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Procès du putsch: "J’ai assumé une situation", le général Gilbert Diendéré

Publié le mardi 27 novembre 2018  |  Sidwaya
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© AFP par AHMED OUOBA
Le général Gilbert Diendéré, au palais présidentiel de Ouagadougou, le 17 septembre 2015.
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Le général Gilbert Diendéré a comparu devant le Tribunal militaire, le lundi 26 novembre 2018, pour sa présumée implication dans le putsch de septembre 2015. Il a nié les faits, puis dressé un long réquisitoire contre l’ancien Premier ministre, Yacouba Isaac Zida.

Jamais l’interrogatoire d’un accusé n’avait mobilisé autant de monde, depuis le début des auditions entrant dans le cadre du procès du coup d’Etat de septembre 2015. Une salle comble, une longue file d’attente. Des leaders politiques, syndicaux et de la société civile, victimes, parents de victimes, citoyens lambda ont assisté, ce lundi 26 novembre 2018, au passage à la barre du présumé cerveau du putsch contre la Transition burkinabé. Le général de division, en tenue militaire et coiffé d’un béret rouge (qu’il a enlevé une fois à la barre), est apparu plutôt serein, devant le Tribunal militaire. Celui à qui est attribuée la paternité du « coup d’Etat le plus bête au monde », a plaidé non coupable. « Je n’ai ni commandité, ni planifié, ni organisé, ni exécuté ce que d’aucuns appellent aujourd’hui coup de force », a-t-il dit tout de go lorsque le président du tribunal, Seydou Ouédraogo, lui a lu les chefs d’inculpation contre sa personne. Le général a d’abord rendu grâce à Dieu, s’est incliné devant la mémoire des disparus et souhaité prompt rétablissement aux blessés. Cependant, des actes d’attentat à la sûreté de l’Etat, de meurtres, d’incitation à commettre des actes contraires à la discipline militaire, de trahison, ou encore de collusion avec des forces étrangères, il ne s’y reconnait point. « J’ai assumé une situation le 17 septembre (…) J’ai posé des actes dont la qualification pourrait être discutée par les spécialistes du droit », a-t-il admis. L’ancien Chef d’Etat-major particulier de la Présidence sous Blaise Compaoré a expliqué qu’après l’interruption du Conseil des ministres par des éléments de l’ex-RSP et l’enlèvement des autorités de la Transition, il a tenu une réunion avec la hiérarchie militaire et des personnes- ressources que sont l’ancien président Jean-Baptiste Ouédraogo et l’archevêque de Bobo-Dioulasso, Mgr Paul Yemboado Ouédraogo, au ministère de la Défense. Il a été décidé d’aller rencontrer la troupe au camp Naaba Koom II. En raison de l’intransigeance des soldats et de la vacance du pouvoir, il a été recommandé que l’armée prenne le pouvoir, foi du général, qui a aussitôt précisé que cette recommandation n’a nullement été contestée. Toutefois, la hiérarchie a demandé de laisser les « éléments assumer ce qu’ils ont commencé », étant donné qu’elle n’a pas été associée au départ. « Je me suis vu obligé de me porter aux devant des choses bien que n’ayant pas moi-même été associé à la préparation (…) Je me suis dit que s’il fallait laisser les sous-officiers gérer la situation, ça n’allait pas bien se passer », a soutenu le général Diendéré. Il a ajouté avoir ensuite procédé à la création du Conseil national de la démocratie (CND), une instance devant regrouper toutes les sensibilités du pays. Et ce, pour éviter au Burkina les affres d’une guerre civile et corriger le « comportement machiavélique » de l’ancien Premier ministre, Yacouba Isaac Zida, soutenu par certaines OSC. Il a cependant regretté que sa démarche n’ait pas été comprise. C’est pourquoi, il a pris la « décision audacieuse » de laisser le pouvoir suite à la médiation de la CEDEAO.

Un long réquisitoire contre Isaac Zida

Pour permettre de mieux cerner les événements du 16 septembre 2015, « Golf » a dépeint la situation qui prévalait au sein de l’ex-RSP et de l’armée, consécutivement à l’accession de Isaac Zida au pouvoir. « Commencer par le 16 septembre ne permettra pas de comprendre ce qui s’est passé ce jour-là… Les éléments n’ont pas bu du tramadol ou pris de l’alcool. C’est une situation qui les a amenés agir », a indiqué Gilbert Diendéré, qui ensuite a ajouté : « Loin de moi l’idée de justifier le coup d’Etat ». ll a souligné qu’après s’être fait porter à la tête de l’Etat, puis du gouvernement, M. Zida a cherché à contrôler l’administration publique, les caisses de l’Etat et la rue à travers la société civile et le Régiment de sécurité présidentielle. N’ayant pas pu avoir une mainmise sur le corps, il a débuté une campagne de dénigrement dans le but de discréditer et dissoudre l’ex-RSP. Le général Diendéré a témoigné qu’aux premières heures de son pouvoir, l’ancien Premier ministre l’a «instruit » de relever le colonel-major Boureima Kiéré de ses fonctions de chef de corps du RSP. Le Premier ministre (PM) d’alors lui a interdit également, à lui Diendéré, l’accès au Conseil économique et social, où il avait établi son siège. C’est ainsi qu’il a été « décagnoté » le 27 novembre 2014. De même, il a fait savoir que des officiers de l’ex-RSP ont été affectés sans aucune considération à leur égard. « Moi général, j’ai appris ça (son affectation, ndlr) par mon épouse qui l’a aussi apprise d’un soldat. Je n’en ai pas fait un problème », a confié Diendéré. « Il y avait beaucoup de frustrations et d’humiliations au RSP », a laissé entendre Golf. Le général est revenu, une par une, sur les différentes crises qui ont secoué la Transition. Pour lui, la première, celle du 30 décembre, est la résultante de la vague d’affectations d’officiers de l’ex-RSP. Gilbert Diendéré a rapporté que ce jour-là, les éléments ont fait sortir le Premier ministre du Conseil des ministres pour une réunion au camp Naaba Koom II, où ils lui ont adressé une plateforme revendicative de 28 points. Ceux-ci se résument, selon l’accusé, à la réorganisation du commandement, à la reprise normale des activités du corps, à la suspension des affectations et de l’interdiction du port de la tenue spéciale du RSP. « J’ai eu chaud au cœur (…) Les éléments m’ont dit qu’ils veulent travailler. Ces soldats avaient une conscience professionnelle et ils travaillaient avec brio », a affirmé le général. Les éléments auraient également proposé que Gilbert Diendéré réintègre son poste de Chef d’Etat-major particulier de la Présidence du Faso. L’accusé a dit avoir refusé. Estimant devoir passer la main après 21 ans passé au service du président Blaise Compaoré. Le PM Zida aurait accepté d’appliquer les revendications devant les hommes. Les affectations seront annulées, les éléments recevront des sommes d’argent, mais aucune suite ne sera donnée à la revendication à propos de la reconstitution du commandement. Zida aurait laissé entendre aux hommes que le décret à cet effet aurait été transmis au président pour signature et que celui-ci tarde. Le général Diendéré a poursuivi, déclarant avoir reçu un appel du président de la Transition le 3 février, le convoquant à Kosyam. Michel Kafando souhaitait s’informer sur la situation au sein du corps. Le général lui a alors fait part des revendications de l’ex-RSP et de la réponse du PM indiquant que le texte était en souffrance sur la table du président pour signature. Le lendemain, 4 février, c’est le Moogho Naaba, qui le convoque. Sur place, le général a dit y avoir retrouvé Isaac Zida en compagnie du président du CAR, Hervé Ouattara. « Le Moogho Naaba m’a dit que le Premier ministre s’est réfugié chez lui, parce que les militaires veulent l’arrêter, car des propositions faites n’ont pas été signées par Michel Kafando », a déclaré l’accusé.

« Ce qui devait arriver arriva »

Il a soutenu avoir informé le Moogho Naaba de sa rencontre avec le président du Faso, la veille. « Zida a persisté pour dire : je lui ai transmis, il a dû oublier comme il est vieux ou il n’est pas d’accord », a renchéri Gilbert Diendéré.
Le général a, tout de même, été mandaté d’échanger à nouveau, avec Michel Kafando. Mais a dit s’être, cette fois, fait accompagner de l’ancien président Jean Baptiste Ouédraogo. Au cours de cette entrevue, le président Kafando aurait exprimé sa déception vis-à-vis de son Premier ministre. « Jean Baptiste Ouédraogo lui a dit de se débarrasser de son PM », a attesté le général. Ce que le président de la Transition a réaffirmé le lendemain, 5 février 2015, lors d’une première rencontre avec la hiérarchie militaire qu’il avait demandé au général Diendéré d’organiser. Mais n’ayant pas eu le soutien souhaité de la part de l’armée, il a abandonné le projet. Le 28 juin 2015, Gilbert Diendéré a dit avoir été convoqué, cette fois, par l’ambassadeur américain au Burkina Faso, Tulinabo Mushingi. Celui-ci lui a fait cas d’un projet de coup d’Etat fomenté par des éléments du RSP et qu’une action était prévue cette nuit-même contre le Premier ministre qui rentrait de Taïwan. A cette occasion, il était prévu d’éliminer le général Diendéré. « On avait envie de me liquider parce qu’apparemment je gênais », a rapporté l’accusé. Le lendemain, les capitaines Abdoulaye Dao et Flavien Kaboré ont été convoqué pour être entendus à la gendarmerie. La même nuit, des officiers de l’ex-RSP ont essuyé des tirs d’éléments du corps qui ont été arrêtés, mais la hiérarchie n’aurait pris aucune sanction à leur encontre. « Golf » a raconté que plusieurs rencontres, initiées par le président Kafando avec le comité des sages, ont fait suite à ces incidents pour trouver une solution à la crise au sein du RSP. Ces concertations ont abouti à des propositions dont le maintien du Premier ministre Zida à son poste et le non-démantèlement du RSP en attendant de nouvelles autorités. Propositions qui seront lues sur la chaîne télé nationale par le président lui-même. Alors, quelle ne fut la surprise des éléments, a dit le général, lorsque le président de la Commission de réconciliation nationale et des réformes, Mgr Paul Ouédraogo est allé remettre leur rapport le 14 septembre au président et dont le sujet principal était la dissolution de l’ex-RSP avec effet immédiat. L’adoption de ce rapport ayant été à l’ordre du jour du conseil des ministres du 16 septembre, « ce qui est arrivé, arriva », a conclu le général. Son audition se poursuit ce mardi 27 novembre.

Djakaridia SIRIBIE
Fabé Mamadou OUATTARA
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Sidwaya N° 7229 du 8/8/2012

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