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PNDES et Sécurité: Roch Kaboré donne des orientations aux ambassadeurs

Publié le vendredi 6 juillet 2018  |  AIB
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© AIB par DR
Fonds minier
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Le 26 juin 2015, les députés du Conseil national de la transition (CNT) ont adopté, un nouveau code minier. Ce nouveau texte a suscité beaucoup d’espoir au sein des populations riveraines des mines. Mais, trois ans après, plusieurs dispositions du Code ne sont pas appliquées, notamment, la contribution des mines au développement des communautés locales qui se fait toujours attendre...Constat à Sabcé, dans la province du Bam.



Mardi 31 mai 2017. Il est environ 9 heures sur la route nationale n°22, située à environ 100 Km au Centre-Nord de Ouagadougou. Des centaines de jeunes, à l’aide de gourdin, barricadent la voie. Les usagers de la route sont pris au piège des manifestants. Aucun véhicule ne circule.

Les manifestants composés de femmes, d’hommes et de jeunes hommes prennent d’assaut la principale voie menant à la mine d’or de Bissa Gold pour empêcher les travailleurs de la mine d’accéder au site. Ils exigent de la mine, le respect de ses propres engagements, comme l’emploi d’un maximum de jeunes de Sabcé.

Patrice Ouédraogo (30 ans), un manifestant est en sueur. Surexcité, il lâche : «la mine ne respecte pas ses engagements avec la population». Patrice a trouvé un emploi au sein de la mine, mais il estime que sa rémunération est insuffisante.



De multiples espoirs



Depuis la coulée du premier lingot d’or à Sabcé, le 17 janvier 2013, les jeunes comme Patrice ont cru que leur vie changera en un coup de bâton magique.

Mais, cinq ans après, les attentes des populations sont diverses. Et malgré l’adoption d’un nouveau code minier qui exige la création d’un fond de développement au bénéfice des populations riveraines des mines, les communautés de Sabcé attendent toujours l’amorce d’une amélioration de leurs conditions vie, trois ans après l’adoption du code.

Même les personnes âgées comme Patricia Kaboré (plus de soixantaine ans, se sentent flouées. Le jour de la manifestation, elle n’a pas voulu rester les bras croisés à la maison. Le pagne impeccablement noué à sa taille, elle est d’avis avec M. Ouédraogo.

Spatule en main, elle explique que leurs fils ne sont pas employés dans la mine. «On nous flatte régulièrement qu’on va embaucher nos enfants, mais nous constatons que c’est des expatriés qu’on recrute au jour le jour. Aussi, la mine nous avait promis qu’on allait nous dédommager cinq ans après le démarrage de l’exploitation. Cette question est aussi sans suite. C’est l’ensemble de toutes ces préoccupations qui nous a conduit ce matin sur le terrain», s’indigne la mamie.

« Trahie », Mamy ne croit plus au projet de développement de Sabcé. Les villages impactés par la construction de la mine d’or attendent toujours d’être indemnisés par Bissa Gold, confie le maire de la commune rurale de Sabcé, Rigobert Nassa.

En plus, la quasi-totalité desdits villages attend de la mine la réalisation d’infrastructures sociales de base comme des écoles primaires, des collèges d’enseignement, des centres de santé, des forages et des routes, précise-t-il.

Un coup d’œil dans le Plan communal de développement(PCD) de Sabcé budgétisé à 284 millions de FCFA permet de constater que tout est prioritaire.



Le plan communal de développement en souffrance



Les besoins sont énormes : manque de Centre de santé et de promotion sociale (CSPS), la commune compte encore 13 classes sous paillote, le besoin de forages se fait sentir. Enclavé, elle a également besoin de routes.

Pour résorber la question du développement des communautés riveraines des mines, la loi n° 036-2015/CNT du 26 juin 2015 portant code minier du Burkina Faso a été adoptée par le Conseil national de la Transition (CNT).

Trois ans après son adoption, la mise en œuvre du code est lente. Seulement, sept décrets d’application ont été adoptés sur une quinzaine, deux arrêtés d’application ont été adoptés. Ces derniers sont liés au fonds minier de développement local.

«Nous n’avons pas l’ensemble des décrets et arrêtés d’application. trois ans, c’est trop pour prendre quelques décrets», clame le président de la coalition nationale, « Mine alerte, publié ce que vous payez », Jonas Hien.

Ces difficultés, dit-il, sont liés aux lenteurs administratives. Toute chose qui est un frein à l’impulsion du développement à la base.

Selon le maire Rigobert Nassa, les populations impactées par la mine ont été entièrement expropriées et ont beaucoup d’attentes.

«Elles se disent que c’est la mine qui est à la base de leur nouvelle vie. Donc, elle doit les accompagner. Celles dont les terres ont été occupées ont été indemnisées sans accompagnement. Elles ont l’impression d’avoir été trompées», déplore le maire Nassa.

Pour opérationnaliser le Code, le gouvernement a adopté le décret n°2017-0024 du 23 janvier 2017 portant organisation, fonctionnement et modalités de perception du Fonds minier du développement local.

Ce décret explicite les modalités de répartition de cette manne financière entre toutes les communes et régions du Burkina Faso, tout en privilégiant les communes et les régions abritant les sites miniers.

Le décret précise également qu’un comité communal de 9 membres participe au suivi de l’utilisation de ce fonds. Ce comité est créé par un arrêté conjoint des ministres en charge des collectivités, des mines et des finances.



Responsabilité sociale des entreprises en marge des plans communaux de développement



Selon le rapport de la commission d’enquête parlementaire sur la gestion des titres miniers et la Responsabilité sociale des entreprises (RSE) minières publié le 25 octobre 2016, malgré son caractère volontaire, toutes les sociétés minières font des actions entrant dans le cadre de la RSE.

Ces actions consistent en la réalisation d’infrastructures socioéducatives, sanitaires, sportives, mais elles ne s’inscrivent pas dans les plans locaux de développement.

Toujours selon le rapport, les sociétés minières entreprennent des actions sporadiques, contribuant ainsi à résoudre certains problèmes que rencontrent les communautés locales afin de maintenir un climat apaisé.

«Les communautés souhaitent que les sociétés minières interviennent davantage dans le cadre de la RSE et que leurs actions prennent en compte les plans locaux de développement», a expliqué le président de la commission enquête parlementaire sur la gestion des titres miniers et la responsabilité sociale des entreprises minières, le député Ousséni Tamaboura.



27 milliards de F CFA à recouvrer



Le Fonds minier de développement local est affecté au financement des plans régionaux de développement et des plans communaux de développement. Il est alimenté par la contribution, d’une part de l’Etat à hauteur de 20% des redevances proportionnelles collectées, liées à la valeur des produits extraits et/ou vendus et d’autre part, des titulaires de permis d’exploitation de mines et les bénéficiaires d’autorisation d’exploitation industrielle de substances de carrières à hauteur de 1% de leur chiffre d’affaires mensuel hors taxes ou de la valeur des produits extraits au cours du mois.

Tous titulaires de permis d’exploitation de mines et les bénéficiaires d’autorisation d’exploitation industrielle de substances de carrières valides à l’entrée en vigueur du présent code, sont soumis à l’obligation de contribuer au fonds.

Les ministères en charge des Mines et des Finances produisent un rapport annuel conjoint exhaustif et complet de l’état des contributions au Fonds minier de développement local.

Ce rapport est publié au Journal officiel du Faso et fait l’objet d’une large diffusion dans la presse à la fin du deuxième trimestre de l’année en cours pour l’état de l’exercice de l’année antérieure.

Les ressources allouées aux collectivités territoriales au titre du fonds minier de développement local sont inscrites dans les programmes d’investissements communautaires des bénéficiaires.

Elles sont prioritairement affectées aux secteurs sociaux. L’utilisation des ressources fait l’objet de rapports annuels soumis à l’adoption des conseils municipaux et régionaux, et au contrôle des structures compétentes dûment mandatées par l’Etat.

Les rapports annuels sur l’usage des ressources du fonds font l’objet de large publication. « Au plan fiscal, on a par exemple le fait que les sociétés minières sont aujourd’hui imposées à 27% au lieu de 17% de leurs chiffres d’affaires comme par le passé avec le code de 2003 », constate Ousséni Tamboura.

Selon la Commission des affaires sociales et du développement durable de l’Assemblée nationale, qui a œuvré pour l’adoption du projet de loi, le but du nouveau code minier est de parvenir à maximiser les avantages de l’exploitation minière pour l’Etat et les communautés locales, tout en corrigeant les insuffisances du code de 2003 et dont l’objectif principal était d’attirer les investisseurs dans le secteur minier au Burkina Faso.

Mais, à ce jour, le code n’est pas encore totalement mis en œuvre. Au Burkina, 12 mines industrielles sont en production. Selon leurs chiffres d’affaires calculées sur la base de leurs recettes d’exportations ; elles devraient avoir contribué au moins à hauteur de 2785,25 milliards de F CFA en plus du fonds de développement.

«Selon l’année, ça vous fait un pactole pas négligeable. Dans un plan de développement local, il y a des communes qui avaient 5 millions comme budget qui peuvent se retrouver avec 800 millions de F CFA grâce dans ce fonds minier», analyse l’ex président de la commission des affaires sociales et du développement durable, Anselme Somda.

Cette somme peut amorcer le développement des localités comme Essakane, Belahouro, Tarpako, et beaucoup d’autres.

«Nous avons convenu avec le gouvernement pour que les lignes bougent, il faut que dans les trimestres qui suivent, les fonds puissent être collectés pour les mettre à la disposition des communes», suggère M. Hien, tout en précisant que 27 milliards de F CFA sont à recouvrer au profit du fonds de développement local.

«Si, une commune venait à percevoir 400 ou 500 millions de F CFA, cela peut aider à la réalisation d’infrastructures socio-économiques. Il faut accélérer le processus de collecte des fonds. Car, les sociétés minières sont disposés à payer ce qu’elles doivent », insiste-t-il.

A Sabcé, 26 622 âmes rêvent d’un bien-être, même si, un avenir meilleur ne pointe toujours pas à l’horizon. «Les communes n’ont pas encore reçu ces fonds pour commencer à se développer. Donc, c’est normal qu’ils ne voient pas de changements majeurs dans leurs conditions de vie, parce qu’il y a des communes qui n’ont pas de gros budgets pour réaliser des infrastructures socio-économiques au profit des populations », explique le maire de Sabcé.

Pourtant, il y a urgence. «Des mines travaillent à gagner du temps. Si, on n’y prend pas garde, le temps de collecter ces fonds, il y a des mines qui vont finir leur exploitation et repartir», alerte-t-il. Contacté depuis, le 18 juin 2018, pour avis sur le FMDL, notre demande d’entretien à Bissa Gold n’a pas eu de suite favorable.



De nombreux défis



Selon la Commission des affaires sociales et du développement durable, le nouveau code vise à maximiser les avantages de l’exploitation minière pour l’Etat et les communautés locales.

Il vise également à relever trois principaux défis : prendre en compte les directives émises par les organisations d’intégration régionale en matière de politique minière commune, de renforcer les mesures de protection de l’environnement minier et de renforcer la contribution des mines au développement des communautés locales.

Ensuite, le fonds de réhabilitation, de sécurisation des sites miniers artisanaux et de lutte contre l’usage des produits chimiques prohibés est alimenté à 20% de la redevance forfaitaire payée par les bénéficiaires d’autorisation d’exploitation artisanale de substances de mine ou de carrière.

Le troisième fonds est destiné au financement de la recherche géologique et minière et de soutien à la formation sur les sciences de la terre et est alimenté par 15% des redevances et autres taxes prélevées sur les demandes d’agrément d’achat et de vente d’or collecté.

Dès le mois de mars, le ministre des Mines, Oumarou Idani a présenté en Conseil des ministres un rapport sur les recommandations de l’enquête parlementaire d’octobre 2016.

Il a confié que le nouveau code minier ne règle qu’une partie des problèmes et que certains décrets d’application font encore l’objet de discussions.

« Nous sommes en train d’aplanir tout cela », rassure le ministre des Mines. Le secrétaire chargé des projets, programmes et partenariat du Réseau national pour la promotion des évaluations environnementales (RENAPEE) Adama Wya, s’est réjoui de l’adoption du Code minier.

Depuis lors, il dit se battre sans succès, pour son application effective. «Je pense que les autorités actuelles ne font pas le nécessaire pour l’application du nouveau code minier. On ne sent pas un engouement de la part de l’exécutif pour la mise en œuvre du nouveau code minier», regrette-t-il.

A Sabcé, les populations s’impatientent. «Le gouvernement doit mettre tout en œuvre pour que cette loi soit appliquée. Si on ne se bat pas, il y aura beaucoup de remises en cause et nous serons toujours à la traîne », lâche Patrice Ouédraogo.

Patrice et des milliers d’habitants rêvent toujours d’un avenir meilleur, mais sont las d’attendre les fruits de la terre de leurs ancêtres.

Face aux multiples manifestations des populations pour de meilleures conditions de vie, un cadre de concertation communal a vu le jour à la suite des recommandations du ministre en charge des Mines.

Sa première session ordinaire a eu lieu, le 7 novembre 2017. Les échanges ont été présidés par le maire de la commune de Sabcé, Rigobert Nassa, en présence des représentants de la mine, d’environ 50 personnes dont des représentants des services techniques de la commune, des responsables religieux, des représentants des organisations de la société civile de la commune de Sabcé et des représentants des populations de chaque village impacté par l’installation de la société minière Bissa Gold.

Sarata Kaboré, une habitante de la localité, a suggéré à Bissa Gold «d’aider les femmes en les appuyant avec des microcrédits ou des fonds d’accompagnement afin de promouvoir davantage l’autonomisation économique des femmes».



La fraude, une gangrène



L’exploitation frauduleuse et artisanale ainsi que l’absence de transparence dans la valorisation de l’or destiné à l’exportation augmentent encore le manque à gagner pour le fond minier de développement.

Selon l’Enquête nationale sur le secteur de l’orpaillage (ENSO) de l’Institut national de la statistique et de la démographie (INSD), le Burkina Faso compte 438 sites d’orpaillage fonctionnels. Il ressort de cette enquête réalisée sur 104 sites avec un taux de collecte de 95%, qu’en 2016, la production artisanale d’or a été estimée à 9,5 t d’or à hauteur de plus de 230 milliards de FCFA.

Ce montant provient d’activités de production d’or des régions du Sud-Ouest (118, 7 milliards de FCFA), du Nord (53, 9 milliards de FCFA), du Centre-Est (13,5 milliards de FCFA), etc.

L’enquête révèle également une production annuelle en commerce d’or de 11, 2 milliards de F CFA. Cette activité illégale est une manne financière qui échappe au fisc et est un manque à gagner pour les communes.

Les pesées de l’or sur les sites miniers et leurs expéditions à l’aéroport de Ouagadougou se font sous le contrôle des agents de douanes, des transitaires, des agents du ministère des Mines et de la société minière.

Le Burkina a perdu entre 2005 et 2015, plus de 551 milliards de FCFA, dans le cadre de l’exploitation minière, selon l’enquête parlementaire sur la gestion des titres miniers et la responsabilité sociale des entreprises minières.

Un manque à gagner lié à une mauvaise gestion des titres miniers et aux dommages causés à l’environnement par l’exploitation minière, c’est ce qui est ressorti du rapport d’enquête parlementaire publié, le 25 octobre à Ouagadougou.

Il apparaît aussi que dans le processus de production de l’or des compagnies minières, les services de l’Etat burkinabè, la douane, les impôts, n’ont pas accès aux opérations de coulée de l’or, explique Ousséni Tamboura.

Ils assistent à la pesée et, avant les expéditions d’or à l’étranger, il est procédé à la vérification des documents à signer. Cependant, toute la production est mise sous- scellés. L’absence de représentant de l’Etat lors de la coulée et du raffinage à l’étranger permet d’émettre des doutes sur la quantité et la qualité de l’or telles qu’elles sont présentées au fisc burkinabè.

Selon la Chambre des mines du Burkina, l’importance d’un bon encadrement de ce secteur des mines dont la contribution à notre économie n’est plus à démontrer. Car, ces pratiques illégales donnent l’occasion de faire l’amalgame entre leurs auteurs et les sociétés minières industrielles qui exploitent les ressources minières du Burkina Faso.

Et sans strict respect de la législation en vigueur, notamment les procédures en matière d’exportation de l’or, le fonds minier de développement va toujours être sous-alimenté et les populations riveraines impactées par les activités minières, comme celles de la communauté de Sabcé, ne vont toujours pas profiter de la richesse minière du pays.
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