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Arrestation des autorités de la Transition : les aveux du major Badiel

Publié le mardi 10 juillet 2018  |  Sidwaya
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8e accusé appelé à la barre, dans le cadre du procès du putsch manqué de 2015, l’adjudant-chef major Eloi Badiel a reconnu, ce lundi 9 juillet 2018, avoir participé à l’enlèvement des autorités de la Transition.

L’interrogatoire des accusés dans le cadre du procès du putsch s’est poursuivi, hier lundi 9 juillet 2018. Devant la Chambre de première instance du Tribunal militaire, l’adjudant-chef major Eloi Badiel s’est présenté, en tenue militaire. Il est reproché au soldat, marié et père de 4 enfants, des faits d’attentat à la sûreté de l’Etat, de meurtre et de coups et blessures. Il a rejeté les deux derniers chefs d’inculpation et reconnu «partiellement» son rôle dans l’enlèvement et la séquestration des autorités de la Transition. Mais, le major Badiel dit avoir l’impression que les gens se sont concertés pour tout déverser sur lui. En effet, il dit avoir pris part, le 16 septembre 2015, dans la matinée, au rassemblement au camp Naaba Koom II. Il a rapporté avoir ensuite rejoint le palais présidentiel, où il est adjoint au commandant de poste. Aux alentours de 10h, il aurait été approché par le sergent-chef Koussoubé Roger, alors qu’il voulait aller rendre visite à l’adjudant Jean-Florent Nion. «Koussoubé m’a dit que sur instruction du général Gilbert Diendéré, il vient me voir pour qu’on arrête les autorités de la Transition, notamment le président Michel Kafando, le Premier ministre Isaac Zida et les ministres Augustin Loada et René Bagoro », a-t-il expliqué. Parce que, sur la table du conseil des ministres, il y aurait un dossier de dissolution du Régiment de sécurité présidentielle. Face à la «gravité» de la décision qui allait être prise, il a avisé l’adjudant Nion, «le gradé le plus proche». «J’étais contre la mission, au départ (…) Parce que ce genre de mission doit être préparé, donc je me méfiais», a affirmé M. Badiel. Jean Florent Nion a contacté le général. Sur ce, Eloi Badiel a confié être rentré chez lui à domicile. C’est vers 13h30 qu’il a reçu un appel téléphonique de Koussoubé Roger lui demandant de venir au palais pour une urgence. De retour, il aurait vu plusieurs jeunes soldats dont le sergent Ollo Stanislas Poda. L’adjudant Nion l’a alors informé que le général Diendéré a approuvé le contenu du message du sergent-chef Koussoubé.

« J’ai confié la mission à Rambo »

L’adjudant-chef major Eloi Badiel a fait appeler l’adjudant-chef Moussa Nébié alias Rambo, le sergent Ollo Stanislas Poda, le sergent-chef Mahamadou Bouda, l’adjudant Ouekouri Kossé, pour les tenir informer de « l’ordre » du général. « J’ai confié la mission à Rambo », a indiqué l’inculpé. Pendant ce temps, il a demandé au sergent-chef Mahamadou Bouda d’aménager la salle devant les accueillir, en attendant l’arrivée de Gilbert Diendéré. « Rambo » s’est porté volontaire pour aller chercher le haut gradé à son domicile.

Finalement, « Golf» a continué au Poste de commandement pour s’entretenir avec les officiers. Cette version des faits n’a pas convaincu le parquet militaire, car malgré ses doutes, le major n’a pas rendu compte à son supérieur hiérarchique, le capitaine Dao.
« C’est parce que mon commandant de corps n’était pas là. Vu le contexte, je n’avais confiance à personne, surtout à certains officiers. Le corps était divisé à tel point qu’on ne pouvait faire confiance à personne », a rétorqué l’adjudant-chef major. Pour Me Prosper Farama de la partie civile, le climat au RSP ne justifie en rien un coup d’Etat, ou du moins l’arrestation des dirigeants, parce que le RSP est une unité de l’armée nationale, et chaque corps a ses problèmes. Alioune Zouré, procureur militaire, a trouvé les propos de l’accusé «curieux », parce que le sergent-chef Koussoubé, « messager de Diendéré », et l’adjudant Jean-Florent Nion, sont tous des subordonnés de Eloi Badiel. « Comment des subordonnés viennent vous voir pour arrêter des autorités et c’est vous qui coordonnez ? », lui a demandé le parquet. « J’ai eu la confirmation (…). En ce moment, je ne pouvais plus reculer», a-t-il répondu. C’est alors que le major a fait appel à des «anciens qui connaissent bien le travail» pour arrêter les autorités et veiller à leur sécurité, sinon avec les jeunes, il pourrait y avoir des débordements. Son avocat, Me Bali Baziémo a rappelé que la responsabilité pénale est individuelle et a souhaité que son client ne réponde que de ses actes.

Le parquet militaire dans le doute

Après la pause, l’interrogatoire de l’adjudant-chef major Eloi Badiel a porté sur la responsabilité des patrouilles. L’officier a dit ne pas en être l’instructeur mais «pense» plutôt que c’est le lieutenant Dianda et plus tard que c’est normalement le chef de corps du RSP qui ordonne de telles opérations. Il reconnaît avoir reçu instruction de «fractionner» son unité en trois groupes devant occuper des «postes fixes». Le rôle de ces groupes, a-t-il insisté, n’était pas de patrouiller mais d’attendre d’être appelés en renfort pour disperser des «attroupements» ou secourir un des leurs qui viendrait à être «encerclé» par les populations.
C’est ainsi qu’il aurait envoyé les soldats Ali Sanou, Mohamed Zerbo et autres au Conseil de l’entente et qui, en cours de route, ont été interceptés par le capitaine Dao qui les aurait instruits d’aller à la RTB où il y aurait une déclaration générale. Il reconnaît que ses hommes ont « intervenu » au SIAO pour «sauver» l’élément Mandé Arouna, sorti en violation d’une interdiction, à l’hôtel Laïco pour faire cesser « l’affrontement» entre des militants du CDP et des membres d’organisations de la société civile et au quartier Gounghin de Ouagadougou. Mais dans ce cas, a-t-il affirmé, ce n’est pas sous ses ordres. Il a, du reste, confié avoir personnellement été envoyé par son supérieur au domicile de Salifou Diallo, que des manifestants pillaient et incendiaient. Contrairement aux déclarations en instruction d’autres accusés, M. Badiel a soutenu qu’il n’a appris la descente de militaires à Savane FM, au studio Abazon et à Zorgho qu’à la MACA.

«Vos éléments sont-ils formés au maintien d’ordre ? En ont-ils le matériel ?», a demandé le parquet. Et l’accusé de répondre : «des gens sont formés pour cela» et que son unité a reçu du matériel du capitaine Dao. Il a indiqué que lui et ses éléments ont arrêté les autorités de la transition mais n’ont pas de ce fait parachevé un coup d’Etat. Suspendu sur ces entrefaites, l’audience reprend ce matin à 9 heures.

Djakaridia SIRIBIE
et Jean Philibert SOME
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