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Procès du putsch manque : « L’argent de la politique ne passe pas par la banque », Léonce Koné

Publié le jeudi 18 octobre 2018  |  Le Pays
CDP
© aOuaga.com par Séni Dabo
CDP : la commission ad hoc fait son bilan à mi-parcours
Dimanche 2 juillet 2017. Ouagadougou. La commission ad hoc du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP, ex-parti au pouvoir) a rencontré la presse avant une réunion de ses membres pour faire le bilan à mi-parcours de son travail. Photo : Léonce Koné, président de la commission ad hoc
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Poursuivi pour complicité d’attentat à la sûreté de l’Etat et coups et blessures volontaires, celui qui était deuxième vice-président du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP), Léonce Koné, était, pour le 2e jour consécutif, à la barre le 17 octobre 2018. Il a été entendu par le parquet militaire et les avocats de la partie civile. Bien entendu, sous l’œil vigilant de ses avocats, Me Antoinette Ouédraogo et Me Yérim Thiam, respectivement ancien Bâtonnier du Burkina et du Sénégal. S’il reconnaît avoir reçu 50 millions de F CFA venus de la Côte d’Ivoire, il rejette en bloc ce qui lui est reproché.

Léonce Koné était, pour son 2e jour consécutif, à la barre le 17 octobre 2018. Il est poursuivi pour complicité d’attentat à la sûreté de l’Etat et coups et blessures sur 42 personnes. Niant d’emblée les faits, l’homme politique a pourtant expliqué que lui et ses camarades de l’ancienne majorité présidentielle ont salué le changement de régime. Toute chose qui allait, selon lui, remettre en marche la démocratie bafouée par les autorités de la Transition mises en place après l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014. Et le parquet de poursuivre son interrogatoire entamé la veille.

« Quelles relations particulières y a-t-il entre vous et Diomandé, chef d’état-major particulier de la présidence de Côte d’ivoire ? »

Rien.
« Je reviens sur les 50 millions de F CFA. Quelle urgence y avait-il à ce moment pour transporter autant d’argent par hélicoptère ? »

C’est juste une occasion. Les banques et les frontières étaient fermées alors que les échéances électorales étaient proches.

« Vous êtes un cadre de banque. Est-ce que c’est comme cela que se font les flux financiers ? »

Votre question me fait penser à ce qu’un ami m’a dit un jour. Il a dit que « l’argent de la politique ne passe pas par la banque. »

Après ces questions et observations du parquet, des avocats de l’accusé, la parole a été donnée aux avocats de la partie civile.

« Habituellement, ce sont les putschistes qui vont vers les hommes politiques. Pourquoi ici, c’est vous qui êtes allés, de façon spontanée, vers le général Dienderé ? », a interrogé Me Prosper Farama.

« ( …) Vous dites qu’habituellement, ce sont les putschistes qui vont vers les hommes politiques. D’où tirez-vous cette information ?
Y a-t-il un manuel de putsch ? », a rétorqué l’accusé.
Non. S’il y en a, je n’en n’ai pas connaissance, a repris Me Farama avant de lire la déclaration du regroupement politique dont fait partie le CDP : « Dans ces heures graves pour le destin du Burkina Faso, nos partis tiennent à réaffirmer leur total soutien et leur entière solidarité au Conseil national pour la démocratie (CND) qui a mis fin aux dérives anti démocratiques et sectaires du processus de la transition, telle qu’elle était conduite par le régime intérimaire qui a été mis en place au lendemain du soulèvement populaire des 30 et 31 octobre 2014. »
Qu’entendez-vous par, nos partis tiennent à réaffirmer leur total soutien et leur entière solidarité au Conseil national pour la démocratie (CND) ?

Le terme, en lui-même, est sans équivoque.
Je vais vous lire la définition du dictionnaire.
Méfiez-vous des dictionnaires.

Comme il fallait s’y attendre, après les questions et observations de Me Farama, ce fut au tour de Me Kam de prendre le relais.
Me Kam : Bonjour M. Koné
Léonce Koné : Bonjour Me Kam.

Par message Whatshapp, lu par votre conseil, vous avez répondu à Denise Epoté de TV5, aux environs de 20H. Vous lui dites qu’apparemment, c’est un coup d’Etat. Médiation en cours. Pas de déclaration. Pourquoi, à cette heure-là déjà, vous dites que c’est un coup d’Etat alors que la proclamation n’avait pas encore été faite par les militaires ?

Nous étions chez Herman parce qu’il y avait des rumeurs qui faisaient état de coup d’Etat.

Les premiers responsables n’avaient pas fait de déclarations le 16 septembre 2015. Vous, en homme politique avisé, vous dites qu’il y a coup d’Etat, médiation en cours. On peut considérer que vous aviez une longueur d’avance sur les autres ?
Vous, tout comme votre confrère, faites des conclusions hâtives.

Votre parti a organisé une réunion le 16 septembre 2015 ?

S’il y a eu une rencontre dans la soirée, je n’y ai pas assisté.

J’ai cru comprendre que votre parti n’a pas eu de rencontre dans l’après-midi du 16 septembre 2015. Donc, les initiaves ont été prises individuellement. C’est exact ?
Ce n’est pas exact.
Pourquoi ce n’est pas exact ?
Ce n’est pas exact parce que vous n’êtes pas du CDP. Vous ne pouviez donc pas parlez au nom du CDP.
Vous avez dit que vous avez organisé des manifestations pendant cette période.

Quel était l’objectif ?

« C’était pour montrer aux émissaires de la CEDEAO qu’il y avait un autre son de cloche, puisque le président Michel Kafando avait fait comprendre qu’il voulait bien appliquer les décisions de justice de la CEDEAO, mais c’était la population burkinabè qui s’opposait», a expliqué Léonce Koné en substance.

Cela me fait penser à ce que l’un de mes amis m’avait dit. L’argent de la politique ne passe pas par la banque.

« L’heure de la pensée unique est révolue »

A la reprise de l’audience dans la soirée du 17 octobre, après avoir donné la réplique à Me Prosper Farama, le bâtonnier Antoinette Ouédraogo fait comprendre que l’essentiel est de savoir « quel est le degré d’implication de Léonce Koné. » Quant à Me Seydou Roger Nyamba, avocat de la défense, il trouve que depuis l’avènement des 30 et 31 octobre, un nouveau type de Burkinabè est né. « Si je ne condamne pas un putsch, cela fait-il de moi un putschiste ? », interroge-t-il. Pour Me Seydou Roger Nyamba, « l’heure de la pensée unique est révolue ». Après cet épisode, la parole revient au parquet militaire qui tente de comprendre la répartition qui a été faite des 50 millions reçus par Léonce Koné et dont Emile Kaboré était le trésorier. Le parquet veut savoir qui est Emile Kaboré. « Emile Kaboré est membre d’un parti politique avec lequel on avait une alliance en construction », répond Léonce Koné qui ajoute que « les 50 millions ont été répartis de la façon suivante : 20 millions ont été destinés aux activités du CDP, 5 millions à la coordination des partis alliés et le reliquat affecté à d’autres besoins en cas de nécessité ». Le parquet, lui, réplique par une déclaration faite par Herman Yaméogo, qui indique que « 25 millions ont été affectés aux activités du parti et 25 autres aux activités des partis alliés ». « Oui, c’est juste », répond Léonce Koné qui déclare qu’il n’y a pas de différence avec ce qu’il vient de dire. Mais le parquet estime qu’il y a bien une différence.
L’ancien dirigeant du CDP, par intérim, est aussi accusé de coups et blessures sur 42 personnes. Léonce Koné ne reconnaît pas avoir commis de tels actes pendant les évènements. « Pendant les évènements, j’ai fait de la politique », affirme-t-il. Et il insinue n’avoir incité personne à donner des coups parce que cela est contraire à sa culture politique. « Au contraire, c’est ceux qui sont nos adversaires politiques qui se sont montrés adeptes de la violence politique », martèle-t-il. En tout état de cause, le parquet relève que compte tenu du fait que l’accusé est poursuivi pour « complicité d’attentat à la sûreté de l’Etat », au regard des évènements et des déclarations de l’accusé, il est aussi coupable de coups et blessures volontaires parce que l’infraction continue jusqu’à un certain moment. Et selon le parquet, la culpabilité de Léonce Koné se justifie « à partir du moment où ils ont décidé de mobiliser leur troupe pour qu’on sache qu’ils ont des positions à défendre ». Après l’intervention du parquet, Me Antoinette Ouédraogo pose une série de questions à son client : « Qu’avez-vous fait matériellement pour mobiliser vos militants à Ouagadougou ? » « A titre personnel, je n’ai pas participé à effectuer le travail de mobilisation. Ce n’est pas mon rôle », répond Léonce Koné. Quoi qu’il en soit, il est « pleinement solidaire des militants du CDP qui ont manifesté contre l’exclusion à Laïco. Ils ont exercé leur droit à la liberté d’opinion ». L’avocat continue : « Pensez-vous que les 50 millions aient servi à mobiliser des manifestants ? » En réponse à cette question, Léonce Koné, dit : « je ne sais pas ». Il reprend : « même si c’est le cas, je ne vois pas l’infraction. Est-ce seulement une partie du peuple qui est libre de manifester ? » Une interrogation qui fait réfléchir plus d’un dans la salle, alors que Me Prosper Farama revient à la charge : « Est-il susceptible d’avoir des dégâts à la suite d’un coup d’Etat ? » L’accusé reconnaît que c’est susceptible d’arriver. Et Me Prosper Farama de faire remarquer qu’il ne va pas reprocher à Léonce Koné d’avoir tiré sur les gens ou tabassé des manifestants. « Mais s’il était démontré que les coups et blessures résultaient de l’infraction du coup d’Etat manqué, vous êtes aussi responsable des coups et blessures volontaires », conclut Me Prosper Farama.

Françoise DEMBELE et Issa SIGUIRE

Le plan de monsieur HY

Selon l’expertise du téléphone portable de l’accusé Léonce Koné, il a reçu un message envoyé par un certain HY.
« Président, je suis obligé de vous joindre directement. L’heure est grave. Aucun militaire ne répond aux appels. Le colonel Kieré et le capitaine Dao sont injoignables. Il y a une mobilisation aux allures d’insurrection ce matin à la place de la nation. Le CDP tient une rencontre depuis 7 h à la salle des banquets. Si on n’est pas sûr de bien mobiliser, il faut au moins chercher la sympathie de certaines personnes. Cela passe par la Com sur les réseaux sociaux. Il faut consacrer la nuit à d’autres actions ou à défaut, avoir la sympathie de plusieurs personnes. Il faut neutraliser les donneurs d’ordre, procéder à la soumission de toute l’armée à un seul chef, prendre le contrôle des écoutes et quadriller la ville, notamment les quartiers périphériques. »
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