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L’opportun renvoi en début d’année 2020 de la « citation » de Pau

Publié le lundi 16 decembre 2019  |  NetAfrique.Net
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© Autre presse par DR
Le président du Faso, Roch Marc Christian Kaboré a eu une séance de travail avec son homologue français Emmanuel Macron, en marge de la sixième conférence de reconstitution du Fonds mondial.
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Le ton comminatoire avec lequel les cinq chefs d’Etat du Burkina, du Mali, de la Mauritanie du Niger et du Tchad ont été appelé à comparaître à Pau le 16 Décembre 2019 devant Le President Macron, pour « clarification de position au sujet de la présence de l’armée française dans leurs pays », a soulevé une telle indignation dans les pays concernés, en Afrique et dans le monde, que le grand malheur qui vient de s’abattre sur le Niger ( avec ces 71 morts suite à une attaque terroriste ), apparait comme une occasion opportune de report de la dite rencontre.

Un ajournement qui profite aux convoqués, obligés au devoir de solidarité et qui se voient ainsi offrir l’occasion de ce minimum de concertation préalable le 15 décembre à Niamey, à laquelle comme d’autres j’en appelais avant le jour de l’assignation.

Le président Macron également, pourra se dire: « à quelque chose malheur est bon », car alors que sous le poids des critiques il s’activait à donner une meilleure forme à sa convocation, cette hécatombe lui aura donné le prétexte de jouer sinon au grand seigneur du moins au grand compatissant, en décidant d’autorité du renvoi de la sommation en début 2020 sans date fixe. Signe manifeste de flexibilité.
Cela permettra aux premiers de mieux affuter leurs armes pour éviter les contrecoups nationaux de trop de timidités et de soumissions, et au président français de consulter plus large ( profitant notamment de sa visite en CI les 20/21 décembre ), pour mieux arrondir les angles.

Ceci dit, ma position par rapport à la riche controverse qui entoure cette désormais historique convocation, est dictée par deux considérations.
L’une a trait à l’adhésion au mouvement général de désapprobation de la convocation dans la forme et l’autre à mes réserves au sujet de la nature des conclusions à en tirer.

I) Il y’a d’abord ma totale solidarité avec la majorité des africains tant au sujet de la tonalité que de la procédure de convocation des plus insultantes, pour la dignité des chefs d’Etat et surtout des peuples qu’ils représentent.

En agissant ainsi, Macron ne pouvait pas mieux reconnaitre les réalités intangibles de la france-afrique et le peu de considération qu’il a pour les chefs d’Etat qu’il semblerait tenir en laisse. Cela aucun Africain ayant un minimum de fierté ne peut l’accepter. On comprend le juste courroux qui monte dans le continent entier et au-delà ( comme au temps de la méprisante déclaration de Sarkozy selon laquelle l’Afrique était insuffisamment entrée dans l’histoire ), sur la France et plus précisément sur son président.
Si la polémique en vient à se polariser sur des questions de plénitude de souveraineté de nos Etats et partant de la non inféodation de nos armées par des puissances étrangères, ma vision des choses à cet égard tient à plusieurs aulnes: d’abord à un héritage environnemental et historique ( celui des conditions d’accession à l’indépendance de la Haute Volta, marquées par le refus catégorique du président Maurice Yameogo de grever cette indépendance d’une hypothèque portant sur le maintien de bases étrangères sur le sol national ),

ensuite à des constats : l’utilisation fréquente des bases militaires étrangères pour influer sur les gouvernances et pour faire et défaire les Gouvernements ,
enfin à une réalité montante : le fait que la jauge véritable de la souveraineté et de l’indépendance se trouve dans la capacité des Etats à satisfaire leurs multiples obligations économiques, sociales politiques et par dessus tout sécuritaires à l’égard du peuple .

Cette position repose sur les considérations personnelles et objectives relevées, tout en étant indexée sur le phénomène de mondialisation et d’internationalisation des relations humaines dont la conséquence est notamment une relativisation croissante, des concepts d’indépendance et de souveraineté.

II) Il y’a ensuite ma différence au sujet de la gestion de cet impair.

-Premièrement je me désengage des réactions à fleur de peau, sans considération des données réelles de la situation et des possibilités de prise en charge des conséquences de la rupture qu’invoquent à tue tête certains offensés et advienne que pourra !
Nous n’avons en national ni la cohésion sociale ni celle des FDS et encore moins les capacités militaires et financières de cette guerre.

Même dans l’espace régionale et africain cela nous fait défaut, ce qui justifie la présence de tant de forces militaires représentants des pays ou des organisations internationales, et les appels sans fin à l’aide bilatérale et multilatérale pour les besoins de la cause.
Le brusque départ de l’armée Française sans solutions alternatives créerait un vide sidéral ( national et régional ), qui aggraverait le chaos ambiant, encouragerait comme en Somalie la montée des armées privées et partant la parfaite vassalisation, de nos Etats.
La France a certes une part de responsabilité historique et actuelle dans la situation que nous vivons, mais nous devons également reconnaitre la part de responsabilité qui nous revient.
Pour la bonne défense d’une cause, il faut toujours chercher à en connaitre toutes les facettes, et voir si elle ne porte pas en elle même des responsabilités à partager. C’est le cas ici.
Pourquoi en effet les Etats Africains Anglophones, Arabophones, lusophones et hispanophones ne vivent pas le même problème ?

D’abord parce qu’ils n’ont pas accepté des processus de décolonisations piégés par la reconduction de la présence de bases militaires et ensuite parce que les dirigeants en difficultés n’ont pas fait appel aux anciennes puissances pour leur protection.
Combien de fois le président Deby n’a-t-il pas été sauvé in extremis par la France, de colonnes en marche sur Djamena pour le déboulonner ? La gouvernance du Mali n’aurait-elle pas à une certaine époque, de l’avis même des maliens, basculé dans le versant djihadiste sans l’intervention de la France pour éviter l’imminente prise de Bamako ? Peut-on nier l’implication au Burkina Faso de la France dans l’insurrection/ coup d’Etat et ses suites ?
Finalement les Etats du Sahel anciennement colonisés par la France, n’ont que la rançon ( du reste partagée par tous les Etats Africains ), de leur légendaire phobie unitaire.

S’ils étaient reconstitués en régions politiques, en confédération avec des transferts supra-nationaux particuliers de compétences en matière militaire, ou s’ils s’étaient tant qu’à faire érigés en Etats fédérées dans une construction fédérale africaine, ils ne vivraient pas cette perpétuelle déconsidération et un tel processus de faillite.
Ce qui advient de nos jours, n’est donc qu’une conséquence logique de ce refus et de cette coupable incapacité viscérale à réaliser l’union de l’Afrique, pour faire front à nos destructeurs.
Voilà qui fonde le partage de responsabilité.

Si au moins l’intimation de Pau pouvait avoir l’effet d’un électrochoc sur les Etats Africains et les déterminer enfin à l’union, et si la longue liste des morts ( dont les derniers enregistrés au Niger ), pouvait agir de même, cela donnerait beaucoup de panache à un éventuel congédiement en terre hexagonale des bases françaises et le voyage de Pau, dans l’histoire, revêtirait alors un tout autre symbole.

Pour avoir voulu jouer la présence de l’armée française à la dégonfle avec les cinq chefs d’Etat, le Président Macron se ferait proprement moucher, son acte de défi et d’impertinence se retournant contre lui.
Mais il faut craindre qu’il n’y ait loin de la coupe aux lèvres car nous
risquons au final de n’avoir poussé que nos habituels cris d’orfraies, nous offrant en spectacle avec des « démonstrations poitrinaires », mettant en scène des fanfaronnades appelant à la rupture, sans moyens, sans stratégies, sans union conséquentes.

-Deuxièmement je n’adhère pas à cette cristallisation autour de la souveraineté et de l’ indépendance sans partage.
En effet alors qu’en plus du devoir d’union, nous vivons la crise internationale de l’Etat-nation et que nous sentons de jour en jour son impuissance à inverser le cours fatal des atteintes à la nature, nous en sommes encore à bâtir des châteaux sur ces concepts.
L’Etat n’a plus d’avenir dans le repliement sur lui même. Il doit se redéployer dans d’autres espaces et avec d’autres ambitions.

Ce besoin se manifeste comme un appel d’air à tous les niveaux et surtout, sécuritaire. Ça peut heurter des convictions, mais je tiens le mouvement pour irréversible, si tant est que nous voulons la sauvegarde de l’Afrique et le réveil, pour la survie de l’humanité.
Certains et mêmes des scientifiques renommés en sont d’ores et déjà à alimenter la théorie de l’effondrement ou la « collapsologie »,

pour démontrer la réalité du stade terminal du péril écologique. Je veux espérer que le génie humain qui à enfanté ce cauchemar peut encore nous en délivrer.
C’est pourquoi j’en arrive à prendre avec des pincettes, cette tendance à la surévaluation des concepts de souveraineté et d’indépendance et que je préconiserai plus selon la théorie des avantages comparatifs la construction à forme concentrique et non exclusive de la sécurité.
Qu’est-ce à dire ?

Encore une fois sans la construction institutionnelle du monde pour notamment gérer les questions environnementales et sécuritaires, ces dernières auront dramatiquement raison de nos Etats-nations faillis ou en voies de l’être. Elles viendront même à bout des plus puissants en les poussant à la confrontation atomique, face aux contraintes de la dévastation des ressources vitales à l’humanité.
La sagesse commanderait une organisation administrative du monde avec une gestion de la sécurité à forme coaxiale .
La première strate purement nationale se résumerait au renforcement en national des capacités des FDS pour veiller sur les questions de sécurité locale.
La seconde strate au niveau régional, comporterait des éléments plus ou moins intégrés , et se chargerait de la sécurité régionale.
La troisième à la mesure continentale et composée des membres de l’union Africaine, serait chargée de la sécurité à ce niveau.
Les forces onusiennes restant investies de la sécurité au plan mondial.
Se battre dans ces conditions de crise irréversible de l’Etat-nation, pour une souveraineté et une indépendance absolues et au surplus dans la désunion nationale, régionale et africaine me semble comme mener un combat d’arrière garde.

Ce n’est pas non plus en jouant de menaces et de surenchères entre les grandes puissances comme au temps de la guerre froide, que nous aurons de meilleures attelles pour notre sécurité.
Il n’est pas certain, alors que l’organisation bipolaire du monde est morte, que nous filions, plutôt qu’avec la France, le parfait amour avec la Russie, la Chine, l’Inde, la Turquie ou le Pakistan. Comme j’aime à le dire paraphrasant, Shakespeare « les relations internationales ne sont pas faites du lait de la tendresse humaine ».
Le sursaut collectif organisé en forme pyramidale serait la voie la plus indiquée pour assurer notre sécurité et pour échapper au mépris récurrent de nombre de puissances. Il démontrerait de surcroît à ces dernières qui s’en lèchent déjà les babines, que la curée de l’Afrique n’aura pas lieu, qu’elle ne sera pas cette dépouille sur laquelle ils s’abattront un jour comme des oiseaux de proie.
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