L’Union générale des étudiants du Burkina (ANEB) réagit à la récente expulsion d’étudiants à l’Université de Koudougou. Elle exige l’annulation des sanctions, qu’elle juge « iniques », infligées aux étudiants et le départ sans condition des « forces de répression » du campus. Lisez !
Depuis un certain temps, nos camarades de l’ANEB/Koudougou, à travers la corporation de l’Unité de formation et de recherche en Lettres et sciences humaines (UFR/LSH), sont en lutte autour, entre autres, de la mauvaise programmation des examens et du calendrier de l’année universitaire imposé par le tristement célèbre président de l’Université de Koudougou, Pr Bila Gérard Segda pour, selon lui, rattraper le retard dans l’exécution des cours et évaluations. Tout a commencé en janvier 2012 lorsque les autorités universitaires décidèrent de programmer la rentrée académique 2011-2012 au niveau des premières années d’Histoire et Archéologie et de Géographie alors que les promotions précédentes étaient toujours dans l’attente des résultats de la première session de l’année 2010-2011. Comme il fallait s’y attendre, nos camarades de l’UFR/LSH ont entrepris des démarches qui ont finalement abouti à la suspension de la programmation anticipée de la rentrée académique par la direction de l’UFR, chose que le Pr Segda n’a pas digérée au point de traiter la direction de l’UFR de collaboratrice de l’ANEB. Le sieur Segda, professeur de son état, feint d’ignorer que les retards dans la programmation de l’année académique ne sont pas le fait de l’ANEB. Ces retards sont essentiellement liés à la gestion chaotique de la crise née de l’assassinat de l’élève Justin Zongo en février 2011, à l’insuffisance des infrastructures d’accueil, contraignant les étudiants à squatter dans des locaux inadaptés tels que les locaux de SAP-olympique, de la BIB et de l’aumônerie, au manque criard d’enseignants (la plupart de ces enseignants viennent de l’université de Ouagadougou), entraînant souvent l’arrêt momentané des cours pendant au moins deux (2) semaines, au tâtonnement dans l’application du LMD dans lequel l’université de Koudougou, à l’instar des autres universités publiques de notre pays, est entrée sans mesure d’accompagnement, etc. C’est ainsi que l’administration tentera de programmer intensivement les cours et les évaluations (exemple de la première année de psychologie où trois évaluations de cours magistraux et des évaluations en TD et TP ont été programmées en une semaine). Les interpellations de notre corporation de l’UFR/LSH sur le caractère insupportable de la programmation intensive des évaluations sont restées vaines, contraignant ainsi les étudiants à boycotter ces évaluations en vue d’exiger leur meilleure programmation. L’administration du Pr Segda n’en restera pas là car, elle décidera par la suite de faire chevaucher les semestres dans tous les départements de l’UFR/LSH en programmant des nouveaux semestres alors que les cours et évaluations des précédents semestres ne sont pas encore achevés. Cette mesure qui est contraire à l’esprit du système LMD qui veut que les étudiants évoluent par semestre ne pouvait pas laisser nos camarades indifférents, qui ont alors proposé à l’administration de permettre aux étudiants de terminer au moins les évaluations de la première et de la seconde session d’un semestre avant de programmer les cours comptant pour un nouveau semestre, marquant ainsi leur disponibilité à commencer un nouveau semestre en attendant leurs résultats. Face à la détermination des étudiants à ne pas laisser piétiner leurs intérêts, l’administration du Pr Segda est restée sur ses positions et est même passée à une vitesse supérieure à travers l’adoption au forceps d’un texte liberticide, le 12 juillet 2012 au cours d’un Conseil de la formation et de la vie universitaire (CFVU), lequel prévoit à son article 19 que tout programme établi par l’administration est non négociable. En réalité, ce texte a été élaboré juste pour permettre au Pr Segda et ses acolytes de prendre de nouvelles mesures anti-étudiants car, sept (7) jours après soit le 19 juillet 2012, les autorités universitaires imposèrent un nouveau calendrier universitaire aux étudiants de l’UFR/LSH, calendrier qui confisque les vacances d’un mois accordés aux étudiants par l’ancien calendrier adopté en début d’année. Les étudiants, sous la direction de la corporation, ont dès lors engagé des discussions avec l’administration en vue de faire des propositions à même de permettre de rattraper le retard tout en jouissant de leurs vacances d’un mois. Il n’en fallait pas plus pour que l’administration du Pr Segda leur reproche de vouloir s’immiscer dans les questions purement pédagogiques prétendument réservées au corps enseignant. On se rappelle que c’est le même argument qui avait été utilisé en 2007-2008 par le ministre Jean Koulidiati, alors président de l’université de Ouagadougou, pour justifier la répression abattue sur nos camarades de l’université de Ouagadougou lorsque ceux-ci avaient réclamé que les conditions d’obtention de la dérogation soient allégées. L’attitude du Pr Segda a conduit nos camarades à organiser des Assemblées générales (AG), meetings, sit-in pour se faire entendre. C’est ainsi que le président de l’université de Koudougou a été contraint de recevoir la corporation de l’UFR/LSH accompagnée du comité exécutif de l’ANEB, le 9 août 2012. C’est au cours de cette réunion que le Pr Segda fera clairement comprendre qu’il n’est pas le seul responsable des décisions anti-étudiants ci-dessus citées prises pour soi-disant rattraper l’année. En effet, il avoua avoir reçu des instructions fermes du gouvernement de mettre tout en œuvre pour rattraper le retard afin de mettre les étudiants hors du campus avant le 11-Décembre pour permettre au gouvernement d’organiser paisiblement les festivités marquant le 52e anniversaire des indépendances formelles de notre pays prévues pour se dérouler cette année dans la ville de Koudougou. Voilà un gouvernement qui prétend atteindre l’émergence à l’horizon 2015 et qui choisit de saboter la formation d’étudiants (futurs cadres) au profit d’activités folkloriques. Quelle honte ! Face au refus des autorités universitaires d’accéder aux propositions des étudiants, ceux-ci décidèrent en Assemblée générale d’aller en vacances du 1er septembre au 1er octobre 2012. C’est ainsi qu’un groupuscule de sept (7) étudiants détenant des armes blanches sera instrumentalisé par les autorités universitaires en vue de s’en prendre aux piquets de grève de l’ANEB dès le 1er septembre. Des mensonges seront ensuite honteusement débités par le Chef de département d’Histoire et Archéologie, le Dr Mahamoudou Oubda, sur le compte de certains de nos camarades dont l’ex-président de notre section de Koudougou, calomnié d’avoir pris part à une évaluation pendant un mot d’ordre de l’ANEB, alors qu’il n’en était rien. De telles manœuvres qui avaient pour but d’intoxiquer et de diviser les étudiants plus que jamais unis pour un enseignement de qualité ne les ont pas laissés indifférents. C’est pourquoi, profitant de la présence du camarade ex-président, ils ont exigé de l’enseignant de démentir ou de confirmer ses propos devant les étudiants. L’enseignant reconnut avoir dit des contre-vérités. Depuis lors, les autorités universitaires ont entrepris une campagne d’intoxication contre notre organisation, accusant nos camarades, à tort, d’avoir agressé des étudiants et des enseignants. Et ce fut un alibi pour les autorités de faire occuper le campus de Koudougou par les forces dites de l’ordre (depuis le 5 septembre 2012 jusqu’à ce jour) qui, on se rappelle, se sont illustrées négativement en 2011 assassinant élèves, étudiants et jeunes du secteur informel à Koudougou, Réo, Kindi et Poa lors de manifestations pacifiques. Ainsi, les groupuscules d’étudiants fantoches étaient escortés par ces forces de répression dans les amphis pour prendre cours ou subir des évaluations pendant que la majorité des étudiants qui manifestaient leur mécontentement étaient sauvagement réprimés à coup de gaz lacrymogènes et de matraques, faisant ainsi des blessés (exemple de la répression du 29 septembre dernier). Par exemple, le 10 septembre 2012, seulement 17 étudiants sur 212 que compte la promotion d’Histoire III ont composé manu-militari dans une matière. Le 29 septembre ce sont trois (3) étudiants sur 260 environ qui ont composé dans une matière non dispensée en 1re année d’Histoire. Non content d’avoir violé les franchises et libertés académiques, le Pr Segda traduira seize (16) de nos camarades en Conseil de discipline pour agression d’un enseignant et de deux étudiants ; boycott de cours et d’évaluations et ce, en violation flagrante de la procédure en la matière. En effet, pendant que la commission interne d’instruction dont les rapports doivent servir de base aux délibérations du Conseil de discipline entendait nos camarades, ceux-ci recevaient au même moment la convocation à comparaître devant le Conseil de discipline. Cela prouve à suffisance que les autorités universitaires avaient préparé à l’avance une répression à l’égard de nos camarades dont le seul crime est d’appartenir à l’ANEB. D’ailleurs, le verdict du Conseil de discipline qui s’est finalement tenu le 2 octobre 2012, sous haute surveillance de gendarmes et policiers armés jusqu’aux dents tels des despérados, ne trompe pas. Sur les 16 camarades qui ont comparu, deux (2) ont vu leur session annulée tandis que les quatorze (14) autres ont écopé de sanctions allant de l’exclusion temporaire de 1 à 5 ans à l’exclusion définitive des universités publiques et privées de notre pays.
Camarades étudiantes et étudiants,
Toutes ces manœuvres visent à briser en nous l’esprit de lutte et à liquider notre cadre authentique de lutte. C’est pourquoi le comité exécutif de l’UGEB appelle l’ensemble des étudiants burkinabè à se solidariser avec la lutte de nos camarades de Koudougou. Par ailleurs, il exige des autorités universitaires :
l’annulation des sanctions iniques infligées à nos camarades ;
le départ des forces de répression du campus de Koudougou ;
la reprogrammation des cours et évaluations boycottées par les étudiants.
D’ores et déjà, il appelle l’ensemble de ses sections à organiser des Assemblées générales d’explication et à observer un mot de grève de 24h le jeudi 11 octobre prochain. Tout en tenant les autorités universitaires responsables de la dégradation plus poussée du climat social dans les universités, il invite les étudiants à rester à l’écoute pour d’autres actions en vue de faire aboutir nos revendications.
Non à la violation des franchises et libertés académiques !
Non aux sanctions iniques à l’endroit des étudiants !