Début d’année ensanglanté pour les habitants de la province du Sanmatenga dans le Nord du Burkina Faso. Ce Lundi 20 Janvier, 36 personnes, selon un bilan officiel, ont été tuées dans des assauts djihadistes menées respectivement dans le marché de Nagraogo et dans le village d’Alamou, toujours dans la même province. Ces nouvelles tueries qui dénotent d’un changement de stratégies des groupes islamistes, qui en plus des forces armées, s’attaquent de plus en plus aux populations civiles, trahissent certainement la fébrilité de l’infrastructure stratégique déployée par le Gouvernement Burkinabè pour assurer viablement la sécurité des populations, exposées aux assauts répétés des hordes terroristes. Certes, le sommet de Pau, tenu le 13 Janvier a un peu plus conforté le régime de Ouagadougou dans sa logique de bâtir l’essentiel de sa stratégie de défense autour de l’appui militaire et logistique de Barkhane, mais la nature du conflit en cours au Burkina Faso impose inexorablement une réorganisation globale de la lutte anti-terroriste.
Rien qu’en 2019, au moins 4000 personnes ont perdu la vie dans des attaques terroristes dans le Sahel, d’après des chiffres établis par les Nations Unies. Au Burkina Faso, les différentes mesures prises par le Gouvernement depuis 2016 n’ont eu un impact que dérisoire sur la volonté des autorités d’améliorer le niveau de protection des populations. Toujours selon l’ONU, le nombre de victimes recensés au Burkina Faso, à la date du 08 Janvier 2020 s’élevait à 1800 morts. Un bilan suffisamment alarmant, à l’évidence, mais qui n’est pas prêt de s’estomper au vu de la mobilité croissante des bandes armées.
Au-delà de la participation militaire Française aux opérations de combats et de renseignements visant à déstructurer les groupes djihadistes, le pouvoir Burkinabè devrait miser davantage sur une maîtrise des filières de renseignements de sorte à étoffer les lignes de défense autour des populations civiles. Il est de notoriété dans une guerre asymétrique d’une telle ampleur que sans une politique de renseignement efficace en amont, le conflit gagne en longévité. La grosse faille dans le système de défense et de sécurité des autorités Burkinabè, réside inéluctablement dans la carence observée au niveau des renseignements. Or, dans le contexte politique actuel, les chances du pouvoir de parvenir à un resserrement des lignes autour des réseaux terroristes, visiblement mieux organisés, sont quasiment biaisées. Le pays reste miné par les divisions internes qui fragilisent la dynamique d’unité nationale en cette période de guerre. L’instrumentalisation de la justice au profit des intérêts revanchards des dirigeants actuels, dessert absolument la lutte anti-djihadiste. Des figures de proue de l’ancien régime avec à leur tête le Président COMPAORE lui-même, sont toujours condamnés à l’exil. Poursuites judiciaires, condamnations par contumace, menaces de répression…tout un arsenal de dissuasion politique dont se sert le régime pour neutraliser au mieux une opposition susceptible de changer la donne sur le plan politique. D’autres, parmi les ‘’sécurocrates’’ de l’ancien régime ont été incarcérés au terme d’un procès sujet à toutes les controverses. Les conditions de l’unité nationale restent durablement compromises par la ligne politique du pouvoir en place. Et les conséquences sur le climat sécuritaire sont imparables.
Face au drame que vivent les populations dans les régions de présence des groupuscules djihadistes, l’urgence du moment est assurément la réconciliation, cet impératif incontournable pour créer cette convergence d’intelligences, dont l’impact pourrait rapidement se faire sentir au sein même des différentes couches socio-ethniques et dans les casernes.