Assurément, l’Egypte traverse là une des plus graves crises politico-institutionnelles de l’époque contemporaine. Survenue lors du printemps arabe, dans le premier trimestre de l’année 2011, la révolution égyptienne, qui a chassé le Raïs, connait, depuis un certain temps, des rebondissements spectaculaires au point de faire perdre à nos fins analystes politiques du Moyen orient leur latin. En tout cas, le processus démocratique, engagé par les Frères musulmans avec leur tête Mohamed Morsi, a très vite désenchanté plus d’un. Ces derniers se sont illustrés, lors de leur passage à la tête du pays, par des lois antipopulaires et liberticides. Toute chose qui a obligé les masses populaires à reprendre du service à la fameuse place Tahrir, devenue le symbole de la lutte révolutionnaire et émancipatrice. Très vite, Morsi et ses affidés ont été contraints par les manifestants, soutenus par l’armée, à quitter le pouvoir. S’ouvre ainsi une nouvelle ère, par ailleurs, pleine d’incertitudes. Puisque, les pro-Morsi, selon l’expression consacrée des supers analystes des chaines internationales, n’ont pas fait dans la dentelle pour exprimer leur désapprobation à la déculottée infligée à leur leader et subséquemment à tous ses affidés qui y gravitaient. Une situation que l’armée considère comme un affront, voire une déclaration de guerre, si on n’en abuse. Quelques jours après avoir occupé des places publiques de la capitale et de certaines provinces, les Frères musulmans seront sommés par les nouvelles autorités de quitter les lieux et de rejoindre leurs domiciles et ou leurs lieux de travail. Une injonction tombée dans l’oreille d’un sourd et il a fallu que l’armée utilise un argument solide, celui de la force. Et ce qui devrait arriver, arriva. Des répressions, disons, des affrontements sanglants et meurtriers ont sanctionnés les heurts. Et voilà le Nil rougit du sang de ses fils. La sanction des dieux s’étant abattue sans outre mesure.
D’ailleurs, toute la semaine écoulée aura été très agitée entre les Frères musulmans et les autorités, majoritairement issues du rang de l’armée. Les premiers cités, bien que connaissant des pertes en vies humaines très importantes, défient toute autorité publique en s’adonnant à leur sport favori, c’est-à-dire continuer à occuper les lieux publics pour se faire entendre dans l’espoir de harasser les hommes forts de Caire. Que dalle ! Car, le général Abdel Fatah Al-Sissi, chef de l’armée est, on ne peut plus clair. « Quiconque imagine que la violence fera plier l’Etat et les Egyptiens se trompe. Nous ne resterons pas les bras croisés devant la destruction de la Nation», a-t-il prévenu le 18 août dernier en promettant à ceux qu’il qualifie « d’islamistes », une riposte « des plus énergiques ». Cette offensive, cette carte de fermeté du nouvel homme fort de l’Egypte semble bien fonctionner. En tout cas, elle a eu raison des Frères musulmans qui, visiblement, ont constaté le dégonflement de leur rang. Là n’est pas le problème. La véritable inquiétude réside dans la solution de sortie de crise. C’est vrai qu’il y a eu des crimes, c’est aussi vrai que les préjudices sont énormes, mais le droit et la justice ne peuvent être rendus que dans le cadre d’un Etat organisé. C’est pourquoi, les Egyptiens, toute tendance philosophique, politique et religieux confondue, doivent savoir que l’heure n’est plus aux manifestations partisanes ou de vengeances. Il faut dorénavant se tourner vers la reconstruction du pays pour le doter d’un soubassement à même de tenir le grand pharaon tanguant. L’histoire nous enseigne qu’il y a un moment pour s’affronter, mais un autre aussi, le plus important, pour discuter de l’avenir du pays et de la cohésion nationale. Alors, pour peu que les acteurs soient tous soucieux du fonctionnement du pays et de la fin de la crise, ils doivent, hic et nunc, faire fi de toutes les divergentes, sur fonds d’intérêts nombrilistes, pour résolument privilégier l’intérêt supérieur de la Nation.
Et pour y parvenir, l’action de la communauté internationale ne doit pas être négligé même si par endroit, au regard des intérêts importants des puissances occidentales dans ce pays, et de la position géographique de l’Egypte dans le Moyen orient, elle s’intéressera plus à ses intérêts qu’à l’avenir réel du pays. Qu’à cela ne tienne, l’objectif, c’est de sortir le pays du bourbier dans lequel il se trouve. Toute chose qui pourrait remettre l’Egypte sur les rails de son développement, car sans la communauté internationale, il n’est pas envisageable de penser que les Egyptiens à eux seuls pourraient s’asseoir sur une même table pour discuter de leurs divergences. Certes, la solution endogène est la seule qui puisse mettre fin au conflit, mais il faut au préalable un arbitre impartial .
La Rédaction