Ouagadougou, -L’ex chef de desk politique du quotidien l’Observateur Paalga, Adama Ouédraogo dit Damiss a nié mardi, toute implication dans le putsch manqué de septembre 2015 mais est rattrapé par des propos du Général Gilbert Diendéré.
Devant la barre du Tribunal militaire de Ouagadougou, le journaliste Adama Ouédraogo dit Damiss a nié avoir rédigé ou corrigé la déclaration du Conseil National de la Démocratie (CND) qui avait renversé le régime de Transition en septembre 2015.
Et pourtant, le Général Gilbert Diendéré dans son interrogatoire au fond, a indiqué qu’il a demandé à Adama Ouédraogo dit Damiss de recenser des griefs politiques sur la gestion de la Transition, a rappelé le parquet militaire.
«Après, j’ai jeté des idées et Damiss a rédigé le brouillon de la déclaration du CND. Le 16 septembre, on s’est retrouvé au camp, on y a ajouté les préoccupations des militaires», aurait déclaré le Général Diendéré, selon le parquet militaire.
Cependant, le parquet militaire a précisé qu’une année après cette déclaration, le Général Gilbert Diendéré a donné une autre version dans une autre déposition.
Il ne dit plus que Damiss a rédigé le brouillon de la déclaration du CND mais que lui-même s’est inspiré des analyses et échanges qu’il a eus avec Adama Ouédraogo dit Damiss, pour la rédaction de la déclaration du CND.
Le journaliste Adama Ouédraogo dit Damiss reconnait s’être rendu dans la nuit du 16 septembre 2015 vers 23 heures au camp Naba Koom 2.
Le journaliste a assuré qu'il était à la recherche d'informations sur la rencontre de médiation qui était menée par l’ancien président Jean Baptiste Ouédraogo, l’archevêque de Bobo-Dioulasso Monseigneur Paul Ouédraogo, le chef d’État-major général des Armées (CEMGA) Pigrenooma Zagré.
L’accusé dit n’avoir pas pu accéder à la salle de réunion et après un moment d’attente sans obtenir aucune information, il serait reparti chez lui car dira-t-il, le lendemain, il devait se rendre à Bobo-Dioulasso pour les funérailles de son beau-père.
Pour le parquet militaire, si l’accusé s’est rendu au camp Naba Koom 2 à une heure aussi tardive en ce jour spécial, c’est qu’il y était attendu.
Dans un proverbe en dioula, Adama Ouédraogo dit Damiss a affirmé que «ce n’est pas parce que je suis accroupi que je suis en train de déféquer» pour dire que ce n’est pas parce qu’il était au camp Naba Koom 2, qu’il est un putschiste.
«Si le parquet estime que je suis coupable parce que je suis allé là-bas, donc Zagré (l’ex CEMGA), Monseigneur Paul Ouédraogo (l’Archevêque de Bobo-Dioulasso), Jean Baptiste Ouédraogo (ancien président), Alassane Moné (ancien secrétaire du ministère de la Défense) sont aussi coupables», a-t-il affirmé.
L’avocat de la partie civile, Me Guy Hervé Kam s’est étonné que Adama Ouédraogo dit Damiss ait été le seul journaliste présent au camp cette nuit, alors qu’il y avait plus de 500 journalistes présents ce jour-là à Ouagadougou dans le cadre du Festival international de la liberté d'expression et de la presse (Filep).
A cela, l’accusé a affirmé qu’il s’est rendu au camp Naba Koom 2 en ignorant ce qui s’y passait tout comme il s’était rendu au camp Guillaume en fin octobre 2014, tout en ignorant selon ses dires, que le Lieutenant-colonel Yacouba Isaac Zida assisté de Guy Hervé Kam préparaient «un coup d’Etat» contre le Général Honoré Nabéré Traoré qui venait de prendre le pouvoir au nom de l’armée, suite à la démission du président Blaise Compaoré.
Se sentant indexé par cette affirmation, Me Guy Hervé Kam a répondu l’accusé également dans un proverbe en dioula.
«Pendant qu’on juge la sorcière, elle dit qu’il veut pleuvoir», a-t-il affirmé pour dire que Adama Ouédraogo joue à la diversion.
Au moment du putsch manqué, Adama Ouédraogo dit Damiss a reconnu avoir reçu la somme d’un million de FCFA des mains du protocole du Général Djibril Bassolé au nom de ce dernier.
Une somme qui devrait servir selon le parquet militaire à motiver les journalistes pour soutenir les putschistes.
«Je n’ai pas reçu l’argent pour soutenir quelqu’un», a réagit l’accusé qui met au défi tout journaliste qui aurait reçu de l’argent de sa part afin de soutenir le putsch, de venir témoigner contre lui.
Adama Ouédraogo dit Damiss a expliqué qu’il a reçu cette somme parce qu’il avait rédigé avant le putsch, un document de stratégie de communication pour le Général Djibril Bassolé à la demande de son épouse. La somme n’est nullement liée au putsch, a-t-il tenu à préciser.
«Je connais le Général Bassolé depuis Nouna. Pour moi il est plus un oncle qu’un homme politique», a-t-il affirmé.
Adama Ouédraogo dit Damiss a aussi nié avoir fuit du Burkina Faso, estimant que «ce sont des ragots de bar».
«Je n’ai pas quitté le Burkina Faso. J’étais en congé». Il a profité de ses congés, selon ses dires, pour aller se faire soigner de son mal d’asthme au Mali, au Maroc et à Abidjan en Côte d’Ivoire.
Selon lui, c’est à Abidjan, qu’il a appris qu’il était cité dans le dossier du putsch, et immédiatement, il a écrit au directeur de la justice militaire qu’il a joint par la suite au téléphone pour lui expliquer les raisons de son absence du pays.
«J’ai même informé du jour de mon retour et à mon arrivée, c’est moi-même qui ait bousculé la gendarmerie pour être auditionné», a-t-il affirmé.
Malgré, «toute sa bonne foi», l’accusé affirme que «grande a été sa surprise» de constater qu’on soit venu l’arrêter un jour comme «un chef de gang».
«Pendant l’audition, j’ai présenté tous les documents médicaux nécessaires pour montrer que j’étais malade mais le juge n’a pas pris la peine de vérifier», a-t-il déploré.
Adama Ouédraogo dit Damiss est poursuivi pour complicité d’attentat à la sureté de l’Etat, meurtre sur 13 personnes, coups et blessures volontaires sur 42 personnes.