De jeunes slameurs mettent les mots au service de la promotion de la Planification familiale (PF). A Bobo-Dioulasso et à Ouahigouya, ils ont invité les populations, notamment les plus jeunes à planifier leur vie, en optant pour une méthode de PF.
Moumouni Oueremi est candidat au concours : « je slame pour la PF ». Perché sur un camion podium dans la ville de Ouahigouya, le jeudi 18 octobre 2018, il représente sa famille de 11 membres à l’image de l’équipe nationale de football. Ce « 11 familial » est issu d’une seule et même mère, l’espace entre deux naissances étant d’une année à peine. Le père au chômage, il revient à la dame de mendier pour nourrir ses enfants. Les plus âgés d’entre eux, devenus apprentis-mécaniciens, convoyeurs, charretiers, ont dû suspendre leur scolarité pour venir en aide aux parents. « Si, aujourd’hui, j’ai du mal à me définir, c’est parce que je n’ai pas eu la chance d’être le maître de mon propre devenir », soutient le jeune slameur. Face à l’assistance acquise à ses mots, Moumouni Ouérémi recommande à chaque jeune, une méthode de Planification familiale(PF) pour ne pas compromettre son avenir. « Je suis jeune, j’opte pour une méthode de PF pour mieux préparer mon avenir et planifier ma vie », dit-il. Gaël Rouamba, toujours de la Cité de Naaba Kango, dénonce l’attitude des hommes qui, à chaque 12 mois, font porter à la femme une grossesse, pour ensuite abandonner les « marmots » à leur triste sort. La veille, à Bobo-Dioulasso, Modibo Sangaré a prêté sa voix, à cet enfant dont le père, élève, refusa d’assumer sa paternité et abandonné par sa mère, dès la naissance. Ces « parents par surprise » n’avaient opté pour aucune méthode de planning familial. Il lance un appel à la société. « La consommation du fruit défendu n’est pas une compétition. D’ailleurs, consommée précocement, elle n’apporte que désolation », clame-t-il. Modibo Sangaré va en croisade contre les grossesses non désirées et précoces et les maladies sexuellement transmissibles en milieu jeune et scolaire. A défaut de l’abstinence, il conseille l’adoption de méthodes contraceptives. M. Sangaré dénonce l’irresponsabilité des jeunes qui « laissent à la société, défaillante, l’éducation de leurs enfants non coupables ». Dans une foule stupéfaite, Assita Tall, 23 ans, a bien reçu le message. A ses dires, elle et son conjoint ont décidé d’avoir trois enfants, après leur mariage prévu pour début 2019. « Nous avons convenu qu’il y aura 4 ans entre nos enfants », confie la gérante de kiosque. Pour le moment, les deux partenaires utilisent le préservatif pour les rapports sexuels.
« Les indicateurs toujours faibles »
Micro en main, le slameur « amateur », Rasmané Sawadogo présente, dans un jeu de mots, les avantages de la PF. « Décidée de commun accord, la PF garantit le bien-être de la mère, l’enfant et de la famille », dit-il. Safiatou Oulé, la quarantaine, partage l’avis des artistes locaux. Trois ans séparent chacun de ses 5 filles. C’est M. Oulé, enseignant de profession, qui a pris la décision d’espacer la naissance des enfants, à en croire la dame. La forte pression démographique et la cherté de la vie commandent des comportements responsables. Pour elle, c’est aux couples de décider librement du nombre d’enfants et du moment de leur naissance. A cet effet, il est indispensable qu’ils aient un meilleur accès à des méthodes de contraception. A ces jeunes, des artistes de renom tels Idak Bassavé et les Playerz ont aussi donné de la voix pour la promotion de la PF. Le Réseau africain jeunesse, santé et développement (RASJ/BF) est chargé d’organiser la compétition « Je slame pour la PF », dans le cadre de la mise en œuvre du projet SWEDD, (Autonomisation des femmes et dividende au Sahel ou Sahel Women empowerment and demographic dividend). Le concours vise à opérer des changements de comportements au sein des jeunes et à réduire les risques liés aux grossesses non désirées en milieu scolaire, notamment dans les régions des Hauts-Bassins, du Nord et du Centre-Est. « Les indicateurs sont toujours faibles dans ces zones en matière de PF. Pour ce qui est des grossesses non désirées, les chiffres sont très inquiétants », indique Fati Somé, de la direction de la promotion et de l’éducation pour la santé. Moumouni Ouérémi et Gaël Roumba de Ouahigouya et Modibo Sangaré et Rasmané Sawadogo de Bobo-Dioulasso ont été retenus pour partir à la finale, en attendant les candidats de Tenkodogo. A mi-parcours, Mme Somé se réjouit de la mobilisation des jeunes autour de la compétition.