Les membres du Comité de suivi des réformes politiques consensuelles ont animé une conférence de presse, le 7 septembre 2013 à Ouagadougou pour expliquer leurs recommandations contenues dans le rapport d’étape circonstancié sur l’opérationnalisation du Sénat, remis au chef de l’Etat burkinabè, le 30 août 2013.
« Il n’y a pas eu de voix discordante pendant les travaux du comité de suivi des réformes politiques à la demande du président du Faso. C’est de façon consensuelle que les différentes composantes du comité ont adopté les différentes recommandations consignées dans le rapport circonstancié ». C’est ce qui ressort de la conférence de presse animée par les membres dudit comité, le 7 septembre 2013, à Ouagadougou. Et à cette occasion, c’est en tant que membre du gouvernement qu’Arsène Bongnessan Yé, bien que président du comité de suivi de la mise en œuvre des réformes politiques consensuelles, s’est exprimé sur le sujet.
Les questions des journalistes trouveront, dans le principe, selon lui, des réponses avec les membres de comité de suivi, co-animateurs de la conférence, que sont Amadou Dabo de l’opposition, non affiliée au chef de file de l’opposition, Marc Somda, représentant les communautés religieuses, Sébastien Ouédraogo de la majorité et Bonaventure Ouédraogo agissant au nom de la chefferie traditionnelle. Mais cela n’est qu’en théorie. Car, dans les faits, le ministre Yé n’a pu s’empêcher de répondre à bon nombre de questions.
Mais, dès l’entame des échanges, il a d’abord déploré le fait que certains médias aient publié un « faux » rapport, soit trois jours après sa remise officielle au chef de l’Etat et salué le professionnalisme des autres tels que les Editions Sidwaya qui sont allés à la source pour obtenir « le vrai » document. Point par point, Arsène Bongnessan Yé est revenu sur les différents griefs faits à la future deuxième Chambre et les propositions d’amélioration faites par le comité de suivi. Selon lui, c’est dans le souci de réduire le coût du Sénat, jugé budgétivore, par une composante de la population, que le Comité a proposé 71 sénateurs contre 89 comme initialement prévus. Ainsi, il a fait savoir que le nombre de sénateurs par région proposé par le comité est de 2 personnes. Et comme pour faire taire les récriminations sur le coût de cette nouvelle institution, il a affirmé qu’« il n’y pas l’argent qui est posé quelque part. Ce n’est qu’une simple inscription budgétaire faite dans le budget de 2013 ». Le quota des sénateurs à nommer par le chef de l’Etat doit être revu à la baisse, selon les « experts » du comité de suivi.
Le Sénat n’a pas pour objet de modifier l’article 37 de la Constitution
Le Sénat, dans sa nouvelle version, va prendre en compte la frange jeune. Désormais, l’âge-plancher requis est de 30 ou 35 ans pour être éligible, parce que, selon Sébastien Oudraogo de la majorité, il y a un décret qui indique que : « est jeune, tout Burkinabè qui n’a pas encore 35 ans révolus ». Le ministre Yé, en outre, a justifié cette nouvelle proposition par le fait que plus de 80% de la population burkinabè a moins de 40 ans.
L’aspect monocolore désapprouvé par les acteurs politiques et de la société civile n’a pas été ignoré. Selon Arsène Bongnessan Yé, tout citoyen ayant un intérêt politique ou social peut être candidat sur la liste régionale, à condition d’être proposé par un parti politique. Pour prévenir les éventuels désaccords entre l’Assemblée nationale et le Sénat, le comité a également proposé la création et la constitutionnalisation d’un comité mixte paritaire composé des représentants des deux Chambres dont le rôle sera de discuter des points de divergence. En cas de désaccord dans ce comité, la loi sera renvoyée à son initiateur.La deuxième alternative envisagée par le comité consiste en l’institutionnalisation d’une disposition transitoire qui donnerait la prépondérance à une des Chambres en cas de désaccord. Le ministre Yé a aussi expliqué que les prémices de prises de mesures sociales contre la vie chère annoncées par le gouvernement lors du conseil des ministres le 4 septembre 2013 sont la conséquence directe des travaux du Comité de suivi. Toutes ces recommandations requièrent, selon lui, une révision de la Constitution et de la loi organique sur le Sénat avant d’ajouter que ce dernier n’a pas « pour objet de modifier l’article 37 de la constitution ». En entendant, le conseil constitutionnel sera saisi pour statuer sur la validité des lois qu’adoptera l’Assemblée nationale, a-t-il laissé entendre. Les membres du comité ont également souhaité la mise en place d’un conseil national de sages tels que recommandé par le conseil consultatif sur les réformes politiques, l’opérationnalisation de l’observatoire national de gestion des conflits et du cadre de concertation entre opposition et majorité.
« Il n’y a pas de soupe ici »
« Pourquoi envisager le dialogue après les travaux du comité ? », a lancé un journaliste. « L’offre du gouvernement a été refusé par l’opposition », a dit Amadou Dabo. « Il n’est jamais trop tard pour discuter. Ce dialogue est indispensable pour permettre de maintenir la cohésion sociale », a renchéri le représentant des communautés religieuses, Marc Somda. « Quel est le sort qui sera réservé aux sénateurs déjà élus ? » « C’est une question délicate. On n’a rien décidé. Franchement, je ne peux pas vous répondre. Il y a même des sénateurs dans la salle », a affirmé Arsène Bongnessan Yé.
Néanmoins, il a indiqué que cette question appartient au destinataire du rapport circonstancié. Et que dire de l’Eglise catholique qui avait fait de nombreux reproches à l’endroit de la haute Chambre ? « L’Eglise catholique, dit Marc Somda, n’est pas contre le principe de la création du Sénat. Dire qu’elle est satisfaite, seules des voix plus autorisées pourront vous donner leurs avis. En tous les cas, la plupart des propositions de l’Eglise catholique ont été prises en compte ».
Quant à l’Alliance pour la démocratie et la fédération/Rassemblement démocratique africain (ADF/RDA) qui avait boudé la mise en place du Sénat après lui avoir accordé sa caution pendant le CCRP, elle a estimé, à travers son représentant, Mathieu Hien, que ses préoccupations ont été prises en compte. Il s’agit notamment de la réduction du nombre de sénateurs, la prise en compte des jeunes et des femmes dans la future institution, l’élargissement du Sénat aux autres couches socioprofessionnelles et politiques et la prise de mesures sociales « fortes » dans la lutte contre la vie chère. « L’ADF/RDA est-elle ainsi de retour à la soupe » ? a lancé un journaliste. Et M. Hien de répondre : « Non. Il n’y a pas de soupe à boire ici. Nous voulons la paix pour notre pays. Nous voulons la cohésion sociale pour notre pays. Nous voulons l’approfondissement de la démocratie pour le bonheur du peuple burkinabè ».