Depuis le 8 octobre dernier, une délégation burkinabè conduite par le ministre de l’Administration territoriale, de la décentralisation et de la sécurité, Jérôme Bougma, séjourne à La Haye. Rassurez-vous, ce n’est pas une visite de courtoisie à Laurent Gbagbo, le pensionnaire de la prison de Schweningen, encore moins un transfèrement, mais plutôt pour assister à un procès lié au litige foncier qui oppose le pays des Hommes intègres au Niger. Les audiences sur fond de procédures orales se poursuivront jusqu’au 17 octobre prochain et permettront, on l’espère, aux deux pays de trouver in fine une solution à ce différend qui empoisonne leurs relations depuis près d’un siècle. Une démarche louable, s’il en est, d’autant que cela évitera les guerres fratricides inutiles comme on en a vu de par le passé avec leurs conséquences fâcheuses et incommensurables. Du reste, on se rappelle l’équipée de décembre 1985 qui avait occasionné de nombreuses pertes en vies humaines et renforcé la méfiance entre le Burkina et le Mali, deux pays qui, par la force du destin, sont pourtant condamnés à vivre ensemble. Et les exemples du genre, on peut en citer à perdre l’haleine, tant ils foisonnent sur le continent. Le Nigeria et le Cameroun se sont longtemps crêpé le chignon autour de la péninsule de Bakassi avant de faire preuve de sagesse en recourant à la Cour internationale de justice (CIJ) qui, ou s’en souvient, avait tranché en faveur du Cameroun. C’est tant mieux donc si en puissance sous-régionale, le Nigeria a accepté de se soumettre à cette décision de justice, estimant qu’il n’est pas nécessaire de demander la révision du jugement rendu en 2002. C’est ce que l’on attend également du Burkina et du Niger. S’il est vrai que c’est en « amis » et non en adversaires qu’ils se sont présentés à La Haye, ils se doivent de prendre de la hauteur en acceptant le verdict que prononcera la Cour. En optant pour la voie judiciaire, ils savent, du reste, que l’un deux perdra le procès. Mais, le plus important, c’est de travailler à préserver la coexistence pacifique entre les pauvres populations qui, n’eussent été les erreurs de la colonisation, auraient été de la même matrice. D’ailleurs, on aurait aimé qu’au nom de l’intégration sous-régionale, le Burkina et le Niger trouvassent une solution à l’amiable entre eux, plutôt que de recourir à une instance judiciaire internationale pour régler un différend foncier hérité de la colonisation. Ce n’est pas impossible puisque d’autres expériences ont démontré qu’on peut bien entreprendre des actions communes de développement sur les zones litigieuses, au lieu de les abandonner à elles-mêmes.