On le sentait venir depuis la crise de 1999 – 2001. Il pousse des tentacules dans la controverse actuelle sur la mise en place ou l’abandon du Sénat au Burkina. Visitez les réseaux sociaux et vous aurez un hoquet de tristesse sinon de dégoût, asphyxié par les effluves nauséabondes de ce quelque chose de pourri dans la démocratie burkinabè : la caricature de la différence d’opinion.
Dans le cas d’espèce, toute idée, tout argumentaire qui justifie la mise en place d’une deuxième Chambre du parlement au Burkina est ravalé avec forte dose de railleries et d’injures au pet, au vomi d’un prédateur de la démocratie, de la République, de l’Etat. « Tous contre le Sénat… tous pour le Blaise dégage ».
Voilà, le slogan favori, l’unique slogan, devrions- nous dire, que des Burkinabè voudraient imposer, urbi et orbi, dans ce débat sur le Sénat et l’article 37. Ce n’est pas de bonne guerre. C’est d’une piteuse petitesse d’esprit de penser que ceux qui ne sont pas contre la création du Sénat, n’ont ni cerveau, ni coeur, mais seulement une panse et un anus.
L’argent, les intérêts matériels quelconques, n’en déplaise à certains Burkinabè –pessimistes, n’expliquent pas que le Sénat ait des partisans aujourd’hui et demain.
Des hommes de conviction, mus par des idéaux, des engagements citoyens et des amitiés politiques sincères, ils en existent encore au Burkina.
Non ! L’argent à lui seul ne pourra jamais faire gagner une élection ni faire aboutir une réforme, encore moins bâtir un charisme et un leadership politique. Il peut y contribuer comme un instrument nécessaire mais jamais suffisant.
C’est pourquoi les ironies malveillantes du genre, « on vous a payé pour voter, marcher, écrire ci où ça » sont une violence contre la liberté de conscience, une agression psychologique, avatar de l’intolérance délétère qui couvent dans la controverse actuellement sur le Sénat et la révision de l’article 37.
Ci-gît, en immondice puant, le paradoxe d’une démocratie qui vieillit sans se bonifier en matière d’acceptation de la différence et où la liberté d’expression concourt à la réduire insidieusement à la liberté pour les uns de ravaler les autres à de la merde, un point c’est tout. C’est là un verre dans le fruit de la démocratie.
Comment l’y extraire avant que sa toxine corrosive de la tolérance, n’érigent des barbelés ni ne creusent des tranchées de haine tenace entre Burkinabè ? Les Burkinabè, en commençant par les leaders des partis politiques, devraient policer leurs discours. Dans ce plus recherché pour la République, tout leader d’opinion est interpelé.
Chacun peut et doit apporter sa pierre dans la construction de cet idéal citoyen de l’acceptation de la différence. On peut dénoncer sans injurier, refuser sans violenter, manifester sans casser, s’opposer sans haïr.
Ce gentleman, agreement dans le débat politique est une gageure pour les jeunes démocraties, encore plus pour la IVe République, héritière d’une longue période d’exception où l’adversaire politique était un ennemi de classe à réduire au silence, au propre comme au figuré. Pour rester sur la question d’actualité du Sénat quand vous attendez certains dire, « on ne veut pas du Sénat », ne leur demandez pas, mais pourquoi ?
Leur religion est faite sur « l’engeance » vautrée dans la pourriture d’un régime qui ne reforme que pour mieux s’incruster. Ne parler pas de dispositions constitutionnelles à respecter, de blocage institutionnel à éviter, ni même d’un compromis républicain entre les protagonistes de la crise.
Tout cela pour eux, ce sont des Blablabla ! Vous n’êtes qu’un asticot qui se nourrit de charogne ou tout au plus, un de ses vauriens cupides qui ne savent rien faire d’autres que vendre leurs âmes dans un pacte avec le diable du pouvoir.
Le pire, c’est que ce ne sont pas les plus incultes qui parlent ainsi, même des intellos baignent dans cette boue caustique. Dans cet épais nuage d’irrédentisme et sans présager de ce que va accoucher le conclave du comité de suivi de la mise en œuvre des réformes, réuni depuis ce 16 août, un éclairci en début de semaine : l’analyse du président de l’UNDD, Maître Hermann Yaméogo.
Sa déclaration n’est pas seulement une position médiane entre les irréductibles pro et ou anti-sénat, c’est une réflexion politique et juridique proactive à même d’inspirer le comité de suivi commis à la tâche de produire un rapport d’étape sur l’opérationnalisation du Sénat.
De fait, les propositions d’Hermann Yaméogo, même si on ne les partage pas entièrement, ont le mérite d’exister et d’apporter des esquisses de réponses à certaines questions qui taraudent actuellement les esprits des Burkinabè : supprimer le Sénat oui, mais comment ?
Revoir sa composition et sa mise en œuvre, mais de quelle manière ? Décrisper la situation nationale, en quoi faisant ? Toute chose qui nous éloigne de ce quelque chose de pourri dans la démocratie burkinabè : les velléités d’installer la pensée unique.