Dans la nuit du 22 au 23 août 2019, les riverains du Camp Guillaume Ouédraogo ont connu des frayeurs. Et pour cause. Des coups de feu ont été entendus dans cette caserne. Selon les autorités, il ne s’agit ni plus ni moins que d’un acte lié à l’émotion et à la colère de certains éléments de cette unité militaire et cela suite au massacre dont leurs frères d’armes ont été victimes le 19 août dernier à Koutougou, localité située dans la province du Soum.
L’émotion est le propre des humains. Or, les militaires sont avant tout des humains. De ce point de vue, l’on peut comprendre que sous le coup de l’émotion, ils soient arrivés à manifester leur mécontentement par les moyens dont ils disposent. L’on peut prendre le risque de comprendre leur colère. Car la colère est un sentiment humain. Et ces deux sentiments ont été ressentis par tous les Burkinabè qui aiment véritablement leur pays. Cela dit, ce mouvement d’humeur, pour ne pas l’appeler mutinerie, car c’est le terme qui sied le plus, est à décrypter avec lucidité et responsabilité par les plus hautes autorités du pays.
En effet, il pourrait être le signe d’un véritable malaise qui est rampant au sein de nos forces armées. En 2011, l’on a assisté au même phénomène sous Blaise Compaoré. A l’occasion, les langues se sont déliées et l’opinion a su que la Grande muette, notamment les soldats du rang, en avaient gros sur le cœur pour l’ensemble des frustrations et injustices dont ils étaient victimes. Peut-être que cette fois-ci encore, ils pourraient avoir quelque chose à reprocher à la hiérarchie par rapport à la gestion de la question terroriste. Il faut donc les écouter de manière à maintenir la sérénité et la cohésion au sein de l’institution militaire.
En tout cas, l’heure n’est pas favorable pour faire douter l’armée de sa capacité à défendre l’intégrité du pays. L’on sait qu’elle se bat comme elle peut pour assurer cette mission. Et sur le terrain, elle a posé déjà des actes héroïques et patriotiques allant dans ce sens. Il faut donc l’encourager à mieux faire. Il faut aussi l’encourager à ne pas s’inscrire dans des actions qui pourraient faire l’affaire des terroristes qui nous attaquent.
Il ne faut pas en rajouter à la psychose ambiante
Car ces derniers nourrissent le secret espoir d’œuvrer au divorce de l’armée du corps social et politique. Et une armée qui adopte cette posture a toutes les chances d’être mise au ban de la communauté internationale. Nous l’avons vu au Mali avec le Général Sanogo. En effet, quand celui-ci s’est imposé à la tête de l’Etat malien au prétexte que l’Etat ne faisait pas assez pour l’armée, l’on a vu ce que la suite a donné.
La chienlit s’est davantage installée au sein de la Grande muette, ouvrant de ce fait un boulevard aux terroristes. Aujourd’hui, tout le monde sait que le Burkina vit des heures très difficiles. Les populations, de ce fait, vivent avec la peur au ventre. Il ne faut pas en rajouter à la psychose ambiante et généralisée par des actes qui pourront se retourner contre la Nation. Car, c’est tout ce que les terroristes poursuivent comme objectif opérationnel à atteindre. Et le meilleur moyen d’y parvenir, c’est de monter les Burkinabè les uns contre les autres. Les conflits intercommunautaires qu’ils ont suscités, répondent à cette logique.
C’est pourquoi les Burkinabè doivent à tout prix éviter d’ouvrir des brèches dans l’édifice national. Et pour cela, ils doivent s’inspirer de la sagesse de chez nous qui dit ceci : « Quand la pluie vous bat, il ne faut pas en rajouter en vous battant ». En tout cas, c’est tout le mal que l’on souhaite au pays en ces moments difficiles et de grands questionnements liés à l’existence même du Burkina.