L’Institut free Afrik, en partenariat avec l’ONG Diakonia, a organisé un atelier de restitution des résultats d’une étude sur l’«économie politique du secteur minier au Burkina Faso », les 23 et 24 juillet 2020 à Ouagadougou.
L’Institut free Afrik veut contribuer à mettre l’économie minière burkinabè au service du développement socioéconomique du pays. A cet effet, en partenariat avec l’ONG Diakonia, il a réalisé une étude sur l’«économie politique du secteur minier au Burkina Faso». Les résultats de cette étude ont fait l’objet d’une restitution aux acteurs de la société civile et des médias, les 23 et 24 juillet 2020 à Ouagadougou. Selon le directeur exécutif de Free Afrik, Dr Ra-Sablga Seydou Ouédraogo, le projet vise à évaluer la contribution du secteur minier au développement économique et social du Burkina Faso et à expliquer les blocages à l’appropriation nationale du secteur. Il s’agit également d’imaginer des réformes nécessaires pour faire des mines un important levier du développement national, a-t-il ajouté.
Il a noté que le secteur minier est affecté par l’insécurité avec pour conséquence, une forte perturbation de l’activité d’exploration, des surcoûts de production dans les domaines du transport, de la sécurisation des sites et du recrutement. Toutefois, le secteur reste rentable au regard du cours intéressant de l’or, a fait savoir Dr Ouédraogo. « En termes de contribution socioéconomique, l’or constitue le principal produit d’exportation. Sa contribution aux recettes fiscales est également très importante », a-t-il souligné. A titre illustratif, en 2017, les recettes minières, représentaient 14% des recettes fiscales totales.
Faible effet d’entraînement
Mais malgré ces indicateurs, a-t-il poursuivi, l’ancrage du secteur minier à l’économie nationale reste très faible.
« C’est un secteur qui se comporte comme une économie d’enclave, c’est-à-dire qui a un lien très faible avec les autres secteurs. Le secteur minier n’arrive pas à produire un effet d’entraînement pour les autres secteurs de l’économie », a indiqué le directeur de Free Afrik. Depuis le boom minier en 2008, pendant que l’activité minière est en pleine croissance, les performances du secteur agricole sont en baisse constante, note-t-il.
L’étude réfute la théorie de la « malédiction des ressources » utilisée généralement pour expliquer la difficulté à transformer les ressources naturelles en levier de progrès économique et social pour tous. Le problème réside plutôt dans un manque de discipline dans la gestion des finances publiques et la faible appropriation nationale du secteur minier. Les résultats des travaux de Free Afrik rejettent également les arguments usuels fondés sur le caractère capitalistique et complexe de l’exploitation minière et la faiblesse de l’expertise locale pour justifier cette absence du secteur privé national dans l’industrie des mines.
Les compétences locales existent, bien qu’il faille les renforcer à travers un schéma d’apprentissage bien défini, ajoute le directeur exécutif de Free Afrik.
Il a salué le début d’opérationnalisation du fonds minier de développement local, issu du code minier de 2015, et qui permet aujourd’hui de transférer d’importantes ressources aux communes. Dans le cadre de ce fonds, il a confié que la commune de Houndé a reçu environ un milliard F CFA au titre de 2019.
Combattre les conflits d’intérêts
Mais pour l’équipe des chercheurs, le faible apport socioéconomique de l’industrie minière est dû à l’inefficacité de la régulation du secteur. Une situation qui s’explique par la capture du régulateur, qui est pris dans un engrenage de conflits d’intérêts.
« On a des anciens ministres qui sont devenus des miniers, des responsables en charge de la régulation qui ont des prises illégales d’intérêts dans le secteur minier », a expliqué Dr Ra-Sablga Seydou Ouédraogo.
Pour un meilleur ancrage du secteur minier dans l’économie nationale et un impact socioéconomique plus large, l’étude a recommandé de renforcer la gouvernance minière à travers une lutte efficace contre le jeu d’intérêts dans le secteur et une nette amélioration de la régulation.
« Il faut faire en sorte que les commis de l’Etat chargés de la régulation ne soient pas juges et partie. Il faut renforcer la régulation en termes de contrôle de la production effective de l’or», a-t-il souligné. L’étude recommande également à l’Etat burkinabè de disposer d’une politique ambitieuse en matière de contenu local et d’appropriation nationale du secteur.
A ce niveau, selon l’Institut Free Afrik, il importe de dédier des titres miniers au secteur privé local, avec un schéma d’apprentissage devant lui permettre de s’approprier le secteur dans le domaine de l’exploitation.
Le renforcement de la gouvernance du fonds minier de développement local, la diversification économique, la mise en place d’un fonds minier d’investissements, le renforcement de la protection de l’environnement, font également partie des recommandations de l’étude. Les participants à l’atelier, ont pour leur part, proposé de renforcer les capacités du BUMIGEB, des administrateurs représentant l’Etat dans les sociétés minières, l’implication des journalistes. Ils ont aussi proposé que la société civile este en justice, en cas de violation de la législation minière.