La région de l’Est tout comme celles du Centre-Nord, de la Boucle du Mouhoun et du Sahel sont en proie au terrorisme et au grand banditisme. En réponse à cette problématique d’insécurité, les autorités politiques ont, à travers la mise en place des Volontaires pour la défense de la patrie (VDP), formalisé la collaboration entre les populations civiles et les Forces de défense et de sécurité (FDS). Pour le chef VDP de la commune de Matiakoali, région de l’Est, la situation sécuritaire revient progressivement à la normale. C’est ce qu’il déclare dans l’interview qu’il nous a accordée le 28 décembre 2020. Il y parle de l’engagement des VDP aux côtés des militaires pour le retour de la paix. Pour Dali Combari, puisque c’est de lui qu’il s’agit, cultivateur, de son état, doit se donner les moyens de protéger ses populations.
Pourquoi avez-vous répondu à l’appel du chef de l’État ?
Nous avons l’avons fait pour notre propre sécurité d’abord. Ensuite, quand on se rend compte que l’on perd des voisins et des proches du fait de la menace terroriste, on ne peut pas rester les bras croisés. On s’est mobilisé pour protéger nos familles et la commune de Matiakoali.
Quel est l’état des lieux sur le terrain ?
Depuis combien de temps êtes-vous VDP ?
Je me suis engagé dans cette lutte rien qu’en mars 2020. C’est un combat de longue haleine mais nous allons en sortir victorieux.
Combien êtes-vous dans la zone?
La commune de Matiakoali compte plus de 44 volontaires pour la défense de la patrie. Pour ce qui concerne nos interventions, nous nous déplaçons avec nos propres motocyclettes. Même pour les sorties avec les FDS, nous utilisons nos engins car il y a un manque criard de moyens de locomotion.
Comment doit se comporter un VDP ?
Un VDP, c’est une personne qui collabore avec la population, un agent de renseignement fiable qui est vigilent et prêt à alerter. C’est le genre de personne qui doit être prompte à réagir une fois qu’elle constate quelque chose d’anormal dans son village. Le VDP identifie qui est de passage dans sa localité. Par exemple, il peut entrer en contact avec un étranger pour en savoir davantage sur lui. La nuit, tout le monde monte la garde jusqu’au petit matin dans son village et dans toute la commune de 19 h à 5 h. Quand on appréhende un intrus, on alerte les FDS les plus proches, afin qu’elles interviennent pour auditionner le présumé suspect. A défaut, les VDP le font eux-mêmes, sans tambour ni trompette.
Beaucoup prêtent aux VDP une puissance mystique qu’en dites-vous ?
Pourquoi cela ? Les populations ont pourtant besoin de savoir que vous êtes efficaces dans leur protection.
La population ne s’oppose pas à notre discrétion. On peut vous indiquer quelqu’un qui n’est pas la bonne personne. Si vous le relâchez, il peut être vu comme un paria et sera mal vu par les populations. Cela peut honnir la personne. C’est la raison pour laquelle on ne fait pas trop de bruit dans ce type d’opération. Mais si la situation nous contraint à faire du bruit, à prendre les armes, nous y allons. Si des terroristes commettent des attaques ailleurs et replient sur nos terres pour se réfugier, on les déloge immédiatement.
Quelle est votre zone d’action ?
On intervient un peu partout dans la commune de Matiakoali où le besoin se fait sentir et si on en a la capacité. A Nassougou, nous n’intervenons pas parce que là-bas, les terroristes ont installé leur première base d’où ils ont commis des exactions. Les pistes sont minées et ils ont installé des sentinelles un peu partout dans la ville. Il faut une intervention aérienne.
D’aucun ne voient pas d’un bon œil la mise en place des VDP, et vous accusant d’exactions et de communautarisme qu’en pensez-vous ?
Comment peut-on vivre donc à Nassougou ?
Nous sommes inquiets pour les populations car elles ne savent où aller. Elles sont obligées de subir. Actuellement à Nassougou, il n’y a pas d’agent de santé et les gens se dirigent vers Ougarou, Fada N’Gourma ou Matiakoali pour se soigner. Les hommes évitent de quitter Nassougou, de peur qu’on les considère comme des traitres. Les voyages suscitent en effet la suspicion de part et d’autre, chez nous comme chez l’ennemi.
Qu’est-ce qui vous a le plus marqué sur le terrain ?
C’est confidentiel, je ne peux rien dire à ce sujet. Il y a des règles. Par exemple, on ne doit pas faire de photos parce que notre téléphone peut se retrouver entre les mains d’une personne de mauvaise foi.
Que faut-il selon vous pour gagner cette lutte ?
Comment se passe la collaboration avec les FDS ?
Elle est parfaite. On n’a pas le choix puisqu’on joue presque le même rôle. Au front, le front on ne fait pas de distinguo non plus.
Avez-vous déjà perdu des frères d’armes ?
A Matiakoali, nous n’avons jamais perdu de combattants. Ailleurs dans la région oui. De nombreux VDP ont perdu la vie sur différents fronts.