Des personnes vivant avec un handicap ont dénoncé, lundi 8 juin 2020, à Koudougou, les difficultés d’accès à la carte d’invalidité et des avantages y afférents.
«Nous avons fait des demandes de cartes d’invalidité pour nos membres en 2017. C’est après trois ans que 3 personnes sur 54 ont eu les leurs. Pourtant, le document a un délai de validité de 5 ans», a soutenu, de prime abord, Victorine Guissou, présidente de l’Association féminine des handicapées physiques Teegawendé (AFHPT) de Koudougou. Au cours d’une rencontre avec des journalistes, lundi 8 juin 2020, des personnes vivant avec un handicap ont dénoncé les difficultés d’accès au « précieux sésame », censé leur accorder de nombreux avantages. En effet, Mme Guissou a entrepris des démarches pour s’offrir la carte d’invalidité, ainsi qu’aux membres de son association. Elles ont d’abord buté sur un problème d’établissement des certificats médicaux, pour lesquels elles ont dû débourser, chacune, 2000 F CFA, contrairement aux dispositions légales. Ensuite, elles ont dit avoir acheminé les dossiers de demande au ministère de la Femme, de la Solidarité nationale, de la Famille et de l’Action humanitaire. « Après une année d’attente, on nous a dit que la machine qui confectionne les cartes est en panne. Nous sommes fatigués de faire des allers-retours, même établir un passeport ne prend pas tout ce temps. Désormais, nous allons présenter nos béquilles comme preuve de notre handicap », a affirmé Victorine Guissou, visiblement irritée. Après près de quatre années de démarches, seulement trois personnes sur la cinquantaine ont reçu le document, deux avaient des erreurs, a déploré Mme Guissou.
Une chose est d’avoir la carte d’invalidité, une autre est de jouir des avantages y afférents, notamment dans les domaines de la santé, de l’éducation, de la formation professionnelle, de l’emploi, des transports… « Pour payer la scolarité ou des ordonnances, on présente la carte d’invalidité. Mais personne ne la reconnaît. Pour bénéficier des exonérations, il faut sortir tous les textes et documents qui prouvent que l’on est handicapé. Est-ce qu’on a besoin d’un papier pour reconnaître un handicapé ? », s’est interrogée la secrétaire générale de la Fédération burkinabé des associations pour la promotion des personnes vivant avec un handicap (FEPAH)/Centre-Ouest, Pauline Kaboré. « La carte nous permet de prendre part aux concours, à part cela, absolument rien. Elle n’est pas prise au sérieux », a ajouté Moumouni Sawadogo, représentant des étudiants de Koudougou vivant avec un handicap.
« Un sérieux problème »
Pour Mme Kaboré, les lourdeurs administratives et l’« inutilité » de la carte d’invalidité n’encouragent pas les personnes vulnérables à postuler pour ce document.
« J’ai eu ma carte en 2013. Elle a expiré, mais je n’ai pas eu le courage de refaire encore la demande, car il y a trop de tâtonnements et de tracasseries », a indiqué la SG, Pauline Kaboré. Aujourd’hui, les
« plaignants » demandent des facilités d’accès au « précieux sésame ». « Nous voulons juste que la carte soit rendue accessible ainsi que ses avantages pour qu’elle soit profitable aux personnes vivant avec un handicap », a émis le président de la FEPAH/Centre-Ouest, Paul Kaboré. Il a demandé que la loi n° 012-2010 portant protection et promotion des droits des personnes handicapées soit mise en application. Aussi pour éviter les « excuses de panne de machine », M. Kaboré a suggéré qu’il soit permis aux directeurs régionaux en charge de la question, de délivrer lesdits documents, étant donné que les cartes ne sont pas biométriques. Il a aussi proposé que les différents services soient sensibilisés aux avantages qu’offre la carte d’invalidité à ses détenteurs.
Approchée, la responsable de la promotion et la protection des personnes handicapées, Apolline Bengaly, a reconnu des retards dans la délivrance des cartes d’invalidité.
« C’est un sérieux problème », a-t-elle dit, ajoutant que cela dû à une panne de la
« seule » machine qui les confectionne. Aussi, la confection des cartes est centralisée dans la seule ville de Ouagadougou, si fait que la « bénévole » qui s’en charge est vite submergée par les demandes qui viennent de tout le pays. « Vu leur vulnérabilité, il faut leur faciliter la tâche », a-t-elle admis. Pour elle, il faut plus sensibiliser les personnes handicapées à obtenir la carte et leur permettre de bénéficier de tous les avantages. « Il ne faut pas avoir la carte pour l’avoir », a laissé entendre Mme Bengaly.