COVID-19 et de l’insécurité. Elle vise à susciter un débat et un contrôle citoyen du budget.
Elle a également pour objectif de faire des propositions alternatives à celle de l’Etat sur les priorités, les mesures d’accompagnement adaptées aux réalités économiques, les recettes et les dépenses en lien avec la réalisation des droits sociaux, économiques et culturels des populations.
Dans sa présentation des grandes masses budgétaires, le Secrétaire exécutif de CERA-FP, Hermann Doanio, a fait savoir que le projet de budget de l’Etat pour l’année 2022 s’équilibre en recettes et en dépenses à 2 890 milliards F CFA, mais avec un déficit budgétaire, c’est-à-dire un besoin de financement de 570 milliards F CFA, soit un gap de 19 %. Un écart qu’il qualifie d’« énorme », de « gros malaise » et « inquiétant ». « La sincérité et le réalisme qui sont des principes cardinaux à respecter dans les prévisions budgétaires semblent avoir été mis de côté », souligne-t-il.
51% des recettes propres absorbées
Pour l’année 2022, les recettes propres sont de l’ordre de 1 985 milliards F CFA, soit 85%. S’il salue cet effort de l’Exécutif burkinabè dans la mobilisation des ressources domestiques dominées par des recettes fiscales (85%), la société civile appelle cependant à une imposition optimale des revenus fonciers, et de l’immobilier.
« Le processus de mise en place du cadastre fiscale pourrait contribuer à mieux imposer ce secteur », relève M. Doanio. Et d’ajouter que les impôts sur les revenus, les bénéfices, les gains en capital représentent 29% des recettes fiscales et l’impôt sur le revenu est de 0,3% des recettes fiscales totales. Ces indicateurs appellent à l’amélioration de la progressivité et la justesse du système fiscal burkinabè, souligne le communicateur. 1 899 milliards F CFA, soit 65% des dépenses budgétaires, sont consacrées aux dépenses courantes, contre 991 milliards de dépenses d’investissements, soit 35% du total des dépenses, note-t-il.
Les dépenses de personnel restent prédominantes avec une part de 53 % des dépenses courantes et 35% des dépenses totales de 2022. Ces charges de personnel absorbent plus de la moitié des recettes propres, soit environ 51%. Le CERA-FP déplore que seulement 85 milliards FCFA des recettes propres soient prévues pour couvrir les dépenses d’investissements, soit 8% des besoins d’investissements du pays en 2022. « La faiblesse des ressources allouées aux investissements ne permet pas le développement d’un cadre économique favorable par la réalisation d’investissements structurants », insiste M. Doanio.
Pour ce qui est des allocations par secteur, l’éducation est la mieux lotie avec 24% du budget de l’Etat 2022. Elle est suivie par la sécurité et défense (16%) et la santé (12%). Les secteurs de la protection sociale et des droits humains ferment la marche avec des dotations budgétaires respectives de 1% et 0,07%.
La nécessité d’une TVA progressive
Ces allocations sectorielles ont pour dénominateur commun, la prédominance des dépenses de fonctionnement au détriment des dépenses d’investissements.
Au niveau de l’éducation, 601 milliards FCFA sont consacrés aux charges de fonctionnement contre seulement 84 milliards FCFA pour les investissements. Au niveau de l’agriculture, en 2022, 104 milliards FCFA (86%) seront alloués au fonctionnement contre 17 milliards FCFA (14%) qui seront affectés aux investissements. A la santé, le fonctionnement absorbera 72% de la dotation budgétaire de ce secteur contre 28% réservé aux projets d’investissements.
Pour une mobilisation optimale des recettes fiscales, dans le sens d’une justice fiscale, les organisations de la société civile ont formulé des recommandations. Il s’agit, entre autres, de la nécessité de définir un taux de TVA progressif selon la valeur du bien, d’accroître le rendement de l’impôt sur le patrimoine, renforcer les capacités de l’Etat à financer les dépenses d’investissement sur ressources propres.
Elles appellent également le gouvernement à plus d’efforts dans la rationalisation des dépenses budgétaires. Au niveau sectoriel, la société recommande d’augmenter le budget de la santé, de l’agriculture, de l’eau et de l’assainissement, de la protection sociale. Au titre du secteur de la sécurité et de la défense, elle invite l’Exécutif à doter le programme 024 « équipement des forces » avec davantage de ressources afin de renforcer les capacités opérationnelles des Forces de défense et de sécurité afin de ramener la quiétude, la paix et la stabilité dans le pays.