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Procès du putsch manqué: Le colonel Sita Sangaré et l’expert informatique Younoussa Sanfo accusés de faux et usage de faux, de pillage de deniers publics

Publié le mercredi 12 septembre 2018  |  Net Afrique
Le
© Autre presse par DR
Le colonel Sita Sangaré
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Narration du Lieutenant LIMON K Jacques devant la Chambre de Jugement.

Monsieur le Président, Monsieur le Conseiller, Messieurs les juges assesseurs Militaires ;

Vendredi dernier, à cette même barre, je n’ai pas voulu répondre clairement à certaines questions de la défense et de la partie civile, non pas que je cache des choses ou que je veuille protéger quelqu’un mais parce que je ne voulais pas étaler aux yeux de l’opinion nationale et internationale, des affaires sales dont l’auteur principal est un officier de l’armée de surcroit magistrat, donc homme de droit, et président de la Fédération burkinabè de football, j’ai nommé le colonel Sita Sangaré.

A présent, j’ai décidé de dire tout avec des précisions afin que votre juridiction apprécie.
Mais avant de poursuivre, je voudrais que le parquet militaire me confirme que c’est bien à la date du 30 mars 2016 que l’expert a déposé son rapport sur l’investigation électronique. Si le parquet peut également donner avec précision l’heure du dépôt du rapport.

Monsieur le président,
Ma demande n’est pas fortuite. Elle permet de poser des questions légitimes. Le rapport a été déposé le 30 mars 2016, à…… Mais chose curieuse, c’est le 31 mars 2016, soit moins de 24 heures après que j’ai reçu une convocation (que voici) du juge Sébastien Rapadamnaba pour m’entendre le 4 avril 2016 dans l’affaire ministère public contre Gilbert Diendéré et autres.

Monsieur le président, le rapport contient l’expertise de plusieurs dizaines de téléphones portables et d’ordinaires. Dans le lot, ne figurent ni le téléphone ni l’ordinaire ni un quelconque appareil électronique du lieutenant Jacques Limon. En plus, le rapport est volumineux (nombre de pages à préciser). A quel moment les juges ont pu éplucher le document pour ensuite délivrer immédiatement une convocation pour entendre M.Limon Jacques comme si le rapport d’expertise concernait uniquement ma seule personne. Tout ce qui a été lu ici comme SMS aurait été extrait du téléphone du capitaine Zoumbri. Il y a là des éléments probants qui montrent clairement que c’est un acharnement contre ma personne. Vous conviendrez avec moi, monsieur le président, que ce n’est pas le rapport d’expertise qui a prévalu à ma convocation mais bien la volonté de se venger parce que j’ai refusé de marcher dans une combine pour piller les deniers publics.

Lorsque je me suis présenté le 4 avril 2016, à ma grande surprise le juge Sébastien Rapadamnaba, dit que ce n’est pas lui qui m’a convoqué mais le juge Frédéric Ouédraogo. Pourtant c’est bien le nom du magistrat Sébastien Rapadamnaba qui est sur la convocation. Est-ce à dire qu’après réflexion, lui aussi ne voulait pas rentrer dans cette affaire ? La question mérite d’être posée. Je suis donc allé voir le juge Frédéric Ouédraogo et entre temps, Sébastien Rapadamnaba est venu se joindre à nous. Mais mon audition a été reportée.

Je précise au passage que si je n’ai pas été déposé à la MACA, c’est parce que les gros poissons ont refusé de répondre aux convocations des juges alors que nous étions sur la même liste. Et avec la présence de la presse devant la justice militaire, il était difficile de me décerner un mandat de dépôt sans créer un grand événement médiatique.
Monsieur le président, je vais aller plus loin dans les détails pour vous étayer davantage la thèse du complot contre moi. Je disais vendredi et tout à l’heure que j’ai refusé de suivre le colonel Sangaré dans son deal avec Younoussa Sanfo. Je vais vous éclairer davantage.

Les arguments développés par le parquet tendant à faire croire que je bloquais la procédure de passation du marché de l’expert parce que je me sentais concerné n’est pas du tout vrai. Il y a dans les documents que mon avocat vous a transmis, une lettre du Directeur Général du Contrôle des Marchés Publics et des Engagements financiers du Ministère des Finances qui stipule clairement que nous devons faire respecter les règles générales en matière d’emploi des fonds publics. Moi je n’ai fait pas qu’appliquer.

Ce fameux marché était un deal monté de toutes pièces entre le Colonel SANGARE Directeur de la Justice Militaire, monsieur SANFO Younoussa et le juge d’instruction OUEDRAOGO Frédéric. Le 19 octobre 2016, le Colonel SANGARE adressait un courrier ( dont voici copie) dans laquelle il demandait au ministre de la Défense la somme de Trois cent quarante sept millions neuf cent trente cinq milles trois cent trente cinq (347 935 335) pour le déplacement d’ingénieurs occidentaux ainsi que l’acquisition d’un matériel de travail adéquat pour l’expertise des téléphones et ordinateurs.

Le colonel Sangaré précise dans sa lettre en disant ceci : « s’il est vrai que ladite somme parait élevée compte tenu de la modestie des moyens du pays, il n’en demeure pas moins qu’au regard des enjeux considérables que revêt l’enquête en cours, il est nécessaire de mettre tous les moyens demandés à la disposition des experts » Fin de citation. C’est dire combien le directeur de la justice militaire tenait à obtenir ces sous. Mais il y a plus grave, monsieur le président. La lettre de Sita Sangaré date du 19 octobre 2015. Or la facture de Sanfo Younoussa date du 30 octobre 2015. Comment se fait-il que la lettre adressée au ministre de la défense datant du 19 octobre 2015 contienne le montant réel d’une facture qui n’avait même pas été faite. C’est 11 jours après la lettre au ministre de la Défense que Younoussa Sanfo a déposé sa facture. Tout porte à croire que le directeur de la Justice militaire a inventé un montant et l’expert Younoussa Sanfo devait s’y conformer. Si ce n’est pas le cas, qu’on m’explique pourquoi la lettre adressée au ministre de la Défense est antérieure à la facture.

Mais il y a pire, sur la facture de Younoussa Sanfo, on note au niveau de l’objet ceci : « Facture investigations électroniques en appui aux enquêteurs et à la justice militaire ». Or dans la lettre du colonel Sita Sangaré au ministre de la Défense, le motif évoqué pour débloquer ce montant faramineux, c’est le déplacement d’ingénieurs occidentaux ainsi que l’acquisition d’un matériel de travail adéquat pour l’expertise des téléphones et ordinateurs. Un montant, deux objets ou motifs différents. En plus de cela, il y a des anomalies sur la facture qui sautent à l’œil. Même une vendeuse de galettes ou beignets ne ferait pas une telle facture.
Monsieur le président, je vous demande de suivre la lecture de la facture avec moi.

Dans la rubrique désignation, il est écrit « Investigation à partir de numéros de téléphones ou de noms de personnes afin de localisation ». Ensuite pour la même rubrique, au titre des quantités, on met forfait. Monsieur le président, depuis quand il y a des forfaits concernant des quantités ? Je poursuis, avec un autre point « Investigation sur les ordinateurs en vue d’extraire des données supprimées ou cryptées », là également on a écrit forfait. On doit quand même préciser le nombre d’ordinateurs devant faire l’objet d’expertise. Dans toutes les rubriques « quantité », il est écrit « forfait » alors que la quantité représente un nombre. Quant à la rubrique sur les prix unitaires, on a mentionné des montants en euros. Pourquoi en euros et pas en FCFA? C’est l’ensemble des prix unitaires cumulés qui donnent 530 424 euros soit 347 935 335 de francs CFA. Tout porte à croire que le montant a été communiqué au ministre et il fallait que la facture corresponde au montant déjà arrêté et comme il est difficile alors on invente des choses qui n’existent nulle part en comptabilité. Je ne pouvais donc pas valider la signature d’un tel document basé sur du faux d’où mes ennuis judiciaires, d’où l’acharnement contre moi.

Monsieur le président, vous avez entre vos mains, l’ensemble des documents, courriers et factures, il appartient à votre juridiction d’apprécier.

Plus loin, vous verrez que depuis le 17 septembre 2015, date officielle de la proclamation du CND, soit le lendemain du coup d’Etat le sieur SANFO avait déjà reçu une mission par lettres numéros 2015-359 et 359 bis de faire une investigation relative au putsch. Jugez-en vous-même la crédibilité et la véracité monsieur le Président qui donnait déjà le montant de la facture, soit 347 935 335 francs alors que le devis même signé de SANFO Younoussa date du 30 octobre 2015 comme je l’ai expliqué plus haut.

Donc ayant découvert tout ça, ils ont monté leur scénario pour m’enfermer et continuer leurs deals. En plus j’étais au courant des 239 millions qu’ils avaient déjà pris et qu’ils devaient nous faire parvenir les pièces justificatives. J’étais l’homme à abattre par tous les moyens. Malheureusement ils ont réussi leur coup en faisant croire au Ministre de la Défense que j’étais mêlé au coup d’Etat pour me faire relever de mon poste afin d’effacer toutes les traces de leurs malversations.

Ce complot a été monté par trois personnes, le Colonel SANGARE Sita, monsieur SANFO Younoussa et le juge d’instruction OUEDRAOGO Frédéric.
Je confirme ici les dires de mon avocat : le Colonel SANGARE m’a appelé, il m’a proposé qu’on aille voir Younoussa Sanfo pour résoudre ce problème, nous sommes allés chez lui à la maison un jour en début de soirée, donc nuitamment comme l’a dit Me Farama. Mais en fait j’ai senti qu’ils voulaient faire taire l’affaire définitivement. Et comme je faisais de la résistance, alors il faut me noyer.

Le Colonel m’a effectivement proposé de payer mon avocat, il m’a dit de dire à l’avocat de passer le voir. Je n’ai pas marché dans cette combine. J’ai toutefois informé mon avocat qui m’a dit qu’il n’ira jamais le voir et que même si je n’ai pas d’argent, on va s’arranger pour qu’il me défende comme il se doit.
Le juge Frédéric Ouédraogo m’a dit face à face dans mon bureau que le document de Younoussa Sanfo n’était pas crédible et qu’aucun juge n’a demandé ça et que c’est le colonel Sita SANGARE qui lui ai donné des instructions il a obtempéré parce que c’est son chef.
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