Accueil    Shopping    Sports    Business    News    Femmes    Pratique    Burkina Faso    Publicité
NEWS
Comment

Accueil
News
Politique
Article



 Titrologie



Le Quotidien N° 837 du 9/8/2013

Abonnez vous aux journaux  -  Voir la Titrologie

  Sondage



 Autres articles


Comment

Politique

Tripatouillages des constitutions : pour un devoir d’ingérence de la CEDEAO
Publié le samedi 10 aout 2013   |  Le Quotidien


Le
© Autre presse par DR
Le président béninois Thomas Yayi Boni


 Vos outils




Deux pays ouest-africains sont sous les feux des projecteurs. Leurs présidents sont sur la sellette car accusés d’être atteints d’une « tripatouillitte » aiguë. Ce néologisme désigne une maladie typiquement africaine qui consiste, pour les chefs d’Etat au pouvoir, à réviser la Constitution pour en sauter le verrou limitant le nombre de mandats présidentiels. Eux, ce sont Blaise Compaoré du Burkina et Yayi Boni du Bénin. Le premier quitte le pouvoir en 2015 et le second en 2016, à la fin de leurs mandats constitutionnels. Mais leurs opposants les suspectent d’avoir un autre agenda, celui du règne à vie. Deux pays donc à l’avenir politique incertain, même si les niveaux de progrès démocratique sont quelque peu différents. Le Bénin a connu trois présidents de 1991 à nos jours, à savoir, Nicéphore Sogolo, Mathieu Kérékou et l’actuel chef d’Etat Yayi Boni. C’est dire que le pays a une tradition d’alternance au sommet de l’Etat. Le Bénin est de ce fait classé par les Nations africaines les plus solidement ancrées dans l’Etat de droit. Mais la vigilance des organisations de la société civile et des partis d’opposition ne faiblit pas pour autant. Même dans les rangs du pouvoir, des voix se sont élevées pour rejeter toute remise en cause des acquis démocratiques.
Au Burkina, la même mobilisation pour le respect de la limitation des mandats présidentiels est de mise. A la différence que dans ce dernier cas, Blaise Compaoré ne dit rien de ses intentions alors que Yayi Boni jure sur tous les toits –et même devant le pape- qu’il ne modifiera pas la Constitution pour rester au pouvoir. Malgré ces assurances, on voit bien que les Béninois n’osent pas donner le bon Dieu sans confession à Yayi Boni. Si les Béninois sont méfiants à ce point, que dire alors des Burkinabè dont le président, au pouvoir depuis plus d’un quart de siècle, garde un silence inquiétant sur ses véritables intentions ? Dans tous les deux cas, on assiste à une déchirure du pays, avec des risques pour la cohésion sociale, la stabilité, la paix et les acquis démocratiques. Au-delà de ces pays, la menace d’une déstabilisation de la sous-région se profile à l’horizon, quand on sait qu’une crise dans un pays a un impact sur ces voisins. Et comme à l’échelon national, chacun de ces deux pays semble être livré à lui-même, sans un sage pour départager les différents camps, il n’est pas superflu aujourd’hui d’en appeler à l’arbitrage de la CEDEAO (Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest). En tant qu’instrument de paix dans l’espace sous- régional, elle doit veiller sur tous les segments de la vie de chaque Nation, susceptibles de remettre en cause ce bien si précieux. Bien entendu, comme il est de coutume, les dirigeants en place invoqueront la souveraineté de leurs pays pour justifier les actes qu’ils posent et pour rétorquer que la CEDEAO n’a rien à y voir. C’est la même antienne qui est ressassée par les apprentis dictateurs, à l’image de Mamadou Tandja et de son Tazartché, en son temps, au Niger. Les dirigeants ouest-africains veulent bien des fonds de la CEDEAO et, si besoin, de ses soldats pour les tirer d’affaire, mais ils refusent son avis et ses décisions quand cela ne les arrange pas. Ils ont une bien curieuse conception de l’intégration. Ils en veulent les usufruits tout en abhorrant les contraintes qui vont avec. N’empêche, la CEDEAO doit se donner les moyens d’anticiper sur les crises nationales qui, d’une manière ou d’une autre, affecteront l’équilibre sous- régional. Car jusqu’à présent, elle a plutôt joué les sapeurs -pompiers. Ce n’est pas le rôle que les peuples attendent d’elle.

Voilà pourquoi la CEDEAO doit ouvrir l’œil sur les modifications constitutionnelles pressenties au Bénin et au Burkina Faso. Les populations de ces deux Etats membres commencent à s’agiter autour de cette problématique. Les mouvements en cours peuvent dégénérer en crises graves et mettre en péril la paix, ainsi que le redoutent de nombreux observateurs. Ils peuvent même provoquer des coups d’Etat. Il ne sert à rien, a posteriori, d’accourir pour dénoncer un coup de force alors que tous les signes invitaient à une action préventive. Certes, il ne faut pas être naïf. A l’instar de l’Union africaine, la CEDEAO s’apparente à un syndicat de chefs d’Etat où les intérêts individuels des dirigeants sont préservés. Mais si pour une fois l’organisation, à travers ses dirigeants résolument démocrates, ne prend pas son courage à deux mains pour mettre le holà à cette dérive, les tripatouillages constitutionnels reprendront de plus belle, par un effet boule de neige. Et ce sera tant pis pour la démocratie, la paix et le progrès dans l’espace communautaire.

 Commentaires