L’audience du mercredi 5 septembre 2018 du procès du putsch manqué a notamment été consacrée à l’interrogatoire du caporal Massa Saboué, le seul conducteur à être poursuivi sur les trois au service du général Gilbert Diendéré.
Le mercredi 5 septembre 2018, aussitôt l’audience ouverte, le procureur militaire Aloun Zanré a requis et obtenu une suspension à partir de 13 heures, pour permettre au juge assesseur, le colonel Ludovic Ouédraogo, de préparer les obsèques de sa mère décédée dans la nuit du 1er septembre. Passé cela, l’interrogatoire du caporal Massa Saboué, conducteur du général Gilbert Diendéré de 2008 jusqu’au moment du coup d’Etat, commence. L’accusé nie les faits de complicité d’attentat à la sûreté de l’Etat, de meurtre et de coups et blessures volontaires mis à sa charge. De sa narration, l’on retiendra que dans l’après-midi du 16 septembre 2015, le caporal a été instruit par son chef, l’adjudant-chef Vincent Simporé, de rejoindre son service, le domicile du général Diendéré, car « ça n’allait pas » au camp Naaba Koom II et le quartier était consigné. Massa Saboué conduira Diendéré le 19 septembre matin puis du 27 au 29 septembre. A cette dernière date, ils seraient allés au camp jusqu’à 16h. De là, ils se seraient rendus à l’ambassade des USA, ensuite à la villa Kilo pour se mettre en tenue civile et partir à la Nonciature, avec à leur trousse, « un bastion de l’armée régulière qui tirait ». En outre, les obus pleuvaient de partout. De la Nonciature, l’accusé s’est réfugié à la Cour d’appel où il a « abandonné » sa tenue militaire qui était dans son sac. Affecté, il se serait rendu à son nouveau poste à Bobo-Dioulasso le 3 octobre. Le 6 octobre, il tente, selon le parquet, de s’en fuir en Côte d’Ivoire. Mais il est arrêté à la gare. Pourquoi continuer de conduire le général tout en sachant qu’il a fait un coup d’Etat, dont les médias parlaient et alors que le chef d’Etat-major appelait tous les éléments du RSP dissous à rejoindre leurs nouveaux postes ? A cette question du parquet, l’accusé a répondu que c’est bien après que les faits ont été qualifiés de putsch. « Mon chef m’avait mis à la disposition du général. Je n’avais pas le temps d’écouter », a détaillé M. Saboué. Et d’ajouter qu’il s’est « strictement » comporté en militaire en continuant de conduire Diendéré en l’absence d’ordre contraire de son chef.
Quand Me Babou Bama s’insurge
Au sujet des raisons de sa fuite à l’étranger, le caporal a tablé sur l’impossibilité pour lui de vivre décemment sans les indemnités-RSP et sous de gros prêts bancaires. Les parquetiers ont aussi questionné le caporal sur des appels téléphoniques qu’il a effectués avec une certaine Fatimata Thérèse Diawara. Mais le conseil commis de l’accusé, Me Babou Bama s’est insurgé contre cela, car le contenu desdites conversations n’est pas dans le dossier à lui transmis. Il a, du reste, exigé que la pièce y relative lui soit communiquée aux frais de l’Etat comme le prévoit la loi. Le tribunal lui a demandé de patienter jusqu’à ce que ladite pièce soit opposée à M. Saboué. Quant aux avocats de la partie civile, ils sont revenus sur les déclarations du prévenu pendant l’instruction. « Avez-vous retrouvé l’amour de la tenue militaire que vous aviez perdue à la dissolution du RSP ? », a interrogé Me Séraphin Somé. « Grâce à Dieu, je suis toujours en tenue », a répliqué l’accusé. « La perte des indemnités était-elle aussi le motif de la persistance des éléments du RSP dans le coup d’Etat ? » A cette demande de Me Prosper Farama, le caporal a été sans réponse. Dans ses observations finales, le conseil de Massa Saboué a noté que son client est le seul des trois conducteurs du général Diendéré à être poursuivi. Lorsque dans ses observations en réponse au parquet l’avocat a dit : « le général est là, il est toujours général », il y a eu un geste d’approbation de Diendéré et des applaudissements dans le box des accusés.
Il a fallu une suspension de l’audience et des rappels du président du tribunal pour que la sérénité revienne dans la salle.
A la suite du caporal Massa, le tribunal a entamé l’interrogatoire du sergent Mahamadi Zallé, qui se poursuivra le vendredi 7 septembre à partir de 9h.