En dépit de l’existence de cadres communautaires pour encadrer l’évaluation des dépenses fiscales et lutter contre les Flux financiers illicites (FFI), le Burkina Faso à l’image d’autres pays du continent africain continuent de perdre énormément des ressources due à l’érosion de l’assiette fiscale et à l’abus des mesures fiscales dérogatoires. C’est dans ce cadre que la plateforme des Organisations de la société civile avec le Centre de recherche appliquée en finances publiques (Cera-FP) a organisé ce jeudi 17 septembre 2020 à Ouagadougou, une rencontre avec l’ensemble des acteurs concernés, en vue d’échanger sur le cadre communautaire et son effectivité au Burkina.
Le Cera-FP en partenariat avec l’Ong Oxfam/BF met en œuvre depuis 2018, un projet intitulé "Initiative multipartite pour une économie humaine en Afrique" (WAF). Ce projet poursuit selon ses initiateurs, poursuit un objectif ultime, notamment la promotion de la justice fiscale pour contribuer à la réduction des inégalités au Burkina. La justice fiscale se définit comme étant la définition et la mise en place d’un système fiscal qui est assis sur les capacités contributives des contribuables. Mais aussi, de fortes parts budgétaires allouées aux investissements sociaux de base comme l’éducation, la santé, l’agriculture et l’accès à l’eau potable et assainissement. Pour prendre en charge cette thématique, "les Etats doivent travailler à déployer d’importants efforts pour une mobilisation optimale des ressources endogènes", soutien Yoropo Abdoul Dembélé, PCA du Cera-FP.
Cependant, les efforts des administrations fiscales des pays africains sont fortement annihilés par les dépenses fiscales liées aux mesures dérogatoires accordées dans le cadre de la politique économique et sociale des Etats et l’utilisation des failles du système fiscal par les multinationales à travers le phénomène de FFI. En effet les pays de la sous-région africaine connaissent depuis plus d’une dizaine de décennie, un boom dans le domaine des industries extractives. Cet état de fait a conduit les pays à accorder davantage d’allègements fiscaux pour attirer les investisseurs étrangers. Cette situation a engendré une concurrence implicite entre les Etats, chacun voulant attirer le plus d’investisseurs sur son territoire, desservant du même coup, les intérêts des populations de ces Etats.
C’est ainsi que depuis 2015, le Burkina procède suite à une décision de l’Union monétaire ouest-africaine, a mis en place un cadre national d’évaluation des dépenses fiscales. Au regard des évaluations faites en 2016, 2017 et 2018, M. Dembélé fait remarquer que les plus grands bénéficiaires de ces dépenses fiscales sont les entreprises. En outre, la faiblesse du système et des outils de surveillance, de contrôle et de traçabilité des transactions financières vient accentuer le phénomène dans ces pays. En effet, les estimations les plus récentes de la Commission économique pour l’Afrique (CEA), indiquent qu’au cours de la période 2000-2015, les FFI nets entre l’Afrique et le reste du monde se sont élevés en moyenne à 73 milliards de dollars US par an, rien qu’en raison de la fausse facturation. "Ce qui est sensiblement plus que le montant de l’aide publique au développement reçue chaque année par l’Afrique durant la même période", fait remarquer M. Dembélé.
L’objectif de cette rencontre est donc de nourrir le débat public pour l’amélioration de la pertinence des dépenses fiscales et la réduction des pertes de recettes induites par les incitations fiscales et les FFI. C’est donc un cadre d’information, de débat et de réflexion, mais aussi d’interpellation et d’action.