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Rejet de la requête de l’opposition parlementaire par le conseil constitutionnel : Des hommes politiques réagissent

Publié le samedi 25 aout 2018  |  Le Pays
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© Autre presse par Wikimedia Commons/ CC-BY-SA 3.0/Sputniktilt
Le Palais Kosyam, palais présidentielle du Burkina Faso, situé à Ouagadougou.
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Au lendemain de la décision du Conseil constitutionnel portant sur le recours en inconstitutionnalité de certaines dispositions du nouveau Code électoral par un groupe de députés de l’opposition, nous avons interrogé quelques responsables de l’opposition.
Yahaya Zoungrana, député CDP



« Je lance un appel au chef de l’Etat pour qu’il ne promulgue pas cette loi »



« Nous nous attendions à cette décision mais enfin, nous avons pensé à un sursaut du Conseil constitutionnel par rapport au problème de justice qui se pose. Il est vrai que le pourcentage de notre espoir n’était pas très élevé, peut-être 5%, mais nous nous sommes dit qu’au vu des éléments produis dans le dossier et surtout de l’impact réel de l’étouffement du vote des Burkinabè de l’extérieur, le Conseil constitutionnel aurait pu prendre une décision œuvrant à relire la loi.

Malheureusement, nous avons constaté que ce n’est pas le cas. Dans tous les cas, nous sommes des acteurs politiques et la loi nous donne d’autres moyens de nous exprimer. Nous allons continuer et nous pensons que même si la loi est promulguée, elle peut être relue. La preuve, c’est que la Constitution qui est la loi suprême de notre pays, est en train d’être relue.

D’autres lois, comme le Code pénal où il y avait la peine de mort, ont été relues. La loi 2015 communément appelée la loi Chérif, vient d’être modifiée. Et dans ce sens, je lance un appel au chef de l’Etat pour qu’il ne la promulgue pas parce que la classe politique est divisée sur un point essentiel. Il s’agit d’obtenir le consensus avant d’aller aux élections.

Je prend l’exemple de deux équipes de football, puisque les Burkinabè aiment le football. Si avant le début du match, l’arbitre décide que l’équipe A mène l’équipe B par 2 buts à 0, je crois qu’il y a de fortes chances qu’il n’y ait pas match. Faisons en sorte que la classe politique ait un Code électoral consensuel afin d’aller aux élections de façon apaisée »



Moussa Zerbo, député UPC



« Nous allons protester contre ce Code électoral »

« C’est un recours qui a été fait par trois groupes parlementaires à savoir le groupe Union pour le progrès et le changement (UPC), le groupe Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP) le groupe Paix, justice et réconciliation nationale.

Nous avons pris acte de la décision du Conseil constitutionnel en tant que démocrates. Nous nous gardons de commenter tout ce qui est décision de Justice. C’est la question judiciaire qui a été vidée et il reste la question politique. L’opportunité de ce projet de loi pose problème.

On se souvient qu’en 2013, lorsque cette velléité de modification de l’article 37 s’est posée, il n’était pas question que la Constitution ne le permettait pas. Cela était légal, mais c’était une question d’opportunité.

Ce que les populations n’ont pas accepté. Nous ne sommes pas loin de cette situation et comme nous avons d’autres voies de recours, notamment les manifestations, nous ne pouvons que passer là. Et les jours à venir, nous allons rappeler nos militants, nos camarades à des manifestations somme toute légales et autorisées de par la Constitution. Tout se passera dans les règles de l’art et nous allons protester contre ce Code électoral. »



Ablassé Ouédraogo, président du parti le Faso autrement



« Nous osons espérer que le président du Faso n’est pas otage des décisions de sa majorité parlementaire »



« Le Conseil constitutionnel, saisi du recours en inconstitutionnalité de certaines dispositions du Code électoral, notamment les articles 52 et 72 par un groupe de 36 députés de l’Opposition, a, dans sa décision N° 2018-028/CC du 17 août 2018, déclaré la loi N°035-2018/AN du 31 juillet 2018 portant modification de la loi portant Code électoral au Burkina Faso entièrement conforme à la Constitution.

Rappelons que l’objet du recours portait sur les pièces de votation, le confinement des lieux de vote, le fichier électoral et le maintien des cartes d’électeurs pour ceux qui se sont inscrits avec des pièces autres que celles retenues par la dernière modification.

Il est clair que le retrait de la carte consulaire dans l’article 52 nouveau et le confinement des lieux de vote des électeurs burkinabè vivant et travaillant à l’étranger dans les ambassades et dans les consulats, constituent de graves restrictions au droit citoyen des Burkinabè de voter.

Le Conseil constitutionnel dont la responsabilité est de juger de la constitutionalité des lois, a tout simplement dit le droit en validant la loi querellée. Il met fin, par cette décision, au débat juridique sur le vote des Burkinabè de la diaspora et ce n’est pas une surprise pour nous.

Nous saluons la démarche républicaine des députés ayant saisi le Conseil constitutionnel, mais nous estimons que le vrai débat soulevé par cette loi n’est pas juridique mais plutôt politique, éthique, moral et social.

Nous pensons que la mise en application de cette loi restreint l’accès au vote à des centaines de milliers de nos compatriotes vivant et travaillant à l’étranger. La rigidité des lois et règlements n’excluant pas la recherche du consensus et de l’apaisement, nous sommes convaincus que nos gouvernants sauront trouver les moyens d’éviter d’ajouter des crises inutiles au climat social actuel déjà tendu.

C’est pourquoi nous osons espérer que le président Roch Marc Christian Kaboré, président de tous les Burkinabè y compris ceux vivant et travaillant hors du territoire national, garant de l’unité nationale et de la cohésion sociale, saura montrer à son peuple qu’il n’est pas otage des décisions de sa majorité parlementaire.

Et pour le président du Faso, la meilleure manière de montrer qu’il est à l’écoute de toute la Nation, est de ne pas promulguer cette loi dans sa mouture actuelle, mais de demander à l’Assemblée nationale, une deuxième lecture des articles concernés, avant la fin du délai de promulgation, conformément à l’article 48 de la Constitution.

Cette demande ne peut pas être refusée. Ce faisant, il montrera à tous ses compatriotes qu’il est à l’écoute de tous les Burkinabè et que l’unité et la concorde nationales, la paix et l’inclusion sont au-delà de tout calcul politicien, ses objectifs principaux. La construction de la Nation burkinabè doit demeurer notre objectif commun à tous. »



Aziz Dabo, Porte-Parole de la NAFA

« Il est inadmissible que nos autorités jettent le discrédit sur la carte consulaire »



« A vrai dire, nous n'attendions pas grand-chose de la décision de cette cour dite des "Sages" car elle a parfois dévié de ses obligations de gardienne de la Constitution en légitimant certains actes. Mais en tant que légalistes, l'opposition républicaine a décidé de poursuivre toutes les voies légales de recours tout en se réservant le droit de poursuivre la lutte par d'autres moyens.

Nos inquiétudes restent les mêmes, il est inadmissible que nos autorités jettent le discrédit sur la carte consulaire pour des raisons électorales et le choix des enclaves diplomatiques comme seuls lieux de votation sans aucune disposition permettant d'en aménager d'autres supplémentaires, constitue un recul démocratique et une volonté d'exclusion massive de nos ressortissants à l'étranger.

En effet, les années passent et l'instance suprême apparaît de plus en plus comme un instrument chargé d'accompagner les volontés politiques du pouvoir en place tant ses décisions sont sujettes à caution! Nous avons toujours en mémoire qu'elle a entériné la liberticide loi "Chérif" d'exclusion aux élections couplées législatives et présidentielles de 2015 pensée et concoctée dans les laboratoires MPP, mais les géniteurs de l'article 37 par contre sont passés miraculeusement entre les mailles du filet au détriment d'autres.

Dans cet élan de complicité, cette même Cour nous a rendu une décision inique qui confère au tribunal militaire une spécificité qui permettrait, en violation de la Constitution, au pouvoir politique de nommer des magistrats.

Du reste, lorsque le président du Conseil constitutionnel, au lieu d'être élu par ses pairs comme le stipule les textes, est nommé par le pouvoir politique et quand on peut démissionner du MPP juste pour ensuite être membre de cette Cour, les décisions ne peuvent qu'être partisanes. Au vu du rôle essentiel qu'elle doit jouer pour la cohésion et l'union nationale, son indépendance et son impartialité devraient vivement animer autant sa composition que les décisions rendues ».

Propos recueillis par Antoine BATTIONO
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