Bachir Ismaël Ouédraogo, Ministre de l’Énergie, des Mines et des Carrières dans une interview parue dans le Journal Jeune Afrique d’Avril 2021, consacré au Burkina Faso.
L’énergie et les mines sont les moteurs de notre économie. Leur fusion doit nous permettre de concrétiser l’accès universel à l’énergie, grâce au potentiel minier. Et nous devons produire des résultats pour répondre aux attentes des Burkinabè. Sans énergie, point de développement. Au cours des cinq dernières années, le taux d’accès à l’électricité est passé de 18 % à 45 %. Notre objectif est d’atteindre le seuil de 75 % à l’horizon 2025.
Quant au secteur minier, la filière aurifère a généré plus de 2000 milliards de F CFA [plus de 3 milliards d’euros] de revenus en 2020, avec une production de 60 tonnes d’or, et nous voulons accroître la production de minerais en misant sur la stratégie du local content, local ownership [« production locale, actionnariat local »]. Il s’agit de faire en sorte que des PME et des hommes d’affaires burkinabè puissent prendre des parts de marché dans la chaîne de commande, et d’inciter les investisseurs locaux à saisir les opportunités du secteur.
La feuille de route que nous a donné le chef de l’État est claire sur ce point. Nous avons mis en place une direction générale consacrée à la promotion des économies minières et énergétiques, de façon à favoriser l’émergence de PME fortes, capables de construire des centrales et des mines. Cela va nous permettre d’installer des industries pour préparer « l’après-mine » en utilisant le potentiel du secteur extractif afin de développer d’autres pans de l’économie. Déjà, nous nous réjouissons d’avoir obtenu l’extension de la mine de Bomboré [Centre], financée par une banque locale, et d’avoir octroyé le premier permis minier détenu à 100 % par des capitaux burkinabè, Salma Mining.
Plus de 2 millions de Burkinabè travaillent dans l’orpaillage, et plus de 20 tonnes d’or par an sont produites de façon illégale… Imaginez la masse d’argent qui échappe au contrôle du fisc! Cela alimente les réseaux mafieux et le terrorisme. Nous connaissons le circuit clandestin de ce trafic, qui transite par des pays voisins comme le Ghana, le Mali ou encore le Togo.
Entre 5 et 10 tonnes d’or sortent chaque année de ce pays alors qu’il n’en produit pas… Nous devons régler ce problème fondamental, et nous avons engagé le dialogue avec le syndicat des orpailleurs. Nous ne pouvons plus nous regarder en chiens de faïence. Le ministre délégué et moi-même avons assisté à leur assemblée générale afin de les rassurer sur le fait que nous sommes là pour protéger le secteur. Nous allons démarrer les activités de raffinage pour sécuriser les sites de production d’or et innover en matière de traçabilité, mais aussi délivrer aux orpailleurs une carte d’artisan minier. Enfin, nous prévoyons d’autres mécanismes incitatifs pour les encourager à s’orienter vers une exploitation semi-mécanique, voire semi-industrielle.