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Projet de retrait des terres arables aux fermiers blancs

Publié le vendredi 7 septembre 2018  |  Le Pays
Echanges
© aOuaga.com par Edem Gadegbeku / Parfait
Echanges croisés entre journalistes et communicateurs ouest-africains autour du phénomène de la dégradation des terres
Lomé, du 3 au 7 octobre 2016. Hôtel IBIS. Atelier sous-régional de renforcement des capacités des hommes et femmes de média et de communicateurs sur la thématique de Gestion Durable des Terres et des Eaux (GDTE) dans les pays SAWAP (Programme de la Banque Mondiale/FEM pour le Sahel et l’Afrique de l’Ouest -Sahel and West Africa Programme-). Atelier pratique s`inscrivant dans le cadre de la mise en oeuvre du BRICKS (Projet de Renforcement de la résilience par le biais de services liés à l’innovation, à la communication et aux connaissances) par le CILSS, l`OSS et l`UICN-PACO.
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Ramaphosa danse sur un volcan

Près d’un quart de siècle après la fin de l’Apartheid en Afrique du Sud, la question foncière refait surface et de la plus belle des manières. En effet, le successeur de Jacob Zuma, Cyril Ramaphosa, croit dur comme fer que le retrait et la redistribution des terres arables aux populations noires permettront de donner un coup de fouet à l’économie sud-africaine. Et ce n’est pas tout ; pour les dirigeants sud-africains, ce projet permettra de réparer une injustice, parce que la population blanche détiendrait jusque-là, 73% des terres agricoles. Ils promettent même de saisir et de redistribuer, s’il le faut, les terres sans aucune compensation pour les propriétaires de descendance européenne, qui auraient spolié les populations noires de leurs terres. La question agraire est si sensible dans la Nation arc-en-ciel que l’on se demande si ce projet ne provoquera pas un schisme social. S’agit-il d’un effet d’annonce ou d’une annonce sans effet? En attendant que le temps nous en donne la réponse, l’on peut déjà dire qu’en faisant de la récupération des terres des fermiers blancs, l’une de ses priorités, Cyril Ramaphosa danse sur un volcan. Cela est d’autant plus vrai que la question déchaîne déjà les passions au pays de Nelson Mandela et même au-delà. Le très controversé locataire de la Maison Blanche, Donald Trump, pour ne pas le nommer, n’y a-t-il pas mis son grain de sel à travers un tweet dont le contenu a poussé les dirigeants sud-africains à lui répliquer vertement ? Si le retrait et la redistribution des terres agricoles peuvent contribuer à l’élimination des inégalités entre populations noire et blanche, il faut cependant craindre deux choses essentielles. La première, c’est que ce projet pourrait être exploité à des fins électorales. Car, plus d’un observateur de la scène politique sud-africaine sait que la question foncière mobilise les populations noires dont la majorité pense que la misère dans laquelle elle croupit depuis des décennies, n’a pas d’autre origine que les fermiers blancs.

Dans la pratique, les choses risquent d’être difficiles

Et Cyril Ramaphosa qui a pris les rênes de l’ANC au moment où ce parti historique a perdu beaucoup de militants et sympathisants et continue d’en perdre, pourrait bien s’en servir pour garantir son élection à la présidentielle de février prochain. La seconde chose, c’est que l’Afrique du Sud pourrait être victime du syndrome zimbabwéen. Car, rien ne garantit que les paysans noirs qui bénéficieraient des terres retirées des mains des fermiers blancs, pourront les exploiter de façon optimale. Or, s’ils n’y arrivent pas, cela pourrait, à l’instar du Zimbabwe, créer un désastre pour les populations noires qui peinent à joindre les deux bouts. Autant dire que le retrait pur et simple des terres aux fermiers blancs n’est pas la solution au problème sud-africain. En vérité, ce projet traduit l’échec des politiques agraires mises en œuvre depuis l’arrivée de l’ANC au pouvoir. On se rappelle la promesse de l’Etat sud-africain, en 1994, de régler le problème à travers l’instauration d’un système de vente et d’achat de terres agricoles sur une base volontaire. Si on en vient, 24 ans après à parler de retrait de terres, c’est que la mayonnaise n’a pas pris. Mais pouvait-il en être autrement avec la mal gouvernance dont ont fait montre les successeurs de Nelson Mandela? Si Cyril Ramaphosa peut s’arc-bouter sur d’éventuels textes pour exproprier les fermiers blancs de leurs terres sans compensation, il reste que dans la pratique, les choses risquent d’être difficiles, étant donné que certains d’entre eux ont fait des investissements énormes sur leurs terrains. Au-delà de ces aspects pécuniaires, Cyril Ramaphosa qui veut marcher sur les pas de Mugabe, doit comprendre qu’il pourrait perdre des plumes dans cette affaire. En tout cas, il sera, et c’est certain, le mouton noir des Occidentaux et traité comme tel. Si l’ex-président zimbabwéen, Robert Mugabe, a longtemps été diabolisé par les puissances étrangères, c’est justement à cause de sa politique agraire semblable à celle que veut mener aujourd’hui Ramaphosa. Du reste, si Nelson Mandela a été aussi célèbre et respecté des Blancs, ce n’est pas à cause de ses beaux yeux mais bel et bien parce qu’il avait fait l’option de la pédale douce en n’expropriant pas les fermiers. S’il avait abordé de façon frontale et brutale la question foncière, il n’aurait jamais eu cette aura mondiale qui fut la sienne. Et Cyril Ramaphosa le sait mieux que quiconque.

Dabadi ZOUMBARA
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