Accueil    MonKiosk.com    Sports    Business    News    Annonces    Femmes    Nécrologie    Publicité
NEWS
Comment

Accueil
News
Politique
Article
Politique

Putsch manqué de 15 septembre 2015 : Affecté le 14 au RSP, le sous-lieutenant Siebou Traoré se retrouve dans le coup

Publié le mercredi 5 septembre 2018  |  Le Pays
Procès
© FasoZine par DIMITRI KABORÉ
Procès putsch manqué: l’interrogatoire des accusés débutera le mardi 12 juin
Comment


Deux accusés ont été entendus à la barre ce 3 septembre 2018 au tribunal militaire dans la salle des banquets de Ouaga 2000. Un sous-lieutenant qui a été affecté à l’ex-RSP 2 jours seulement avec les évènements du putsch manqué et un soldat de 1ere classe qui ne reconnaissent pas les faits qui leur sont reprochés.



L’audience de ce 3 septembre 2018 au tribunal militaire a commencé par la suite de l’audition du sergent-chef major Moutuan Koumbia , chef d’accompagnement du président Michel Kafando. Prenant la parole pour ses observations finales, le conseil de l’accusé, Me Timothée Zongo a fait savoir que « faire un putsch ce n’est pas prévoir des cadavres » quand on fait appel à l’histoire du Burkina Faso où des coups d’Etat ont déjà eu lieu sans qu’il n’y ait mort d’homme, dit-il.

Preuve n’a pas été faite des chefs d’inculpation pour lesquels son client est poursuivi, à l’entendre. A la fin de son audition, l’accusé a regretté et déploré les pertes en vie humaine, les blessés lors des évènements avant de présenter ses condoléances aux familles éplorées et souhaiter meilleure guérison aux blessés.

Après lui, c’est le sous-lieutenant Siebou Traoré, célibataire, père d’un enfant, qui vient à la barre pour répondre de trois chefs d’inculpation, à savoir : complicité d’attentat à la sûreté de l’Etat, meurtre, coups et blessures volontaires.

Avant tout propos, il mentionne ceci à la barre, à l’intention du président du tribunal : « si le fait d’exécuter les ordres des supérieurs le 16 septembre 2015 et jours suivants est condamnable pénalement, je demande pardon ». Officier d’active fraîchement sorti de l’Académie militaire Georges Namoano de Pô, Siebou Traoré, serein devant le tribunal, rejette les faits qui lui sont reprochés.

Il a porté ses galons de sous-lieutenant le 1er octobre 2015, quelques jours donc après les évènements du putsch manqué, selon ses déclarations. Il a été affecté à l’ex-RSP le 14 septembre 2015 et n’était rattaché à aucun groupement quand les évènements commencent le 16 septembre 2015, date à laquelle il met pied au camp Naaba Koom le matin.

Il arrive pour la première fois au Conseil de l’entente le 17 septembre et fait une mission de contrôle de zone à la Place de la nation dans l’après-midi, pour y maintenir l’ordre, sur instruction du Lieutenant Philippe Ouattara.

Un lieu qu’il ne connaissait pas, selon son témoignage. Il indique n’avoir pris part ni au rassemblement du 16 septembre, ni à la rencontre des Sages avec le Général Diendéré. Du 18 au 20 septembre, sur instructions de ses chefs militaires, il fait des missions au cours desquelles il dit n’avoir jamais fait usage de son arme, son P.A. sauf que, de retour de la Place de la nation, vers le cité An III, 2 de ses éléments font des tirs en l’air face aux manifestants qui les lapidaient, selon son récit. Il a passé 2 nuits à la RTB télé pour appuyer des soldats qui s’y trouvaient.

Quand le parquet lui demande s’il connait les règles d’engagement en matière de maintien de l’ordre, il répond par la négative, parce qu’il n’as pas reçu d’enseignement à propos. Etes-vous formé au maintien de l’ordre ?

A cette question du parquet, le sous-lieutenant indique que l’officier est formé à tout. Le parquet lui rappelle que les militaires relèvent de la troisième catégorie en matière de maintien de l’ordre après la police et la gendarmerie et ils entrent en jeu exceptionnellement et sur réquisition préalable.

Le sous-lieutenant précise à ce propos que ça ne lui a pas été expressément dit « allez en maintien de l’ordre », mais il avait à l’esprit d’aller maintenir l’ordre du fait du risque d’affrontement à la Place de la nation que lui a dit son chef. Le lieutenant Zagré qui les a trouvés le 20 septembre à la place de la Nation leur a d’ailleurs donné des consignes en sa qualité de chef hiérarchique, de par le grade, se souvient-il.

Le parquet relève qu’il y a eu mort d’homme au niveau du Lycée Philippe Zinda Kaboré. Cela n’est pas le fait de mes hommes, répond le sous-lieutenant qui précise que son équipe n’a eu à faire aux manifestants qu’à la cité An III et n’a vu ni blessé ni cadavre chemin faisant. Y avait-il des manifestants place de la Nation ?

« Non », dit-il au parquet qui demande pourquoi alors il y est resté jusqu’au 20 septembre. En réponse, le sous-lieutenant, qui dit avoir exécuté des ordres, confie que cela dépend de la volonté du chef qui ordonne les missions. Appréciez-vous la légalité des ordres avant de les exécuter, veut savoir le parquet ?

« Si l’ordre m’était donné d’aller tuer, je ne le ferais pas », répond-t-il. Pour autant, l’accusé dit ne pas savoir quand est-ce que l’ordre est légal ou illégal puisqu’on ne lui a jamais appris cela à l’Académie militaire. Vous saviez manifestement en quoi l’ordre est bon ou irrégulier pour le service, lui signifie le parquet.

En réaction, l’officier subalterne confie : « on nous a appris que c’est le chef qui donne l’ordre qui apprécie l’intérêt de l’ordre. Moi je n’ai fait qu’exécuter des ordres ». Pour le parquet, un cours n’a pas sa place dans la hiérarchie des normes et les dispositions s’appliquent à tout le monde.

Quand avez-vous appris l’arrestation des autorités ? Réponse de l’accusé : le 16, j’ai appris qu’il parait qu’elles ont été arrêtées. Pour le parquet, les dispositions de l’article 30 rendent les militaires responsables des ordres exécutés, ils doivent obéissance à leurs chefs et la responsabilité propre du subordonné ne dégage pas le supérieur de la sienne.

Il fait observer que la présence du sous-lieutenant à la place de la nation est intimement liée aux évènements du 16 septembre et jours suivants. De ce fait, il invoque l’article 67 du Code de procédure pénale qui, à son avis, rend responsable le sous-lieutenant, coupable de complicité d’attentat à la sûreté de l’Etat. Le procureur ajoute que les conséquences prévisibles de cette complicité d’attentat sont les coups et blessures sur 42 personnes et le meurtre de 13 personnes.

« Il s’agit du menu fretin, les petites mains qui ont obéi à des ordres »



Pour le conseil de l’accusé, le parquet cherche des poux sur une tête rasée, et ne rentre pas souvent dans l’esprit du militaire, apparemment, selon lui. Il confie qu’on n’a pas besoin de faire un dessin pour que son client sache qu’il y avait un risque d’affrontement à la place de la nation.

Tout ce que le sous-lieutenant dit est sorti du cours de tactique à l’Académie militaire Georges Namoano, dit l’avocat qui fait observer que c’est à l’instruction que l’accusé a appris la notion de maintien de l’ordre. Par conséquent, il demande au parquet de ne pas trop chercher la petite bête concernant cet élève officier d’active qui venait de sortir de l’école.

Me Séraphin Somé, avocat de la partie civile veut savoir si l’accusé a eu un enseignement sur le devoir de responsabilité du subordonné. Question à laquelle le sous-lieutenant ne répond pas. Pour l’avocat, nul n’est censé ignorer la loi et « le subordonné doit faire preuve d’initiative réfléchie et se pénétrer de l’esprit des ordres ».

L’« intellectuel » (terme qu’il emprunte au conseil de l’accusé) qu’est l’accusé devait « se pénétrer de ce qu’il y a de caché derrière les ordres ». Le sous-lieutenant ayant exécuté des ordres alors qu’il savait l’arrestation des autorités le 16 septembre,est bien complice d’attentat à la sûreté de l’Etat, selon l’avocat.

Etiez-vous normalement équipés pour exécuter vos missions, veut savoir Me Farama Prosper ? « Je ne saurais répondre, parce que c’était ma première mission » dit l’accusé. L’avocat maintient que l’accusé a exécuté des ordres du 17 au 20 septembre à la place de la nation et le statut d’officier d’active ne change rien au statut de militaire.

En l’absence des cordelettes, qu’auriez-vous-vous fait pour empêcher un affrontement à la place de la nation avec des armes létales, poursuite Me Farama ? « C’était une présence dissuasive », lui répond l’accusé pour qui « la présence des Forces de défense dans un endroit suffit pour maintenir l’ordre ».

En mission ou pas, dès qu’un élément se déplace il a son arme, conclut-il. Un avis que me Farama ne partage pas, puisque des gens ont soutenu le contraire plus tôt à la barre. Il conclut à son tour que le sous-lieutenant sait apprécier l’ordre. Me Mamadou Sombié prend à nouveau la parole pour s’insurger contre la partie civile qui, à ses yeux, s’arroge un rôle qui n’est pas le sien, mais celui du parquet et du président du tribunal.

« Que les conseils de la partie civile reconnaissent leur place et ne soient pas plus royalistes que le procureur », se lâche-t-il. Et d’ajouter que « ce sous-lieutenant sera acquitté, il s’est retrouvé au mauvais endroit au mauvais moment », mentionnant que les éléments psychologique, moral, intentionnel sont à prendre en compte dans l’appréciation des actes posés par l’accusé.

A l’entendre, ce procès ne peut pas être un règlement de compte. Son client est « un néophyte » qui ne connaissait pas Ouagadougou et qui a pris fonction à l’ex-RSP 2 jours avant les évènements. Il est déboussolé, dit le conseil. « Il s’agit du menu fretin, les petites mains qui ont obéi à des ordres », mentionne-t-il. Il demande au tribunal de donner une chance à ce jeune officier dont l’armée a besoin pour la lutte contre le terrorisme. Un officier qu’il décrit comme « un professionnel plein d’humanisme ».

Le sous-lieutenant qui a rejoint son domicile le 26 septembre sur ordre du lieutenant Compaoré a rejoint son corps d’affectation le 30 septembre 2015, selon ses déclarations. Il confie qu’aucun appel à rejoindre les corps d’affectation n’a été lancé le 21 septembre par la hiérarchie militaire. « J’ai foi en vous et au tribunal et avec vous la vérité jaillira », dit l’accusé à l’intention du président du tribunal.

Avant de présenter ses condoléances aux familles des victimes et souhaiter prompt rétablissement aux blessés, il réaffirme n’avoir pas arrêté le président Michel Kafando, et par conséquent ne reconnais ni complicité d’attentat encore moins ses conséquences prévisibles.

A la suite du sous-lieutenant, c’est le soldat de première classe, Adama Kaboré, qui se présente à la barre pour répondre de cinq chefs d’inculpation, à savoir : complicité d’attentat à la sûreté de l’Etat, meurtre, coups et blessures volontaires, dégradation volontaire aggravée de biens, fourniture d’effets explosifs pour la dégradation des biens.

Ce soldat qui s’exprime en langue Mooré est assisté d’un interprète à qui il demande de dire au président du tribunal ne reconnaitre aucun de ces faits. C’est après cela que l’audience a été suspendue autour de 13h.
Commentaires