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Traitement du coronavirus « La solution viendra du Burkina », Dr Pascal Nadembèga, tradipraticien

Publié le mercredi 8 avril 2020  |  Sidwaya
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© Autre presse par DR
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Dr Pascal Nadembèga est spécialiste en pharmacognosie et en médecine traditionnelle. Dans cet entretien, il parle, entre autres, du savoir traditionnel et du rôle que les tradipraticiens peuvent jouer dans la lutte contre le coronavirus.

Sidwaya (S.): Comment se porte la médecine traditionnelle au Burkina?

Pascal Nadembèga (P.N.) : La médecine traditionnelle se porte bien, et mal. Bien, parce que du point de vue administration, il n’y a pas ce pays dans la sous-région qui est bien organisé au niveau de la médecine traditionnelle que le Burkina Faso. Nous avons les meilleurs textes. Nous avons encadré les tradipraticiens, c’est-à-dire, comment il doit être reconnu par le ministère de la Santé. Le tradipraticien a la possibilité d’ouvrir sa clinique, de valoriser ses médicaments. Il a la possibilité de faire l’interface, c’est-à-dire s’associer avec un clinicien moderne pour former un établissement de soins intégrés. Au niveau de la valorisation des médicaments, nous avons essayé avec l’OOAS qui avait proposé des textes pour approuver les médicaments, si la plante n’est pas toxique. Mal, parce que depuis la reconnaissance de la médecine traditionnelle, en 1994, nous trainons toujours, par manque de fonds d’appui. Les tradipraticiens ont leurs savoirs, mais ils n’ont pas les moyens de les valoriser. L’emballage pose problème, de même qu’écraser le produit. Les gélules, les flacons…pour les avoir, c’est tout un problème. Certains vont même jusqu’au Mali et au Ghana pour écraser leurs produits. Le gros problème, c’est l’appui financier. Nous sommes en train de lutter avec les ministères de la Santé et de l’Economie pour mettre en place un fonds d’appui à la médecine traditionnelle qui va permettre aux tradipraticiens de travailler et de pouvoir rembourser. La médecine traditionnelle va bien, seulement nous n’arrivons pas à valoriser les médicaments, comme il le faut.

S.: A ce jour, combien de produits de la pharmacopée sont autorisés sur le marché ?

P.N. : Il y a une cinquantaine de produits. Nous avons le FMG qui a été utilisé à Saint Camille pour soigner le VIH, le Faca contre la drépanocytose, le PAIHK contre les hépatites, Toussiol et Dalekonse contre la toux….Pour moi, ce n’est pas beaucoup. Depuis la reconnaissance de la médecine traditionnelle et la mise en place de la politique nationale en 2012, cela pouvait être plus. Mais le manque de moyens financiers constitue un frein. Si on nous donne les moyens, vous verrez des merveilles.

S. : L’on dit souvent que le Burkina dispose d’un trésor de médicaments naturels, méconnus des Burkinabè. Combien de maladies peut-on traiter à base de plantes naturelles ?

P.N. : Avec mon expérience, je peux dire qu’on peut soigner toutes les maladies. Dans ma pratique, il y a des choses que je vois et qui m’épatent. Un Français m’a appelé qu’il veut témoigner à la télé qu’il a été guéri du cancer de poumon, phase terminale au Burkina Faso. Il était malade et on l’a guidé vers une femme qui lui a donné un liquide. Il a bu pendant 3 mois, et il a été guéri. Il a refait ses examens, il n’avait plus rien. Il a tous ses examens, avant et après les traitements. Il y a un autre qui soigne le cancer de cerveau, du foie, la sinusite…avec d’autres maladies dont vous ne pouvez même pas croire.

S. : De nombreux Burkinabè semblent négliger la médecine traditionnelle. Comment peut-on expliquer cette situation ?

P.N. : C’est le contraire. Nous avons fait des enquêtes. Le 1er, 2e choix du patient burkinabè, c’est d’abord la médecine traditionnelle. C’est lorsqu’il ne trouve pas satisfaction, qu’il se dirige vers la médecine moderne.
Il peut aussi faire les deux traitements. Dans tous les marchés du pays, en ville comme en campagne, vous verrez des vendeurs de plantes traditionnelles. C’est parce qu’ils sont sollicités.
S. : Depuis quatre mois, le monde fait face à une épidémie notamment le coronavirus. En tant que spécialiste de la médecine traditionnelle, quel est votre commentaire ?

P.N. : L’homme a passé tout son temps à se détruire, à se tuer en inventant la bombe atomique, la bombe à neutrons, mais il n’a jamais pensé à se préserver en tant qu’espèce. Qu’est-ce que nous allons faire pour que l’Homme ne meurt pas, ne tombe jamais malade ? Les firmes pharmaceutiques, ce n’est pas leur problème, c’est gagner de l’argent qui les intéresse. Lorsque vous regardez au niveau des institutions et ministères, la santé, c’est l’enfant pauvre. On se dit que c’est budgétivore. L’on a oublié carrément, la recherche parce qu’on se dit qu’on a tout trouvé. L’Institut de recherche en sciences de la santé (IRSS) a très peu de fonds pour pouvoir fonctionner. Si tu as un sujet de recherche pertinent et tu n’as pas les fonds pour le réaliser, c’est peine perdue. En Europe, c’est pareil. La recherche, c’est la productrice de connaissances. Et les industriels achètent ces connaissances pour les mettre en valeur. Dans notre cas, ce sont les consommateurs qui exigent aux tradipraticiens d’innover.

S. : Des chercheurs burkinabè et béninois vont entamer des essais cliniques sur l’apivirine, un phytomédicament. Comment appréciez-vous cette initiative ?

P.N. : C’est bien. Toute piste de traitement est la bienvenue. L’apivirine, c’est un produit qui ne nous est pas étranger. Ceux qui étaient là, avant les années 2012, ont eu affaire à ce produit qu’on disait soigner le VIH/SIDA. Nous avons aussi connu également ses limites. Pour nous qui sommes pour la règlementation, en utilisant un produit pour soigner des malades, dans un lieu, il faut au moins informer les responsables. La recherche pouvait demander est-ce que vous connaissez ce produit ? Qu’est-ce que vous en pensez ? Et nous allons donner notre point de vue pour éviter les frustrations. On a envoyé un produit que nous connaissons déjà. Si vous voulez produire, vous mettez déjà notre système en danger. Vous êtes allés prendre un produit dans un autre pays et avez commencé à donner à nos patients, sans même poser la question si vous n’avez pas un produit de ce genre. On dit qu’il a fait ses preuves contre le VIH, nous avons des produits avec des dossiers solides qui ont fait leurs preuves à Saint Camille contre le VIH. Le FMG a fait l’objet d’une thèse. Et le médicament était produit par le ministère de la Santé et distribué à Saint Camille par un médecin qui a été détaché par le ministère pour s’occuper des malades du VIH. Nous avons des médicaments contre les hépatites, les herpès, ce sont des virus. On a même un produit sur la dengue qui a suscité la polémique : la Denkao.
Les gens prennent et cela fonctionne. Pourquoi, ne pas aller dans ce sens, parce la dengue et le coronavirus, c’est la même famille. Il y a des tradipraticiens qui ont eu des révélations que la plante qui soigne la dengue et l’envenimation des serpents peut soigner le coronavirus. Cette plante, si on la trouve, elle soignera le coronavirus.
Si nous faisons les croisements de ces plantes, nous allons trouver le remède. Même la chloroquine vient d’ailleurs. Si c’est la médecine traditionnelle, il n’y a pas mieux organisé que le Burkina. Nous sommes aguerris, et avons l’expérience.
Tous les jours, je reçois des appels me disant de leur donner des patients, qu’ils vont les soigner. Il y a une dame même qui a essayé de rencontrer le président et le Moogho Naaba en vain. Du cabinet du ministre, on l’a envoyé au Centre des opérations de réponses aux urgences sanitaires (CORUS), de là-bas, elle a été conduite ici. Si elle fait tout cela, c’est parce qu’elle tient à ce que cette maladie soit éradiquée. Elle ne vend pas des produits. Lorsque tu vas à une guerre, tu ne peux pas compter sur les voisins. Tu vas avec tes armes d’abord, sinon tu vas frustrer tes soldats.

S. : Combien d’échantillons de médicaments traditionnels aviez-vous déjà reçu des tradipraticiens burkinabè pour le traitement du COVID-19?
P.N. : Nous avons reçu plus de soixante échantillons de médicaments traditionnels. Il y a des gens qui continuent de nous appeler.

S. : Concrètement, tous ces produits seront utilisés dans la lutte ?

P.N. : Nous avons tenu une réunion avec le Haut conseil scientifique et l’IRSS pour qu’on essaie de s’organiser et voir comment nous allons les utiliser. Nous allons essayer de faire une étude ethno- médicale, c’est-à-dire voir qu’est-ce que chaque produit traite et noter cela sur une fiche technique avec le nom des plantes. La manière de préparer appartient au tradipraticien, c’est ce qu’il peut breveter. Donc, nous ne pouvons pas lui demander comment il l’a préparé. Lorsque nous allons vouloir le reproduire pour l’expérimenter, nous pouvons lui demander de le préparer ou lui faire signer un consentement pour pouvoir utiliser son produit. Nous allons faire une liste de l’ensemble de toutes ces données pour voir quelles sont les plantes qui se répètent et à quel objectif. Par exemple, le tamarinus est utilisé contre les problèmes respiratoires. Sur 100, 80 qui l’ont cité contre les problèmes respiratoires. Donc, on peut le retenir. La plupart des plantes ne sont pas complètes. Elles sont axées sur la toux et les troubles respiratoires, certaines aussi sont contre la tension et le diabète. Nous allons capitaliser pour faire une synthèse et voir les plantes qui sont antivirales, huminostimulantes, quels sont les spectorants qui mouillent au niveau des poumons pour dégager les voies. Nous allons voir au niveau de la littérature, ce qui est dit et faire une sélection et arriver à quelque chose qu’on pourra peut-être présenter. Nous allons les étudier cas par cas pour voir la toxicité. Les recettes que nous allons filtrer à la fin, seront utilisées pour faire des tests de toxicité aiguë rapides parce que l’épidémie presse. Il y a des patients qui ont utilisé des produits de tradipraticiens et qui en sont guéris. J’ai reçu des appels me disant j’ai pris tel produit de tel tradipraticien, je me sens très bien… Il faut que nous tenons compte de ces cas concrets. Si le patient accepte, il pourra nous dire lorsqu’il a pris le produit, comment il s’est senti. Qu’est- ce qui l’a soulagé ?

S. : Face à cette pandémie, pensez-vous que le salut du Burkina voire de l’Afrique viendra de la médecine traditionnelle ?

P.N. : La solution viendra du Burkina. Cette situation nous attriste et met tout le monde dans la détresse. Que tous les tradipraticiens se mobilisent pour vaincre cette maladie. On n’a même plus le temps, donnez-nous l’occasion de vaincre ce virus et vous verrez que les tradipraticiens feront des merveilles. J’en suis absolument convaincu. Notre science est très avancée, mais nous nous sous-estimons. Nous allons nous en sortir, faites confiance aux tradipraticiens et à notre science traditionnelle. Nous allons triompher.
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