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L’Observateur Paalga N° 8442 du 23/8/2013

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Sénat : le point de vue du général Garango
Publié le samedi 24 aout 2013   |  L’Observateur Paalga


Le
© Autre presse par DR
Le Général Tiémoko Marc Garango, Premier médiateur du Faso


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La question du Sénat a été relancée de plus belle depuis la publication du communiqué émanant de la Présidence du Faso et convoquant le comité de suivi du CCRP à ce sujet. Si de par son étymologie l'expression "sénat" renvoie à "vieux", nous avons voulu savoir le point de vue d'un senior, en l'occurrence le général Tiémoko Marc Garango, ancien ministre des Finances et du Commerce de 1966 à 1976 et premier Médiateur du Faso.


Mon Général, vous étiez en charge de la gestion des affaires de la Haute-Volta en tant que ministre des Finances et du Commerce de 1966 à 1976. Que pensez-vous de la situation conflictuelle qui prévaut actuellement au sujet du Sénat ?

• Avant de connaître mon point de vue sur cette situation, je vous invite à nous retourner vers le passé quand j'étais aux affaires en tant que ministre des Finances et du Commerce et en tant que principal concepteur de la constitution de la IIe République de Haute-Volta du 29 juin 1970. Dans ce contexte, ma conduite a été guidée par deux principes qui sont les suivants :

- la bonne gouvernance exige de se référer au passé pour évaluer le chemin parcouru, pour appréhender correctement sa position actuelle avant de se projeter vers un avenir meilleur;

- le second principe est qu'une décision de portée générale légitime et praticable est meilleure qu'une décision de portée générale unilatérale et légale mais inapplicable.

C'est ainsi que pendant mes études universitaires et à l'Institut d'études politiques d'Aix-Marseille dans la matière de droit constitutionnel comparé, j'ai été favorablement impressionné par la constitution de la République Fédérale d'Allemagne de 1949, par la durabilité de son système démocratique, par le bon agencement des institutions et par l'efficacité du fonctionnement des différents organes ; de sorte que lorsqu'il s'est agi pour le gouvernement militaire de proposer un projet de constitution au référendum, il s'est tout naturellement inspiré du modèle de la République Fédérale d'Allemagne, qui nous paraissait le plus approprié dans la mise en place des structures de la constitution de la République de Haute-Volta du 29 juin 1970, en l'adaptant à nos réalités, caractérisées par le passage d'un régime militaire démocratique à un régime civil démocratique fondé sur la séparation des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire dans une situation de grande précarité et c'est dans ce contexte que le choix s'est porté sur les organes suivants :

- Un président de la République qui veille ; une assemblée nationale qui vote les lois (Bundestag), un gouvernement avec un Premier ministre (chancelier) qui gouverne ; les pouvoirs judiciaires indépendants. La Chambre des Etats fédérés (Landers), qui est la deuxième chambre (Bundesrat) ou Sénat, n'a pas été retenue parce que la Haute -Volta était un Etat centralisé aux ressources limitées avec des pouvoirs judiciaires indépendants.

- La mission principale de l'armée depuis son arrivée au pouvoir en 1966 était le redressement financier de la République de Haute-Volta, qui l'obligeait à prendre des mesures drastiques et douloureuses de réduction des dépenses en tout temps et à tous les niveaux dont l'acceptation par tous nécessitait des efforts équitablement partagés par toute la population affectée par les effets des décisions prises démocratiquement avec le concours de tous pour leur conférer le caractère légitime de préférence à des décisions unilatérales et légales mais inacceptables par cette population alors que le but est toujours d'aboutir à des résultats efficaces au moindre coût dans tous les domaines. C'est donc sur cette base que la constitution de 1970 a été bâtie sur tous les plans et c'est ainsi qu'au niveau de l'Assemblée nationale, l'article 45 limite à 45 jours la durée des sessions, que l'article 47 laisse le député attaché à ses activités habituelles en dehors du temps consacré aux sessions de l'Assemblée nationale, que l'article 55 stipule que le mandat du député est gratuit sauf qu'il perçoit une indemnité journalière limitée pendant la durée des sessions par jour de présence effective; au niveau du gouvernement, l'article 59 indique qu'en aucun cas le nombre de ministres et de secrétaires d'Etat ne peut être supérieur à 15 qui n'ont pas de salaires de fonction sauf une indemnité de représentation d'un montant dérisoire amputée d'une retenue pour le logement administratif et assortie d'avantages en nature plafonnés ; en outre le gouvernement devait présenter un projet de budget que l'Assemblée nationale est tenue, d'après l'article 72, de voter en équilibre.

Dans cette batterie de mesures draconiennes de compression des dépenses, il n'apparaît nulle part la présence d'une structure de type deuxième chambre ou Sénat, dont l'utilité dans un Etat centralisé comme la Haute-Volta n'était ni prioritaire ni urgente alors qu'elle constituerait un alourdissement de la procédure parlementaire vers l'inefficacité et un renchérissement des coûts de fonctionnement, inacceptables dans un contexte d'austérité et de redressement financier.

Certes, actuellement nous ne sommes plus en période d'austérité, mais il n'en demeure pas moins vrai que le Burkina Faso n'est toujours pas en mesure de faire face avec ses ressources propres à toutes les charges de caractère impératif et est toujours obligé d'avoir recours à l'aide extérieure et à l'endettement pour financer en partie ses dépenses essentielles en votant systématiquement des budgets déséquilibrés et en se limitant au strict indispensable dont ne peut faire partie une structure supplémentaire dont l'utilité sociale n'est pas prouvée alors que demeure le financement de certains secteurs hautement prioritaires dont dépendent la paix et la sérénité, indispensables pour se consacrer utilement à des actions de développement profitables surtout aux couches sociales les plus vulnérables.

En fin de compte ayant été l'acteur principal de la mise en place et de la mise en œuvre des mesures d'austérité sus-indiquées et face à des conditions d'existence du Burkina Faso qui n'ont pas fondamentalement changé dans le sens d'une amélioration significative des conditions de vie des masses populaires, je me vois dans l'obligation, en toute conscience et en toute objectivité, de me maintenir dans le même état d'esprit qui est que le Burkina Faso, pays relativement homogène par sa dimension, sa géographie, sa population et ses mœurs et en dépit de la décentralisation intégrale en cours, peut se passer sans grand dommage d'un Sénat dont l'utilité sociale n'est pas évidente et dans la mesure où nous avons pu nous en passer pendant un quart de siècle et où notre culture parlementaire en cours de renforcement a plutôt besoin d'un cadre fonctionnel et d'une procédure parlementaire de Votation des lois Simple, Légère, Fluide et Facile à mettre efficacement en œuvre, alors que les conséquences financières négatives de la mise en place d'un Sénat prouvées peuvent être économisées pour être affectées à des opérations plus immédiatement prioritaires, en signe de bonne gouvernance politique et économique enseignée à l'Institut Général Tiémoko Marc GARANGO pour la gouvernance et le développement.


Propos recueillis par Hamidou Ouédraogo

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