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Sidwaya N° 7498 du 11/9/2013

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Bienvenu Bazié, danseur-chorégraphie : « La danse contemporaine est victime de préjugés »
Publié le jeudi 12 septembre 2013   |  Sidwaya


Bienvenu
© Sidwaya par DR
Bienvenu Bazié, danseur-chorégraphie


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Avec un ami d’enfance, il a créé l’une des meilleures compagnies de danse contemporaine. Lui, c’est Bienvenu Bazié, danseur-chorégraphie et membre de la compagnie Auguste Bienvenu, qui nous parle de sa passion pour son art, des difficultés de la danse contemporaine à mobiliser les Burkinabè…

Sidwaya (S.) : Comment est née ta passion pour la danse contemporaine ?

Bienvenu Bazié (B.B) : Tout est est parti en 1993, lorsque j’ai été lauréat du concours inter-établissements de poème et récital organisé par le Directeur des arts et des métiers d’art (DAMA) à l’époque, Lamoussa Théodore Kafando. J’ai intégré les Bourgeons, son groupe artistique, où j’ai rencontré Auguste. Nous avons eu à évoluer à travers les danses traditionnelles du Burkina, le théâtre, les poèmes, les récitals, mais aussi la musique. C’est à partir de là que nous nous sommes intéressés à la danse et nous avons découvert la danse contemporaine. Nous suivions des stages à Ouagadougou. Les années 1999-2000, il y a eu la création du festival Dialogue de corps pendant lequel on pouvait rencontrer des chorégraphes internationaux qui vennaient animer des stages. C’était également des moments de rencontres où l’on pouvait se confronter à d’autres types de danse. C’est des moments qui ont nourri notre danse. En 2000, nous avons créé la compagnie Auguste Bienvenu qui, à l’époque, s’appelait Da. Nous avons fait le choix de se diriger vers la danse comptemporaine qui justement, est une forme d’expression avec beaucoup de liberté qui fait appel à d’autres types de danse.

(S.) : Malgré les efforts de promotion, la danse contemporaine n’est pas encore populaire au Burkina Faso. Regrettes-tu ton choix ?

(B.B) : Je ne regrette pas ce choix. Il ya une lutte à mener, un travail à faire sur le terrain. Nous avons besoin d’aide pour faire de la danse comptenporaine, un métier au Burkina. Nous avons besoin de l’appui de tout le monde, du pays, des autorités, des institutions pour accompagner cette forme de danse. Nous diffusons moins au pays et on se retrouve avec nos spectacles plus à l’extérieur. C’est à l’extérieur que nous sommes bien accueillis. Ce n’est pas intéressant.

(S.) : Comment expliques-tu le désintérêt des Burkinabè ?

(B.B) : Il y a beaucoup de personnes qui disent qu’elles ne la comprennent pas. Je pense qu’il y a plutôt un manque de curiosité parce que c’est facile de rester loin et de dire que je ne comprends pas quelque chose. Si on a cette curiosité, on peut aller voir des spectacles. Je pense que la danse contemporaine est victime de préjugés.

(S.) : Lesquels ?

(B.B) : Certains affirment que ce n’est pas un métier et ceux qui la pratiquent sont des personnes qui ne veulent pas travailler. D’autres disent que c’est un milieu rempli de pédés (homosexuels). Le milieu artistique est vu sous cet angle. C’est dommage que les créations des chorégraphes soient uniquement représentées ou reçues à l’extérieur. Ce serait bien qu’on arrive à la création d’un public. Les artistes seuls ne peuvent pas y arriver. Je prends par exemple la musique burkinabè qui n’était pas consommée, mais il y a eu une politique, une sensibilisation, de la politique autour de cette musique burkinabè. Nous avons aujourd’hui des résultats. Il y a une nécessité d’accompagner la danse contemporaine. C’est un secteur qui contribue à l’économie burkinabè. Un festival comme Dialogue de corps génère des fonds qui contribuent au progrès du Burkina Faso.

(S.) : D’aucuns trouvent que la danse contemporaine est trop abstraite

(B.B) : Je pense que l’abstraction s’étend même au niveau de nos cultures, de nos danses traditionnelles. Un pas gourounsi ou un pas bissa reste abstrait, c’est dire que l’émotion, l’improvisation sont à un moment donné, l’exécution du mouvement chorégraphique. Il ne faudrait pas que les gens se fassent une idée très vite de la danse contemporaine. C’est pourquoi, je dis que c’est important que les uns et les autres se déplacent pour venir voir ce que c’est qu’un spectacle. Ils ont l’habitude de voir des extraits à la télé ou juste entendre parler.

(S.) : La solution au niveau du public peut être la formation afin de donner des clés de lecture aux spectateurs et même aux journalistes

(B.B) : La sensibilisation du public est très important. Nous devons réfléchir pour aller de l’avant. Si nous n’arrivons pas à attirer le public vers nous, nous pouvons créer d’autres formes de spectacles qui puissent aller dans les quartiers pour rencontrer le public. Je me rappelle qu’en 2007, nous avons monté un projet avec Africalia où nous avons pu jouer à l’Espace culturel Gambidi. Nous avons aussi joué au théâtre populaire de Koudougou, à Ouahigouya. A Bobo-Dioulasso, nous avons joué dans les trois grands centres à savoir Djelbia, Dafra et Séraba. L’idée était de présenter au public, des prestations de danse contemporaine. Quand on joue, on a presque toujours les mêmes personnes qui viennent, donc c’était pour justement sortir de ce cadre et aller à la rencontre d’autres publics. Pendant ces représentations, nous avons aussi organisé des ateliers de formation au profit des personnes intéressées par la danse contemporaine. Mais la difficulté est que cela demande beaucoup de moyens financiers pour organiser de tels événements. Je trouve dommage que sur nos chaînes de télévision, il n’existe pas des émissions consacrées à la danse contemporaine.

(S.) : En dépit des difficultés, la compagnie Auguste Bienvenu organise régulièrement une formation au profit des danseuses dénommée "Engagement féminin". Pourquoi un tel engagement ?

(B.B) : Ce projet est né du constat qu’il y a plus de garçons qui évoluent dans la danse contemporaine que des femmes. Il y a peu de femmes que l’on retrouve sur les plateaux. Je parle de l’Afrique de façon générale. Le constat a été fait au plan national et en Afrique de l’Ouest. Contrairement à l’Afrique, en Europe, on constate plus de filles qui dansent que des garçons. En causant avec les filles, nous avons pris conscience des préjugés, dus au poids de la famille, de la religion. "Engagement féminin" est un cadre de professionnalisation des danseuses. "Engagement féminin" est aussi un projet de formation, de création et de diffusion. Pour nous, les trois étapes sont importantes. Nous avons tenu la 5ème édition. Depuis sa création, il y a eu trois spectacles dont deux créés par Auguste, moi et un autre, une chorégraphe de Bordeaux que nous avons invitée pour deux semaines .Elle a, à son tour, invité 3 filles à Bordeaux pour une résidence d’un mois. Le spectacle a été présenté à Ouagadougou et à Bordeaux.

(S.) : Des projets ?

(B.B) : "Engagement féminin" continue. On aimerait que ce soit un événement qui puisse grandir et que les filles qui ont suivi les formations puissent dans le futur, présenter des spectacles. Présentement, nous diffusons un spectacle Zouan qui veut dire parole en gourounsi. C’est un spectacle qui peut bien marcher au Burkina Faso. C’est un mélange de musique et de danse que le public adore. Je travaille présentement avec Sidiki Yougbaré sur un projet qui aborde les difficultés de l’artiste avec pas mal d’humour. On pose des questions sur le métier de l’artiste dans ce projet qui sera diffusé à Ouagadougou après une résidence au Sénégal. J’invite tous les artistes à croire en leur art et surtout de croire en ce qu’ils font. C’est très important quand on est convaincu ; ainsi, on arrive à convaincre le public.

Alassane KERE
Lydia Zouré
(Stagiaire)

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