Ceci est une tribune du ministre des Affaires étrangères et de la coopération, Alpha Barry, à l’occasion du voyage du président du Faso, Roch Marc Christian Kaboré, en Chine. Selon le ministre, « le moment est historique, au regard des symboles et des particularités qui entourent ce déplacement ». Lisez plutôt !
Aujourd'hui mardi 28 août, le président du Faso entame, à bord de son avion, le long voyage qui l'amène à sa première visite en Chine. Dans deux jours, il devrait atterrir à Beijing ou Pékin en français. Si l'accueil à l'aéroport sera assez simple sur le plan protocolaire, l'atterrissage du Pic du Nahouri avec l'illustre personnalité qu'il transporte ne sera pas un fait banal. L'arrivée de cet avion aux parements rouge et vert (les couleurs nationales), frappé du nom du pays, est en soi un événement historique, à l'image de la visite elle-même. En effet, le moment est historique, au regard des symboles et des particularités qui entourent ce déplacement. D'abord à titre personnel, Monsieur Roch Marc Christian Kaboré ne s'est jamais rendu en Chine continentale. Ce voyage est donc une découverte pour lui. Au-delà des grands monuments historiques comme la Grande Muraille ou la Cité interdite, cette visite sera, pour la délégation burkinabè, la découverte d'un pays très moderne, une grande puissance économique, un pays qui a profondément changé depuis 25 ans environ. Cette visite du président Roch Marc Christian Kaboré sera la première d'un chef d'Etat burkinabè depuis 28 ans. L'interruption intervenue en 1994 dans les relations diplomatiques entre le Burkina Faso et la République populaire de Chine avait mis fin à toute visite, de part et d'autre, d'officiels de haut rang. Et c'est là que réside toute la charge symbolique et historique de cette visite longtemps attendue par nos amis de la Chine continentale. Ce n'est donc pas pour rien que cette visite a été placée juste avant le Forum sur la coopération Afrique-Chine (FOCAC) pour permettre au nouveau venu qui est le Burkina d'entrer en grande pompe dans cette grande famille sino-africaine. Ce n'est pas pour rien non plus que ce déplacement a été décrété en visite d'Etat avec un accueil et un banquet présidés en personne par le chef de l'Etat chinois, Xi Jinping, et aussi avec tout le cérémonial qui accompagne ce type de visite. Une visite d'Etat trois mois seulement après le rétablissement des relations diplomatiques entre nos deux pays le 26 mai dernier, c'est assurément le signe d'une amitié retrouvée, d'un moment qui était attendu par tous et sans doute d'une amitié qui ne s'était jamais rompue réellement entre deux peuples et deux nations. En trois mois, cette amitié retrouvée s'est d'abord illustrée par de nombreuses visites de membres du gouvernement de part et d'autre dont celle du Vice-Premier ministre Chunhua Hu en juillet dernier à Ouagadougou ; ensuite par de nombreuses missions dans les deux sens, qui consacrent la reprise de la coopération entre le Burkina et la Chine. Le rythme de travail entre les deux parties a permis d'arriver déjà, en trois mois, à des résultats concrets qui devraient se matérialiser par la signature d'accords de coopération et de dons, à l'occasion de cette visite. Pour les quatre mois qui nous séparent de la fin de 2018, ces dons représentent plus de trois fois la moyenne des dons annuels que nous recevions jusque-là avec notre ancien partenaire. Je dis bien pour seulement 4 mois ! Les perspectives sont donc plus que bonnes. Des chantiers et de grandes actions s'annoncent déjà dans plusieurs domaines : agriculture, santé, infrastructures, économie numérique, défense et sécurité, formation, etc. Une équipe de médecins chinois, dans des domaines assez pointus, est déjà en place à Ouagadougou et à Koudougou. Le pari d'un partenariat beaucoup plus fructueux est déjà gagné. La décision de notre Président de renouer avec la République populaire de Chine était donc la bonne vision pour relancer et booster le PNDES.
Le Burkina arrive à Beijing avec une forte délégation: 8 ministres, des conseillers, une cinquantaine d'hommes et de femmes d'affaires (le Burkina Faso est le seul pays autorisé à y envoyer autant d’hommes d’affaires, les autres ayant seulement cinq). On peut penser que tout le monde est en route pour Beijing. Jamais, autant de monde n'a été mobilisé pour un déplacement à l'étranger du Président Roch Marc Christian Kaboré, hormis le traditionnel TAC avec la Côte d'Ivoire à Yamoussoukro et la Conférence de Paris sur le PNDES en décembre 2016. C'est donc dire tout l'espoir que le Burkina place dans cette nouvelle relation, aussi bien pour l'aide publique au développement que pour les échanges économiques et les investissements. En 25 ans, la Chine a énormément progressé pour devenir la deuxième puissance économique du monde. Le Burkina Faso, tout en veillant à la protection de son économie nationale et des intérêts de ses Hommes d'affaires (grands et petits), s'ouvre grandement à cette Chine-là afin de profiter pleinement de ses atouts et des progrès qu'elle a réalisés en si peu de temps. S'ouvrir également à cette Chine, anciennement classée parmi les pays en développement et qui reste toujours aux côtés de ceux-ci dans les grandes instances internationales et sur les grandes questions politiques qui divisent le monde. C'est le sens du virage opéré en mai dernier par le président du Faso et c'est le sens de ce déplacement historique qu'il entreprend aujourd'hui.
Alpha BARRY
Ministre des Affaires étrangères et de la coopération