La 4ème édition du festival des cultures, Leelal Sahel (au clair de la lune du Sahel), débuté le 21 novembre 2018, a connu son apothéose vendredi 23 novembre dernier à Dori. Au cours d’une longue soirée d’ambiance, des artistes de renom comme Dicko Fils, Zanté, Maïky Doul, Ouétian Dembélé et Rama la slameuse se sont succédé sur le podium, la plupart se produisant en live, au grand bonheur d’un public sorti nombreux.
21h, terrain communal de Dori, en plein air, au clair de la lune. En cette période de l’année, et à cette heure de la soirée, le temps est frais dans cette partie sahélienne du Burkina mais la place est noire de monde : enfants, jeunes, vieux, debout, assis sur des chaises ou à même le sol, personne ne voulait se faire conter l’événement. C’est l’apothéose du festival Leelal Sahel. Au fur et à mesure, les rangs grossissent et les décibels montent. Les choses sérieuses commencent. La troupe Lebran Cissé est sur scène. Mais les dieux de la technique font faux bond, il y a une coupure d’électricité. Cela n’entrave en rien l’éclat de la cérémonie. A la demande de l’animateur d’ailleurs, les téléphones sont allumés pour plus de visibilité. Les animations sont suspendues pour une remise de prix. En effet, Leelal Sahel qui vise la promotion de la culture peulh en particulier et de la culture en générale, c’est aussi des compétitions diverses. Pour cette quatrième édition, le thème placé sous « Promouvoir l’éducation à l’hygiène et à l’assainissement à travers les valeurs culturelles, gages d’une cohésion sociale durable » a mis aux prises des candidats en danse traditionnelle et en SLAM.
Après 3 jours de concours, c’est la troupe Boyaba de danse gourmatché qui est sacrée lauréate dans la première discipline et, en SLAM, c’est le petit Wilfried Koussoubé, élève en classe de CM1 qui a su manier la langue de Molière et convaincre le jury. Chacun a reçu un trophée, plus une enveloppe. Les deux lauréats monteront d’ailleurs par la suite sur scène pour convaincre le public de leur talent à travers des prestations de haut vol.
Avant de faire place aux prestations en live marquant le clou des festivités, le co-parrain de la cérémonie, le maire de la commune de Falangoutou, par ailleurs président des municipalités de la région, Seynou Maïga, a saisi l’occasion pour féliciter les heureux lauréats du jour et les organisateurs pour avoir pu tenir une telle manifestation dans un contexte d’insécurité. «Pour nous sahéliens, chaque cérémonie, c’est pour dire non aux terroristes. Pour nous sahéliens, chaque cérémonie est un défi. Et chaque fois que nous arrivons à organiser sereinement une activité, nous disons que nous avons gagné une bataille», a t-il lancé comme pour dire bravo à l’association Leelal.
Soudainement, des cris de joie accompagnés d’applaudissements de la foule interrompent les discours. Le courant est de retour et «la lumière fut». Les prestations reprennent. Se succèderont, en duo et en slam, Rama la slameuse et sa fille Gloria, l’artiste musicien Zanté et Karamsamba Warba pour un brin d’humour.
1h du matin. La lune se fait plus claire. La fête reprend de plus belle. Le jeune Maïky Doul monte sur scène. L’atmosphère se surchauffe. Ce fut l’une des prestations les plus enlevées. Avec les membres de son orchestre, il entonne les chansons et joue avec un public très complice qui reprend parfaitement les refrains, dans la langue fulfuldé. C’est le pulaar qui est en marche.
Puis, une fenêtre est ouverte pour la parenté à plaisanterie avec la prestation musicale du Bobo (ethnie de l’ouest du Burkina, parente à plaisanterie des peulhs) Ouétien Dembélé. Avec des pas de danse hilares dont lui seul détient le secret, il est applaudi par les spectateurs. Des bouteilles de bière et des bidons de lait lui sont même offerts sur scène par les peulhs, en signe de la parenté à plaisanterie.
Il passera par la suite le micro à Rama la slameuse pour une seconde prestation, cette fois «seule comme une grande».
Aux environs de minuit, le spectacle se transforme en bal poussière quand le groupe Success de Mohammed Guindo prend le relais. Impossible de rester insensible au rythme et à la cadence de cette troupe Bella. Organisateurs et public entrent alors dans la danse. C’est la liesse totale.
Il est exactement 1h45 quand Dicko Fils prend son règne sur le podium. Visiblement, il était le plus attendu. Il revisite certains de ses titres phares comme Denke Denke et Pulaku. Le public est en transe. Le show est à son paroxysme. Après 45 mn de chaude ambiance, les organisateurs ont du demander à l’artiste de «doser» pour permettre aux spectateurs de regagner leur domicile pour un court sommeil avant la levée du jour.
Le plus heureux de la soirée, le promoteur de Leelal Sahel, Abdoulaye Cissé s’est réjoui en ces termes, entre deux souffles : « C’était une grande réussite. Contrairement aux autres années où le festival s’est tenu dans une salle, cette année c’est en plein air et on a eu beaucoup de monde. L’objectif est atteint car nous avons pu mener toutes les activités qui étaient prévues pour les 3 jours de festival. Chacun en a eu pour son compte »
Il était 2h30 environs quand nous quittions les lieux, convaincue que Leelal Sahel est un biotope de talents sûrs. Et nul doute que l’événement dont les organisateurs promettent de grandes innovations pour les années à venir, fera encore parler de lui, aux plans national et international.