Mauvaise nouvelle sur le front sécuritaire au Sahel. Après un long silence qui laissait croire à une agonie, les groupes terroristes chassés du Mali, tel un phénix, renaissent de leurs cendres. Ils viennent de se rappeler à notre bon souvenir, en signant leur retour par une fusion entre deux des groupes qui écumaient le Nord Mali. Ainsi, le MUJAO (Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest) , dirigé par Oumar Ould Hamada et les « Signataires par le sang » de Mokhtar Belmokhtar, forment désormais une seule entité dénommée "Al Mourabitoune" ("Les Almoravides"). Ce nouveau développement prouve d’une part, si besoin était, que le terrorisme islamiste n’est pas mort dans la bande sahélo-saharienne et que même, mieux, il se renforce. Depuis leur débâcle du Mali suite à l’intervention française sous le nom de Opération Serval, les djihadistes avaient certes tenté des actes de désespoir comme les attaques au Niger et en Algérie. Mais depuis lors, silence radio. Plus aucun signe de vie. De sorte qu’il est difficile de mesurer aujourd’hui leur véritable force de frappe, même avec cette fusion. En tout état de cause, les djihadistes ne s’avouent pas vaincus.
Cette nouvelle donne appelle de la part des pays sahélien un regain de vigilance. Certes, la France n’a jamais baissé la garde. Pour preuve, elle continue de maintenir une bonne partie de ses troupes sur le sol malien. Par ailleurs, les Etats voisins du Mali eux aussi ont multiplié les mesures de sécurité autour de sites stratégiques ou sensibles comme les aéroports, les chancelleries et institutions occidentales et les camps militaires. Mais par le passé, les djihadistes sont parvenus à passer entre les mailles des filets, surtout au Niger. Nos différents Etats sont-ils prêts à parer à toute éventualité ? On l’espère. Ce qui est sûr, si la guerre frontale contre les terroristes a pris fin, c’est celle asymétrique qui se mène de façon discrète. Celle où l’ennemi est invisible, frappe et disparait. Avec des conséquences incalculables pour les pays attaqués. Après la fin de la guerre au Mali, chaque Etat de la sous-région travaille à rétablir la confiance auprès des investisseurs et des touristes échaudés par les prises d’otages et autres attentats. Si le Niger et le Mali demeurent toujours dans le rouge, le Burkina, par contre, a pu tirer son épingle du jeu en réussissant, jusqu’à présent, à rester à l’abri de la folie des djihadistes. Ce n’est sans doute pas le fait du hasard, mais le résultat d’un travail rigoureux à mettre à l’actif des autorités. Contrairement au Niger, le Burkina parle peu, mais agit beaucoup. Il en récolte aujourd’hui les résultats. Reste à maintenir ce niveau de sécurité qui en fait un havre de paix.
La fusion entre groupes terroristes sahéliens intervient après l’effervescence et l’euphorie des élections au Mali. Le président Ibrahim Boubacar Keïta est donc averti. Outre la réconciliation et la reconstruction, il aura comme défi à relever, la sécurisation totale du Mali et surtout l’éradication de tous les groupes terroristes. Il devra faire du Mali ce pays que l’on pouvait traverser du Nord au Sud, sans autre crainte que celle de perdre son chemin dans le vaste désert. Mais, il y a l’éternelle question de l’armée malienne. Occupée à nouveau à se régler les comptes, après la honteuse promotion du capitaine de Kati, sera-t-elle jamais unie pour faire face à la menace sécuritaire ? Pour le moment, les forces françaises et onusiennes permettent de pallier cette incurie des militaires maliens. Cette solidarité africaine et internationale est du reste indispensable dans ce genre de situation. Mais, elle ne sera pas éternelle et il va bien falloir qu’enfin l’armée malienne s’assume. De même, l’Afrique de l’Ouest, en particulier sa partie sahélienne, doit, dès à présent, songer à mutualiser ses ressources pour une action commune et coordonnée contre le terrorisme. Ce projet, engagé depuis des lustres, n’a jamais vu le jour. Même la salve d’avertissement survenue au Mali n’a pas permis une mise en place rapide d’une structure sous- régionale opérationnelle. Pourtant, il ne faut pas attendre une autre catastrophe pour recommencer à s’agiter. On ne veut plus voir les pitoyables scènes que nous a montrées la CEDEAO lors de l’invasion djihadiste du Nord Mali .