Depuis une dizaine d’années, se dressent, de part et d’autre de la route nationale n°2 (RN2), des Azadirachta-indica, communément appelés neem ou encore neemiers. L’initiative est de l’association "Etre comme les autres" (ECLA) qui en a fait son cheval de bataille, entre autres activités. Zoom sur une action humaine qui contribue à la l’amélioration des conditions de vie et à la lutte contre la désertification dans la région du Nord.
Les voyageurs ayant déjà emprunté la route nationale n°2 (RN2-Ouagadougou-Ouahigouya) ont sans doute remarqué, ces plants d’Azadirachta-indica, arbres communément connus sous l’appellation de neem ou neemier, aux abords de la voie. En effet, sur une distance d’environ 75 kilomètres, précisément entre Yako et Ouahigouya, ces arbres se dressent de part et d’autres de la route bitumée.
Il s’agit, selon des spécialistes, d’une action de sauvegarde de l’environnement, répondant à une réalité écologique de la région du Nord. De leur avis, l’espèce s’y adapte et contribue à la reforestation assistée afin de lutter contre les effets néfastes des changements climatiques. Ouahigouya, Bilinga, Bougnaam, Zindiguéssé, Rom, Gourcy, Niésséga, Kizambo, Petit Samba, Godin (Yako) sont, entre autres, les villes et villages situés en bordure de la RN2 qui bénéficient des retombées de cette plantation.
Les neem sont utiles à divers niveaux.Du bois de l’arbre aux feuiles en passant par les graines, tout est utile à l’homme. A cela s’ajoute l’ombre que espèce procure. Et ce ne sont pas les habitants des localités citées plus haut qui diront le contraire. Elles qui mènent des activités génératrices de revenus à travers des ressources extraites de ces essences. Mais qui a planté ces arbres le long de la voie ? Est-on tenté de se demander. Après renseignements, il ressort que les neemiers en bordure de la RN2, sur le tronçon Yako-Ouahigouya, sont une initiative de l’association « Etre comme les autres » (ECLA).
Des informations émanant d’anciens de la localité indiquent que « jadis dans le Yatenga, la végétation était dense. Plusieurs espèces d’arbres composaient la flore qui regorgeait de beaucoup de gibiers avec, en bonus, des pluies abondantes et régulières ». Ces « vieux » regrettent que de nos jours, cette végétation ainsi que les avantages y afférents aient disparu ou presque. A l’origine de cette dégradation, l’action de l’homme et des changements climatiques.
De l’avis de techniciens de l’environnement de la région du Nord, des raisons majeures ont conduit à l’initiation du projet de plantation des neem. Selon eux, « il s’agit d’une action environnementale d’envergure qui a mobilisé et impliqué effectivement des populations qui ont compris, déjà en son temps, que leur contrée se trouve à la lisière du désert et confrontée à des sécheresses récurrentes, conséquence de la rareté des pluies ».
Une opération à pérenniser
Vu que le désert avance et que les changements climatiques sont des réalités auxquelles il va falloir faire face, l’association ECLA, sous la houlette de Moussa Bologo, son fondateur, s’est donné pour mission à l’époque (en 2001) d’inverser la situation en procédant à cette plantation d’alignement de neemiers. Pour ce faire, raconte-t-on, les membres et responsables de l’association, dans une synergie d’actions, ont mobilisé, pendant les trois premières années, les hommes et les ressources pour amorcer le combat. Au total, environ 35 000 arbres auraient été plantés, protégés et entretenus par les comités villageois en bordure de la RN2 et dans 27 villages.
Les populations s’étant rendu compte des multiples vertus du neem et surtout à travers les sensibilisations autour de la problématique du reboisement qui ont été faites, se sont mobilisées. La Directrice régionale de l’Environnement et Développement durable du Nord, Mariam Douamba, apprécie de façon positive cette action environnementale d’envergure de l’association ECLA qui, selon elle, accompagne les efforts du gouvernement dans son combat permanent contre la désertification au Burkina Faso. « J’invite tous les acteurs et partenaires qui œuvrent dans le domaine de l’environnement, plus précisément dans le cadre du reboisement, à planter utile en s’appropriant l’approche de ECLA qui a permis d’avoir des résultats tangibles aujourd’hui », a laissé entendre la première responsable régionale de l’environnement, en cette période de reboisement tous azimuts.
Mariam Douamba et ses collègues en charge de l’environnement ne sont pas les seuls à saluer l’initiative de plantation de neemiers en bordure de la route internationale. Certains usagers estiment que la plantation de ces arbres, le long du tronçon, constitue un rempart naturel car elle délimite la voie et les guide par conséquent.
Pour les populations des différents villages bénéficiaires, les qualificatifs ne manquent pas pour louer les bienfaits des neemiers. Rien qu’au cours du mois dernier (juillet 2013), l’émondage des arbres plantés leur a permis d’acquérir gracieusement du bois de chauffe et des chevrons pour la confection des hangars. Les agents de l’environnement ayant supervisé cette taille (qui s’opère tous les trois ans), estiment à des milliers de stères de bois dont la valeur financière est évaluée à des millions de Francs CFA.
Il ressort que le stère qui correspond au volume de la coupe d’un seul arbre du neem coûte environ 20 000 FCFA sur la place du marché de bois. Au regard de ces retombées concrètes dont elles bénéficient, les populations laissent entendre que pour peu qu’un accompagnement leur soit offert, elles sont prêtes à s’impliquer afin de lutter contre les effets néfastes des changements climatiques dans la région du Nord, à travers la plantation des neemiers.
