Désormais, il nous faudra nous résoudre à parler du colonel Saye Zerbo, l’homme du 25 novembre, au passé. Interné d’urgence pour des complications cardiaques dans une clinique de la capitale, l’homme a rendu son dernier souffle hier 19 septembre 2013 à huit heures quatorze minutes précises (8h 14), selon les médecins. Mais qui était cet homme qui, en arrivant avec fracas au pouvoir le 25 novembre 1980, avait suscité tant d’espoir ?
Officier supérieur de l’armée burkinabè, fils d’un ancien combattant de l’armée coloniale française, Saye Zerbo, né le 27 août 1932, donc 81 printemps bien sonnés, fit ses études primaires à Tougan, Nouna, Tombouctou et Kati dans l’ancien Soudan français (actuelle république du Mali) et ses études secondaires comme enfant de Troupe à Saint-Louis du Sénégal (1948/1950). Le 27 décembre 1950 à Kati, il est engagé dans l’armée française.
Ayant accédé peu après, c’est-à-dire en 1951, au grade d’Homme de Troupe, il a participé à la guerre d’Indochine au cours de laquelle il est promu au grade de Sergent. C’était le 1er avril 1958. De retour au pays, il est affecté à Bobo-Dioulasso d’où, plus tard, il est admis au stage préparatoire au concours d’entrée à l’Ecole de Formation des Officiers Ressortissants des Territoires d’Outre-Mer (EFORTOM) de Fréjus en France. Puis, il se retrouvera au 7e Régiment des Tirailleurs Sénégalais (7e RTS) à Dakar en vue de la deuxième phase de la formation à l’école de Fréjus. Dans cet intervalle, il a accédé au grade de Sergent-Chef et obtenu le Certificat Interarmes (CIA). En 1959, en fin de formation à Fréjus, et à l’école d’Application de l’Infanterie (EAI) de Saint-Maixent, il est nommé au grade de Sous-Lieutenant, puis en 1961, à celui de Lieutenant. A la mise en place de l’armée voltaïque en 1961, il lui a été confié le commandement de la 2e compagnie du 1er bataillon de Haute-Volta qu’il assura jusqu’en 1966. Promu au grade de capitaine en 1965, il suit un stage de formation de capitaine d’infanterie à Saint-Maixent en 1966. En septembre de la même année, il est admis à l’école d’état-major de Paris. Capitaine en 1967, puis diplômé de l’école d’état-major, il est promu Chef de bataillon/Commandant en 1970. Il suit successivement, de 1971 à 1973, les cours de l’école de guerre et le cours supérieur interarmes de l’école militaire de Paris, obtient le Brevet d’études militaires supérieures et le Brevet de guerre. Enfin, il est fait Lieutenant-Colonel en 1975, puis Colonel le 1er juillet 1978.
Sur le plan politique, Saye Zerbo est nommé ministre des Affaires étrangères de 1974 à 1976 après le coup d’Etat militaire du 8 février 1974 qui installa le Gouvernement de Renouveau National du Général Aboubacar Sangoulé Lamizana. Un chef de la diplomatie réputé peu causant.
Un espoir déçu
Miné par les contradictions internes et ébranlé par le coup de boutoir des syndicats, le pouvoir de la IIIe République s’affaissa comme un château de cartes au petit matin du 25 novembre 1980. Et la reprise du pouvoir par les militaires suscita un enthousiasme rarement vécu dans l’ex-Haute-Volta. La quasi-totalité des acteurs de la scène politique nationale aura rarement béni un coup de force. Le colonel Saye Zerbo, plus populaire que jamais, est porté à la tête du Comité militaire pour le redressement et le progrès national (CMRPN). Il s’engagea résolument dans une politique tournée vers les campagnes, avec un certain succès au départ, tout en tentant une moralisation de la vie publique. Mais la popularité du régime s’émoussa très vite. En effet, auréolé par cet élan populaire, le président Saye Zerbo tenta de diriger à la dure. Refusant obstinément le dialogue avec les responsables politiques, il bloqua les salaires et suspendit le droit de grève contre toute attente. Pour les Voltaïques habitués à écouter leurs leaders syndicaux, ce fut la goutte d’eau qui fit déborder le vase.
Les restrictions du droit de grève et des mesures tendant à limiter l’émigration furent on ne peut plus impopulaires. Qui pis est, au sein de l’armée, un conflit larvé vit le jour entre les colonels et les capitaines, dont certains faisaient pour la toute première fois leur apparition sur la scène politique, tel le capitaine Thomas Sankara, nommé secrétaire d’Etat à l’information. Las des abus de pouvoir de Zerbo, ses plus proches collaborateurs vont, eux aussi, prendre leurs distances avec le chef de l’Etat. Thomas Sankara, alors secrétaire d’Etat chargé de l’Information, remit en mai 1982 sa démission de manière fracassante : «Malheur à ceux qui bâillonnent leur peuple !», lança celui qui sera suivi peu de temps après par les capitaines Zongo et Compaoré.
Avec la démission fracassante du capitaine Sankara, la crise cessa d’être feinte, pour devenir carrément ouverte. Le dénouement intervint au moment où l’on s’y attendait le moins, au petit matin du 07 novembre 1982, par un coup d’Etat qui porta les jeunes officiers au pouvoir. C’est l’avènement du Conseil du Salut du Peuple (CSP). Le CSP1.
Le Médecin-commandant Jean-Baptiste Ouédraogo lui succéda à la tête de l’Etat. Il connut la prison politique. Plus tard, sous le régime du Président Thomas Sankara, il sera jugé par un tribunal populaire de la révolution (TPR). Peu après sa libération, l’ex-patron du CMRPN se convertit un peu sur le tard au protestantisme. Marié, il était père de dix (10) enfants.
Boureima Diallo
Programme des obsèques du Président Saye Zerbo
Vendredi 20 septembre 2013
- Veillée de prière à la Maison du peuple à partir de 20h00
Samedi 21 septembre 2013 :
- 09h00 : Cérémonie militaire à la Place de la Nation, suivie du transfert du corps à Tougan
- 20h00 : Veillée de prière à Tougan
Dimanche 22 septembre 2013 à Tougan :
- 08h 30 : Levée du corps
- 09h00 : Absoute à l’église de l’Alliance chrétienne de Tougan
- 10h00 : Inhumation dans la cour familiale au secteur 5 de Tougan.