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Sidwaya N° 7498 du 11/9/2013

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Lutte contre la drogue : Traque dans les faubourgs de la capitale
Publié le jeudi 12 septembre 2013   |  Sidwaya


Criminalité
© Autre presse par DR
Criminalité : Des présumés dealers de drogue, fraudeurs de gaz butane et un assassin supposé ont été présentés à la presse
Jeudi 16 mai 2013.


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La lutte contre la drogue au Burkina Faso mobilise de nombreux services (douane, gendarmerie, associations…) dont l’objectif est d’empêcher l’entrée des stupéfiants sur le territoire national afin d’éviter leur consommation. Du fait de la porosité des frontières et l’agilité des trafiquants, la drogue a pignon sur rue dans nos villes, particulièrement à Ouagadougou. En arrière-plan dans cette lutte, l’Unité anti-drogue (UAD) de la police nationale, une brigade d’à peine une année d’existence de la direction de la police judiciaire. Elle mène au quotidien la traque aux dealers et consommateurs de ces substances prohibées.

Dans l’après-midi du vendredi du 6 septembre 2013, l’Unité anti-drogue (UAD) de la direction de la police judiciaire, située à proximité du commissariat central de police de Ouagadougou a reçu dans ses locaux, deux présumés consommateurs de drogue interpellés par la Brigade anti-criminalité (BAC). Boureima Tapsoba, la trentaine révolue et Salam Tiemtoré âgé de 23 ans, sont des silhouettes bien connues des services de l’UAD. Ils ont été entendus par les éléments du commissaire Salif Yembi Soudré, chef de l’unité. Afin de savoir davantage sur la provenance de la drogue, en début de soirée (18 heures 20 minutes), sous un ciel chargé de nuages, une perquisition est opérée aux domiciles des deux délinquants présumés. Compte tenu de la spécificité de la mission, nous nous réserverons de décrire et de nommer certaines personnes, endroits et autres faits pour ne pas brouiller certaines pistes lors des prochaines sorties. Le commissaire et ses éléments, à bord d’un véhicule avec les deux présumés consommateurs de drogue, s’ébranlent dans la ville. Le temps pour arriver au domicile du premier décliquant est mis à profit par le commissaire pour indiquer quelques zones où narcotrafiquants et consommateurs se rencontrent à des endroits précis pour écouler la drogue et se fondre dans la nature. Juchés sur la moto, assis dans des kiosques à café ou derrière une tablette garnie de cigarettes, les dealers ne manquent pas de génie pour approvisionner les acheteurs, selon Salif Yembi Soudré.
Après environ une vingtaine de minutes de trajet, le véhicule stationne devant le domicile de Boureima Tapsoba. Une cour commune qui, à première vue, donne l’image d’une chambre de passe. Une grande allée sépare des maisons communément appelées « entrer-coucher », alignées de part et d’autre. Seules deux filles donnent des signes de vie dans la concession, assises dans l’obscurité sur un banc, adossées au mur de la troisième maison. C’est le logis de Boureima Tapsoba. La première, habillée d’une robe noire qui se limite à la hauteur des cuisses, avec une coupe afro et un visage qui se distingue par un bijou enfoncé sur le nez. Elle tient entre l’index et le majeur, un bâton de cigarette et son contenant posé sur le banc. La seconde quant à elle, un pagne ceint autour de la poitrine, tient son enfant âgé d’environ deux ans entre les jambes. « Vous voyez ces femmes ! C’est ça (Ndlr : la drogue) qu’elles sont en train de consommer », souffle à demi-mot un agent. « Qui sont les filles qui sont assises là ? », demande un autre agent à Boureima Tapsoba. « Je ne les connais pas », répond-il. Un groupe d’agents s’introduit dans sa bicoque de huit tôles non électrifiée. Au moyen d’une torche et de la lumière des téléphones portables, ils procèdent à une fouille minutieuse de la maison. Pendant ce temps, les deux filles, l’air serein, se racontent des anecdotes de vie de couples et s’esclaffent, histoire de détourner l’attention des agents. En quelques minutes de perquisition, ils découvrent des indices de la présence de la drogue dans la maison.

Le flair des agents

Il s’agit de tas de papiers découpés en forme de petits rectangles, une pipe fabriquée artisanalement et une dizaine de briquets. « Les papiers servent au conditionnement du cannabis et la pipe pour fumer la drogue dure, c’est-à-dire l’héroïne, la cocaïne et le cannabis », avise un agent. Mais le délinquant présumé nie en bloc d’être le propriétaire des objets retrouvés. Il argumente que ce sont des amis qui viennent fumer la drogue dans sa maison. « L’une de nos difficultés sur le terrain est que, même quand on prend un trafiquant la main dans le sac, prouver que ça lui appartient est un véritable parcours du combattant », déplore le commissaire Soudré. La fouille reprend de plus belle cette fois ci, dans une autre maison où habitent la fille et son enfant. Si les recherches n’ont pas permis de mettre la main sur quelque chose de suspect, les interrogations de la première fille qui se fait appeler Madina, vont attiser la curiosité des agents à aller perquisitionner chez elle située à une centaine de pas de là, dans une cour commune. Dès que les agents franchissent la porte d’entrée de la maison (un entrer-coucher) à l’intérieur de laquelle se trouvent deux autres filles devant une petite télé allumée, c’est une forte odeur de cigarette qui les accueille. Subitement, la causerie qu’elles menaient en langue locale (le mooré) prend une autre tournure, le haoussa, une langue étrangère aux agents. Elles seront vite sommées de s’exprimer en français. Après avoir expliqué l’objet de leur présence, les éléments du commissaire Soudré perquisitionnent la maison. Les soupçons de la drogue en ces lieux se résumeront uniquement à un cendrier chargé de mégots de cigarette. « Finalement on est obligé de la laisser (Ndlr : Madina) parce qu’on n’a pas de preuve qui montre qu’elle détient la drogue. Mais comme nous l’avons trouvée dans une zone de consommation de stupéfiants, nous étions obligés d’approfondir l’enquête pour voir ce que cela peut révéler. Peut-être qu’elle était allée au domicile du délinquant pour en chercher. Mais étant donné qu’il était absent, probablement qu’elle l’attendait », confie un autre agent. Et d’ajouter que l’enquête pourrait aller plus loin si la patrouille était composée d’une femme, pour faire la palpation des filles. Car dit-il, il arrive que certaines camouflent « le produit » dans les endroits intimes. Qu’à cela ne tienne, les agents rejoignent leur véhicule. « Hé vous n’allez pas nous aider à ranger nos affaires ? », interpelle une des filles. Aucun interlocuteur ne pipe mot.

« Dès qu’ils reconnaissent notre véhicule, ils préviennent leurs camarades »

La voiture se fond de nouveau dans la nature. Soudain, le commissaire au volant marque un arrêt dans un milieu réputé pour son animation et regorgeant des trafiquants de drogue. Une poignée d’éléments partent en reconnaissance. Mais, ces trafiquants d’un naturel très prudent, se sont éclipsés dare-dare. « Dès qu’ils reconnaissent notre véhicule, ils préviennent leurs camarades. Ce qui fait que quand on prend un d’entre eux, c’est très difficile de remonter la filière parce qu’ils sont très mobiles », explique le patron de l’UAD. Salif Yembi Soudré avance qu’il arrive souvent que les trafiquants engagent des personnes communément appelées des guetteurs, pour surveiller les mouvements de la patrouille depuis sa sortie de la brigade.
La traque se poursuit jusqu’au domicile familial de Salam Tiemtoré. Menottes aux mains, le délinquant présumé descend du véhicule et se dirige vers sa maison, accompagné des hommes du commissaire Soudré pour la perquisition. Ces derniers ne tarderont pas à trouver ce qu’ils recherchent. « Voilà des grains de chanvre indien éparpillés au sol ! », s’écrie un agent. « Je ne vends pas la drogue mais j’en consomme », prévient Salam Tiemtoré. A l’en croire, il achète la drogue chez un revendeur dans un village d’à côté. Mais ce prétexte ne pèse pas lourd pour faire fléchir la décision du commissaire. Comme Boureima Tapsoba, il va être présenté au procureur.
La marche du temps marque 20 heures à la montre. Le ciel menace de verser le contenu de ses vannes sur la ville. La patrouille décide de replier à la brigade. Ce retour est meublé d’anecdotes que le commissaire Soudré prend du plaisir à partager. « Nous avons pris un dealer hier nuit (Ndlr : jeudi 5 septembre) et il a été déféré ce matin. Il vendait 3 sortes de drogue (Ndlr : le chanvre indien, l’héroïne et la cocaïne). Il tenait une pipe fabriquée. Quand on l’a surpris, il a jeté la pipe et la drogue dans l’eau. C’est à l’issue d’une course-poursuite qu’il a été appréhendé. Nous l’avons maîtrisé avant d’aller repêcher ce qu’il avait jeté », raconte-t-il. Trois jours auparavant (le 2 septembre), son unité a mis le grappin sur un trafiquant de drogue du nom de Lassané Compaoré qui avait fini de purger sa peine en mai dernier pour les mêmes causes. Le dealer, âgé de 45 ans, avait à son domicile 15,5 kg de cannabis dont la valeur est estimée à 200 000 F CFA. Avec l’aide de son employé Ablassé Touré 44 ans, il le conditionnait avant de l’écouler. « Nous avons eu l’information juste quand il venait d’acquérir la marchandise. Donc, il n’a pas eu le temps de la dispatcher », précise le commissaire. De l’avis de M. Soudré, le trafic de la drogue au Burkina Faso, particulièrement à Ouagadougou, va crescendo. « Le chanvre indien coûte moins cher. La boule est à 100F CFA et elle est à la portée de tout le monde. En ce qui concerne la drogue dure, la ligne d’héroïne coûte 1250F CFA. Par contre la cocaïne c’est sous la forme de dose et elle est vendue entre 2500 et 3000F CFA », étaye-t-il.
Mais la détermination du commissaire et ses hommes à lutter contre ce fléau est au beau fixe si bien que les patrouilles sont opérées au quotidien de jour comme de nuit. En retour, Salif Yembi Soudré invite les populations à une collaboration en joignant son unité au 1010 ou au 16 ou encore au 17. « Nos activités sont essentiellement basées sur les renseignements opérationnels puisqu’il n’y a pas de plaintes à notre niveau. Toute personne peut nous contacter pour dénoncer les trafiquants dans l’anonymat », conclut-il.

Paténéma Oumar OUEDRAOGO

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