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Hausse du prix du carburant : au cœur du processus de changement de tarification

Publié le lundi 12 novembre 2018  |  Sidwaya
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© Autre presse par DR
Transport : l`Afrique, terre d’accueil des carburants toxiques
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Les prix du litre de super 91 et celui du gasoil coûtent 75 francs CFA de plus au consommateur sur le territoire burkinabè, depuis le vendredi 9 novembre 2018. La nouvelle mesure rendue publique à l’issue du Conseil des ministres de la veille, jeudi, est diversement appréciée.

«Kabaco ! », s’exclame la femme d’un certain âge, qui vient de se faire servir 1 000 francs CFA d’essence super 91 dans une station-service de la capitale. Elle reste pensive un moment, avant de se raviser pour refermer le réservoir de sa moto. Les 75 francs CFA de plus décidés, la veille, par le gouvernement en Conseil des ministres sont excessifs à son avis. Elle vient pourtant d’acheter son carburant à l’ancien prix. La mesure gouvernementale, qui devrait en principe être appliquée depuis minuit n’est pas encore effective, ce vendredi à 5 heures du matin à son passage à la station sise en face du rond-point des Nations unies. Un peu plus loin, sur « la plus belle avenue de Ouagadougou », la seule station d’essence en est à refaire le plein des cuves à 6 heures du matin. L’accès n’est pas ouvert aux clients. D’ailleurs, le gérant par téléphone fait dire qu’il n’autorise pas la présence de journaliste sur les lieux. Cap est mis sur l’avenue Ouari- Boumediene où deux autres stations se font face de part et d’autre de la voie. Un taxi s’arrête devant la pompe de Teegawendé Ouédraogo. Les deux passagers à bord, des expatriés particulièrement bruyants, rentrent manifestement d’une soirée très arrosée. Celui qui est assis à l’avant sort du véhicule. Tenant difficilement débout, il parvient au niveau du pompiste à qui il lance une commande en anglais : « five thousands ». Teegawendé sert 5 000 francs CFA de gasoil, comme demandé, ce qui équivaut à environ 9,5 litres. A 6 heures, ce sont les anciens prix, qui sont toujours pratiqués ici également. Contactée, Pélagie Ouoba, chargée de communication de Vivo Energy, une société marqueteuse (distributrice de carburant en gros), explique que c’est la Compagnie burkinabé pour tout appareillage mécanique (COBUTAM) qui doit procéder aux changements de prix dans leurs stations.

La COBUTAM en action

La COBUTAM est avec la Compagnie générale des travaux (COGETRA), l’une des principales structures chargées de la maintenance des pompes à essence auprès des détaillants. « D’autres personnes appliquent les nouveaux prix en collant des bouts de papiers sur leurs distributeurs, mais chez nous on préfère que les techniciens viennent le faire sur les distributeurs », explique-t-elle. Le premier responsable de la COBUTAM explique à son tour qu’au-delà de l’annonce publique, ils doivent d’abord entrer en possession du décret ministériel matérialisant la décision d’augmenter avant de procéder aux changements. En attendant cette effectivité, les clients continuent d’acheter leurs carburants aux anciens prix comme le fonctionnaire des impôts, Mahamadi Ouédraogo, rencontré à une station-service en face du rond-point de la Bataille du rail. En grande partie, c’est le même langage qui ressort en refrain à la nouvelle donne : « c’est trop élevé (…) Mais on n’a pas le choix, il faut bien mettre du carburant ». L’électricien Sawadogo a une réaction plus posée. Il vient de se faire servir 1 000 francs CFA d’essence dans sa moto. Cette hausse du prix de l’essence est, selon lui, tout à fait normal. Elle correspond, poursuit-il, à une donne internationale que le Burkina Faso ne peut que subir malheureusement. Et comme au Burkina, c’est l’Etat qui a le monopole de l’importation des hydrocarbures, à travers la SONABHY, il va de soi qu’il fasse impacter la situation internationale à la pompe. Seulement, M. Sawadogo reproche la « maladresse » du gouvernement dans sa communication. « Les raisons invoquées pour justifier cette hausse, notamment, l’argument selon lequel il faut dégager des fonds pour soutenir l’effort sécuritaire sont irresponsables. Il n’y a qu’à voir certaines dépenses à leur niveau ou les institutions inutiles qu’ils ont créées pour comprendre qu’ils sont incohérents dans leurs propos et leurs actes », analyse le jeune homme. Face au siège du FESPACO, Daouda Ouédraogo, vendeur de véhicule s’est trouvé une parade. « Dès l’annonce de la hausse, j’ai mis 3 000 francs CFA d’essence dans chacun des 9 véhicules dans la nuit d’hier et j’ai complété 17 000 francs CFA dans le mien pour faire le plein. Dès la semaine prochaine, je vais faire venir mon carburant du Benin où le litre coûte 475 francs », confie-t-il. A 8 heures, les artères de la capitale ont déjà repris leurs cadences bruyantes et accélérées. Jusque-là, les différentes essenceries visitées attendent toujours les techniciens pour opérer les changements de prix. A la tête d’une équipe de cinq personnes, l’ingénieur Nicodème Ilboudo de la COBUTAM se présente dans l’une des stations d’essence en face du rond-point des Nations-unies, pour opérationnaliser les nouveaux prix. Mais ça prend du temps, le gérant attend l’ordre « d’en haut » avant de les autoriser à agir. Les techniciens se rendent donc chez le marqueteur voisin. Un coup de fil de ce gérant suffit pour autoriser l’opération de changement des prix. A 9 h15, l’ingénieur des travaux de maintenance de la COBUTAM, Nicodème Ilboudo prend le contrôle de cette station d’essence. Il ordonne l’arrêt des ventes et fait baliser la piste pour bloquer l’accès à la station. Les membres de son équipe relèvent les quantités de fluide contenues dans chaque cuve de carburant. Ils enregistrent entre 980 et 2 550 litres. Les chiffres concordent avec ceux du gérant. Ils relèvent ensuite les index au compteur de chaque pompe à essence. Muni d’une petite commande, Nicodème Ilboudo modifie les prix. Chaque pompe où il passe, marque désormais 601 francs CFA par litre pour le gazole et 677 francs CFA pour le super. Il dresse son rapport, remet une copie au gérant de la station et emporte deux autres à répertorier à la COBUTAM. La décision gouvernementale vient d’être mise en œuvre dans cette station. Le premier véhicule à être servi à l’issue du changement opéré est celui de l’artisan, Alexandre Meda. Le client est résigné. « On n’a pas le choix de toute façon. On souhaite juste que les prix ne grimpent pas outre mesure », espère-t-il. Mais l’importateur de cola, Salif Sinaré, ne promet rien en ce qui le concerne. « En venant de la Côte d’Ivoire, nous faisons le plein de nos camions à partir de la frontière. Il est clair que si le prix du carburant a monté, ça va se ressentir sur le prix de la cola », déduit-il, tout sourire. 


Vérification des volumes du carburant vendu

L’équipe de Nicodème Ilboudo se dirige ensuite dans la précédente station où l’autorisation est enfin accordée. Il procède à la même opération. A peine les techniciens de la COBUTAM ont quitté la première station, qu’une mission de contrôle du ministère du Commerce y débarque. Avec un escadron de journalistes. Ce qui a le don d’arracher un commentaire d’exaspération à l’employé de commerce, Ousséni Nombré, qui vient de constater qu’avec 600 francs CFA, il n’a plus le volume d’un litre d’essence. « Vous augmentez le prix du carburant et vous vous permettez de sortir avec les journalistes pour faire un contrôle. Pour montrer que vous travaillez quoi ! », s’énerve-t-il. Après avoir relevé les index des différentes pompes et vérifié les prix affichés sur chacune, l’agent de la direction du contrôle économique et de la répression des fraudes, Koula Hien, estime que la station est en règle. « L’objectif de notre sortie est de s’assurer que l’augmentation du prix à la pompe décidée en Conseil des ministres d’hier est effective. On remarque que c’est les nouveaux prix qui sont affichés ici à la pompe (…) On va leur demander les factures d’achat pour vérifier les quantités commandées avant l’augmentation pour calculer les plus-values et les dégager pour reverser dans les caisses de l’Etat », explique-t-il. Engagés dans la même mission de contrôle, les agents de l’Agence burkinabè pour la normalisation de la qualité et de la métrologie (ABNORM) ont trouvé que les volumes et la qualité des carburants vendus sont tout aussi conformes aux mesures légales. « L’étiquette collée sur les distributeurs était déjà verte mais on voulait une confirmation. Et c’est effectif, le volume et la qualité sont dans la marge tolérée », indique l’agent de l’ABNORM, Nestor Ouattara. La mission répète les mêmes contrôles sous caméra et flashe dans la station voisine, quelques minutes après que les techniciens de la COBUTAM ont mis le cap vers une autre station sur l’avenue Kwamé- N’Krumah. C’est après 21H, que l’ingénieur des travaux regagne son domicile, après avoir consacré la journée du vendredi à modifier les prix dans 15 autres stations des marqueteurs, avec qui sa société a un partenariat. Six autres équipes ont également parcouru les rues de Ouagadougou à cet effet. Le lendemain samedi 10 novembre a été consacré aux autres provinces du pays. Mais déjà, dans la soirée du vendredi, une déclaration de la Coalition nationale de lutte contre la vie chère, la corruption, la fraude, l’impunité et pour les libertés (CCVC) circulait sur les réseaux sociaux, annonçant des mouvements sociaux pour dénoncer l’augmentation.

Fabé Mamadou
OUATTARA
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Sidwaya N° 7229 du 8/8/2012

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