Accueil    MonKiosk.com    Sports    Business    News    Annonces    Femmes    Nécrologie    Publicité
NEWS
Comment

Accueil
News
Politique
Article
Politique

Pascal Zaïda coordonnateur du CED, membre fondateur de la COP: « Nous avons connu des régimes incapables, mais le plus illustratif de l’incapacité est le régime du MPP »

Publié le vendredi 1 mai 2020  |  Netafrique.net
OSC
© aOuaga.com par A.O
OSC : assemblée générale du CED
Samedi 22 avril 2017. Ouagadougou. Le Cadre d`expression démocratique (CED) a tenu une assemblée générale sur les grands sujets de l`actualité nationale. Photo : Pascal Zaïda, coordonnateur national du CED
Comment


L’actualité est marquée de par le monde par la crise sanitaire à savoir la pandémie de la maladie à coronavirus. Le Burkina Faso n’y a malheureusement pas échappé et la gestion de cette crise fait couler beaucoup de salive. Dans l’interview qui suit, Pascal Zaïda, figure de la société civile donne son point de vue sur la gestion de cette crise. Avec lui, nous avons également évoqué d’autres questions telles que la crise sécuritaire, les élections ainsi que la gouvernance actuelle.

Le Quotidien : Comment se porte votre mouvement ?

Pascal Zaïda: Merci pour cette opportunité. Nous dirons sans hésiter que vous m’accordez une occasion de dire des choses de mon cœur et des choses de mon esprit, toutes liées aux préoccupations du moment. Je dois dire que notre mouvement se préoccupe d’actualités qui touchent à la vie nationale et internationale. Cela dit, le Cadre d’expression démocratique (CED) et la Coordination Nationale des OSC pour la Patrie (COP) qui est composé du CED et du M21 se portent très bien et sa dernière sortie le 1er avril 2020, a permis de dire aux yeux du monde que le gouvernement doit prendre des mesures sociales pour accompagner les mesures restrictives liées à la pandémie. Vous l’aurez même constaté. En tout cas, nous jouons notre rôle de veille citoyenne pour la promotion et la défense de la démocratie.

Le Burkina traverse une crise sanitaire depuis maintenant plus d’un mois à savoir la pandémie du COVID-19; comment appréciez-vous la gestion de cette crise ?

Il faut dire qu’à l’origine, cette pandémie a surpris tout le monde entier et on se demande d’ailleurs ou étaient les scientifiques, les prédicateurs, les pasteurs, les grands marabouts ? Où se trouvaient-ils pour ne pas deviner l’hécatombe ? Pourquoi n’ont-ils pas prévu l’arrivée et l’expansion du Covid 19 ? Il va falloir donc penser à une
réorganisation de l’ordre mondial au plan scientifique et technologique sinon c’est inadmissible que depuis ces moments cruciaux, aucun remède conventionné n’ait été trouvé. Pour revenir à votre question, notre pays a connu ses premiers cas par le biais du couple Karambiri, qui n’a même pas osé présenter des excuses au peuple burkinabé. C’est à partir de là donc que la pandémie s’est développée rapidement et s’est propagée dans beaucoup de villes. Ça nous pose bien de questionnements, d’autant plus que mille doutes subsistent sur les morts liés au Coronavirus. Il y a donc une question de transparence qui se pose.

Face à cette situation le gouvernement a pris un certain nombre de mesures pour freiner la propagation de la maladie; quelle appréciation faites-vous sur ces différentes mesures-là ?

La maladie à coronavirus n’est pas une panacée selon moi. Elle n’exterminera pas la terre entière. Elle est venue nous ouvrir les yeux sur une vérité ultime de l’humanité: nous sommes tous égaux en droits et en devoirs. Pour moi, ces mesures ne sont pas des mesures calquées sur nos capacités physiques de résilience ou de résistance face au virus. Ce sont des mesures impopulaires qui ont la fâcheuse tendance de liquider l’économie nationale et de tuer dans l’œuf la construction d’une économie primitive basée sur des PME. Les marchés, les yaars, les maquis et autres centres de commerce en paient largement le prix aujourd’hui. Pour nous, les autorités décident exactement comme ce qui est décidé en France ou en Côte d’Ivoire mais, elles oublient que les pays n’ont pas les mêmes réalités

Certaines activités qui avaient été suspendues reprennent petit à petit avec l’ouverture du grand marché, l’allègement du couvre-feu et bientôt l’ouverture des écoles ; quel est votre point de vue sur la démarche du gouvernement ?

Il faut relativiser. Selon moi, on ne peut pas gérer les problèmes de l’école au même titre que le problème du marché. Le marché nourrit l’école. Le marché nourrit le marché. Le marché nourrit nos foyers. Je ne serai pas heureux que nous résolvions les problèmes liés à l’école avant de concevoir les outils pour une reprise des activités commerciales. Ce sont elles qui nourrissent l’école. Il faut d’abord prendre des mesures pour décongestionner l’économie, ouvrir les marchés, déconfiner les villes en quarantaine pour permettre aux gens de s’approvisionner dans les provinces sinon ce confinement asphyxie l’économie et aucun apport en distribution ne peut sauver le pays. En sus, il faut admettre que l’école, les marchés, les yaars et autres sont tous des acteurs économiques qu’il faut respecter au même titre. Alors il faut respecter tous les acteurs et discuter avec eux avec la même rigueur et la même transparence.

D’aucuns estiment par exemple qu’il est prématuré d’ouvrir les écoles alors que la crise n’a pas encore été maîtrisée ; qu’est-ce vous en pensez ?

Ce n’est pas l’école seule qu’il faut ouvrir. Il faut aussi lever immédiatement le couvre-feu et la quarantaine sinon comment les enseignants vont rejoindre leur poste avant le lundi 4 mai pour la rentrée administrative? Vous voyez donc la contradiction et le cafouillage total dans les prises de décisions comme si on n’a même pas d’Etat ni d’autorités ? Il faut aussi permettre les réunions au-delà de 50 personnes en respectant les gestes barrières (Laver les mains, porter les masques ou cache nez…). Voilà donc des préalables qui sont liés à la question de l’ouverture des écoles.

La crise sanitaire selon certains observateurs semble malheureusement reléguer au second plan la crise sécuritaire que vit le pays depuis quelques années déjà ; quel est votre point de vue ?

Non. Ce sont les consommateurs de l’information publique qui considèrent que la crise sécuritaire est passée en seconde zone. Nous, nous entendons ce qui se passe dans le pays profond malgré les désinformations gouvernementales. La crise sécuritaire est bel et bien là et nous endeuille plus que la maladie à Covid-19 avec plus d’un million de déplacés internes, 20 provinces touchées, 19 communes sans maire. C’est le résultat d’un groupe d’étude sur le vote des déplacés internes en janvier 2020 composé de la CENI, le PNUD et l’Union Européenne.

Cette crise pourrait jouer sur le calendrier électoral; quelle analyse faites-vous sur cette situation ?

Le calendrier électoral ne saurait être ébranlé. C’est connu. Tous les spécialistes qui sont de bonne foi le savent et ne reviennent pas sur le sujet. Les élections se tiendront à bonne date, et nous avons ce juste devoir de respecter leur date de tenue. Ce qu’il faut retenir c’est que la pandémie du Covid-19 a perturbé et a ralenti le processus enclenché par la CENI mais cela peut se rattraper rapidement : En levant le couvre-feu et la quarantaine d’ici la fin de cette semaine, on permettra à la CENI de poursuivre l’enrôlement. On peut prendre des mesures pour rallonger la date des CNIB qui expirent en novembre 2020 estimés à plus de 2.000.000 personnes. Je dis bien plus de deux millions. On peut aussi prendre des dispositions nécessaires pour livrer dans la semaine qui suit, les 4000 kits commandés à l’opérateur Français afin que la CENI soit opérationnelle sur le terrain. Enfin, leur fameux comité de suivi de mise en œuvre des recommandations issues du dialogue politique doit revoir très rapidement le code électoral pour réduire la date de dépôt des candidatures à la présidentielle et aux législatives pour donner plus de temps à la CENI d’opérer son enrôlement. Vous comprenez donc qu’il n’y a pas d’inquiétude quant au calendrier électoral. Et en ce qui concerne la question sécuritaire, il suffit d’appliquer le scenari 2 du Rapport de janvier 2020 du groupe d’étude sur le vote des déplacés internes qui dit qu’on peut enrôler les déplacés dans leurs sites d’accueil et ils votent pour leur localité d’origine.

Votre estimez donc qu’avec juste des réajustements les élections peuvent se tenir à bonne date ? Une date c’est une date. Pourquoi pensez-vous qu’il peut en être autrement ?

La Constitution à son l’article 165 est claire et dit entre autres qu’aucun projet ou proposition de révision de la Constitution n’est recevable lorsqu’il remet en cause la durée du mandat présidentiel. Cet ajout a été opéré en novembre 2015 sous les commandes de mon ami Sy Cherif, Président du CNT d’alors. C’est donc vous dire que ceux qui rêvent d’un report de l’élection présidentielle et d’un gouvernement d’union nationale se trompent. Aucune disposition, ni le juge constitutionnel ou encore moins une loi d’habilitation ne peut remettre en cause cette disposition constitutionnelle et nous sommes fermes là-dessus.

De façon générale quel est votre point de vue sur la gouvernance actuelle ?

Si je vous dis que je suis déçu, rien ne vous étonnera. Pour moi, c’est le régime le plus incapable que notre pays a subi. Je dis bien « subi ». Parce-que nous avons connu des régimes incapables, mais le plus illustratif de l’incapacité est le régime du MPP. Je crois que j’aurai raison de le dire, de Orodara à Falangoutou. Rien qu’à regarder la gestion du Covid-19, c’est un exemple illustratif sinon ils auraient dû associer l’opposition politique, les OSC et les syndicats dans la gestion et le suivi et évaluation des mesures prises.

Il y a la question de la fronde sociale qui est toujours d’actualité; quelle est votre réaction sur cette situation qui perdure ?

Bassolma Bazié et ses camarades ont largement épilogué dessus. Je voudrais vous demander à vous journalistes, de considérer les justes causes, au lieu de nous renvoyer les mêmes questions à tout va. Nous avons besoin de votre vérité et votre justice pour avancer. Vous avez vu les actions, les marches et les revendications des syndicats. Tout le monde se sent concerné. Du moment que les revendications des syndicats sont légitimes, nous sommes de cœur avec eux et nous les soutenons. Malheureusement on ne sait pas pourquoi le gouvernement a pris de telles mesures inopportunes et impopulaires à cette période où notre pays est à la croisée des chemins et surtout dans une année électorale.

Je peux même dire qu’en partie, c’est à cause des syndicats que le gouvernement a peur de lever la quarantaine et le couvre-feu et on a beau déplacer ou retarder les choses, la vérité finira par voir le jour.

Vous êtes également sur le front de la réconciliation nationale ; où en êtes-vous avec cette question ?

La réconciliation est une action qui sauve un ménage, un foyer, une famille et une Nation. Quand la solidarité bat de l’aile, il faut travailler à la rasséréner. Ici, je crois que nos autorités ont échoué à nous ramener autour de l’arbre à palabres. Ils sont plus, à mon avis, incapables de la reconstruction de notre tissu social. Je crois qu’ils ne sont pas constitués pour construire. Je suis franchement désolé de le dire sinon notre pays avait besoin de se réconcilier et 90% de la population est de cet avis mais hélas, le pouvoir exécutif n’en a pas fait une priorité.
Commentaires