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Grève de SYNTSHA : Mot d’ordre suivi, le service minimum assuré par endroits

Publié le jeudi 24 mai 2018  |  Le Pays
Hôpital
© aOuaga.com par G.S
Hôpital Yalgado Ouédraogo : le SYNTSHA renonce à sa marche et à son sit-in
Jeudi 9 février 2017. Ouagadougou. La section SYNTHSA (Syndicat des travailleurs de la santé humaine et animale) du centre hospitalier universitaire Yalgado Ouédraogo a renoncé à sa marche sur le ministère de la Santé et à son sit-in de protestation du 10 février suite à un accord avec les autorités de tutelle
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Le Syndicat des travailleurs de la santé humaine et animale (SYNTSHA) est en grève de 48 heures, soit les 23 et 24 mai 2018. Et cette grève, selon, le SYNTSHA, est pour revendiquer la satisfaction de sa plateforme par le gouvernement. Pour constater l’effectivité de la grève, au premier jour, nous avons fait le tour de certains établissements sanitaires de la ville de Ouagadougou. Constat !

Le Syndicat des travailleurs de la santé humaine et animale (SYNTSHA) est en grève. Pour le constater, il faut se rendre dans les formations sanitaires. Et c’est ce que nous avons fait. A 9h, nous sommes devant l’Office de la santé des travailleurs (OST). Au premier regard, on croirait que c’est un jour non ouvrable ; le parking est désespérément vide. Nous sommes le 23 mai 2018, premier jour de la grève du SYNTSHA. Alors que nous nous dirigeons vers l’entrée principale, nous sommes interpellés par un vigile, assis dans un kiosque surveillant de près la porte, qui s’empresse de nous dire : « Ils sont en grève ». « Oui nous le savons et c’est la raison de notre visite », rétorquons-nous. C’est alors que nous franchissons l’entrée principale. Sur les pas de la porte, à notre droite, nous pouvons lire : « la caisse ». Les guichets sont hermétiquement fermés et aucune âme ne semble y vivre. Juste à notre gauche, nous apercevons un jeune homme assis à côté de la guérite. Lui, il se nomme Kader Zerbo ; il est conducteur et est venu chercher un certificat médical pour pouvoir déposer le dossier qui va lui permettre de doubler son permis de conduire parce qu’il voyage demain (ndlr : 24 mai 2018). « Je suis allé à la consultation et on m’a dit de venir devant la caisse, peut-être que quelqu’un va venir ouvrir un guichet au niveau de la caisse. C’est la raison pour laquelle j’attends ici », nous confie-t-il. Etiez-vous au courant que les agents de l’OST sont en grève. « Non », répond-il. « Alors que sans le certificat médical, je ne peux pas déposer le dossier », s’empresse-t-il de nous dire. Nous laissons notre interlocuteur là, et nous progressons dans la vaste cour de l’OST. Toutes les portes qui donnent sur l’entrée principale sont fermées mais dans le parking réservé au personnel, il y a quand même quelques voitures, signe de la présence de quelques agents.

« Je ne veux pas que mon nom sorte dans votre journal »



Effectivement, pendant que nous errons dans la cour, nous voyons un agent qui semble être pressé, se diriger vers un bureau. Nous l’accostons en nous présentant et faisons le court trajet avec lui : « Etes-vous de la maison ? », demandons-nous. « Oui », répond-il tout en nous signifiant qu’il est juste de passage. Tout en marchant nous lui demandons de se présenter. Comme mue par un ressort, notre interlocuteur redouble de vitesse et nous met en garde : « Je ne veux pas que mon nom sorte dans votre journal ». A cette injonction nous le laissons partir vers son bureau. Nous décidons alors de scruter les salles de consultations. Nous arrivons alors devant un bloc de bâtiment où il est écrit « service santé de la femme au travail ». Nous nous attendions à voir des femmes dans la salle d’attente. Erreur ! Quand nous débouchons dans l’aire d’attente, nous sommes tombés sur deux hommes qui attendent patiemment sur le banc. Nous nous adressons à l’un d’eux, en l’occurrence Abdoul Aziz Ouédraogo, fonctionnaire. Il nous fait comprendre qu’il est là pour un certificat de visite et de contre-visite pour pouvoir renouveler son permis de conduire. Mais hélas ! Il ne l’aura pas ce jour parce que « le médecin qui doit signer le certificat de visite et de contre-visite n’est pas là », nous informe-t-il. Comme si on l’a scotché au banc, Adoul Aziz ne bouge pas malgré le fait de la grève : « De toute façon ma journée est faussée. J’ai laissé mes cours pour venir ici », se résigne-t-il. « Pensez-vous qu’un médecin va passer par là pour vous « sauver » ? « Ce n’est pas évident », lance-t-il avec un certain pessimisme. Quand on lui demande de nous donner son avis sur la grève, Abdoul Aziz Ouédraogo nous fait comprendre que même s’il ne connaît pas le fond du problème, « il n’y a pas de grève inutile ». Pendant que nous échangeons avec Abdoul-Aziz, nous sommes interrompus par l’irruption d’une dame dans l’aire d’attente. Nous l’interceptons en nous présentant à elle. D’un signe de tête, elle nous fait comprendre qu’elle ne veut pas s’entretenir avec nous. Nous insistons, mais c’est peine perdue. Refroidis mais pas découragés nous nous dirigeons vers une salle où il y avait de la lumière qui transparaissait à travers la vitre transparente d’une porte à deux battants. De dehors, nous voyons une dame en train de consulter un jeune homme qui porte un appareil qui ressemble à des verres. Nous sommes au service d’ophtalmologie.

« Nous faisons notre travail parce que nous ne sommes pas concernés par la grève »

Chose curieuse, de tous les services, ce jour 23 mai de l’an 2018, il n’y a qu’à l’ophtalmologie qu’il y a consultation. Nous nous engageons dans le compartiment, qui mène au service ophtalmologique. Dans un angle mort, nous tombons sur Kader Zerbo qui, finalement, décide de venir consulter sans être passé à la caisse parce que les guichets sont fermés. Nous lui demandons gentiment de nous laisser voir l’ophtalmologue avant qu’il ne rentre en consultation. Il n’y trouve pas d’inconvénient. Nous attendons que le jeune homme finisse sa consultation. A un moment donné, le jeune homme sort de la salle. A voir l’accoutrement qu’il porte sur les yeux, on devine aisément qu’il vient pour des verres correcteurs. Aussitôt que la femme a mis la tête entre la porte entrebâillée, nous l’abordons et c’est là qu’elle nous fait comprendre que « c’est par conviction personnelle qu’elle vient travailler le jour de la grève ». Se prononçant, sous anonymat, elle estime que même s’il y a grève, il faut un service minimum parce qu’il ne peut pas y avoir arrêt total de travail. « Je travaille comme un jour ordinaire et je fais ce que je peux », nous dit-elle tout en prenant congé de nous. Après cette conversation, nous décidons d’aller voir d’autres horizons. A 10h, nous sommes devant le centre médical Pogbi, situé à Ouidi. Sur le pas du portail nous apercevons des femmes et des hommes en blouse blanche, mais peu de patients, comme s’ils sont informés de la grève. Nous nous dirigeons vers un groupe de personnes en blouse blanche. « En tant que stagiaires, nous travaillons. Nous sommes au niveau du pansement. Mais il y a quelques titulaires au niveau du dispensaire ». Alors que nous nous dirigeons vers l’endroit qui nous a été indiqué nous tombons sur le coordonnateur qui nous conduit chez le médecin chef dont le bureau se situe dans un autre bâtiment. Nous nous engageons dans le bâtiment et nous nous engouffrons dans le premier bureau ouvert où se trouvent deux personnes installées sur deux tables distinctes envahies de paperasse. « Nous ne sommes pas du même corps. Nous sommes un service de la mairie, l’état civil. Nous faisons notre travail parce que nous ne sommes pas concernés par la grève », nous confient-ils sous anonymat. De ce bureau, nous tapons à la porte de celui du médecin chef. Il nous reçoit dans une chaleur étouffante, à cause des délestages. De prime abord, il observe une certaine prudence parce que nous n’avons pas « d’autorisation pour faire le reportage ».

« Ça travaille ici sans problème »

Finalement, Dr Alexis Rouamba, puisque c’est de lui qu’il s’agit, se décide à nous parler : « ça travaille ici sans problème. A la maternité ça fonctionne, au dispensaire aussi ». Nous faisons le tour et effectivement ses propos sont véridiques. Et même que nous nous sommes entretenus avec les sages-femmes en service à la maternité. Dans une ambiance détendue, Odilia Forgo, responsable de la maternité, nous renseigne : « Nous sommes là pour gérer les urgences. Et nous sommes organisés en trois équipes pour assurer la permanence et la garde. Nous assurons les accouchements eutociques sauf les cas d’évacuations ». La première équipe dont elle fait partie travaille depuis le matin et doit descendre à 12h. Et c’est à 12h moins que nous prenons congé des sages-femmes de la maternité Pogbi alors que l’équipe remplaçante s’apprête à prendre service. Nous quittons Pogbi aux environs de 12h et nous faisons un tour au Centre hospitalier universitaire Yalgado Ouédraogo. Là-bas les services sont désespérément vides et les patients n’ayant plus d’autre choix sont rentrés chez eux. C’est voulant nous entretenir avec le Secrétaire général du SYNTSHA que nous apprenons que les travailleurs sont à « l’éducation ouvrière » pour faire le point de la grève. Et c’est sur ces lieux que nous constatons que les agents des services sanitaires publics de Ouagadougou ont délaissé les bureaux au profit de la lutte syndicale.

Françoise DEMBELE



PISSYAMBA OUEDRAOGO, SG SYNTSHA



« Il n’y pas de grève sans effet »



« Nous avons observé 48 heures de grève, les 23 et 24 mai, pour faire respecter notre plateforme que nous avons déposée auprès de Son Excellence M. le Président du Faso. Le premier point de cette plateforme concerne le respect des libertés syndicales. Nous avons constaté ces derniers temps qu’il y a des remises en cause de l’exercice des libertés syndicales dans notre pays. Le cas que nous citons est celui de Pouytenga où pendant pratiquement 6 à 7 mois notre structure locale a mené des luttes qui ont débouché en fin d’année sur la répression de 18 agents à qui, administrativement, on ne reproche rien. Ils n’ont fait l’objet d’aucune lettre d’explication ni d’avertissement. Nous pensons que dans un Etat de droit quand on nomme quelqu’un et on lui retire sa confiance, on le signifie ou donne une raison. Ici, ils n’ont pas donné de raison. Pour nous, la raison est claire : c’est parce qu’ils ont mené une lutte syndicale. Deuxième aspect concernant les libertés syndicales, c’est la grève que nous avons observée le 31 janvier 2018. Sur le terrain, il y a eu beaucoup de tracasseries. Le deuxième point de la plateforme est relatif aux conditions de travail. Du CSPS au CHU, les formations sanitaires sont en panne à tous les niveaux. Les engagements contenus dans la plateforme ne se traduisent pas par des actes concrets et nous avons assez attendu. Pour finir, le troisième porte sur les questions de carrières et de rémunération. Au niveau de la santé humaine et animale, les statuts particuliers traînent. De septembre à aujourd’hui, il n’y a pas de solutions et nous attendons la concrétisation d’un certain nombre de points. Et nous estimons qu’il faut que les textes soient adoptés. Pour ce qui est du service minimum, nous souhaitons que les gens comprennent ce qui se passe dans le pays et dans le monde syndical. Concernant le SYNTSHA, nous respectons la loi. Et dans le secteur de la santé, il est écrit que ce sont les directeurs d’hôpitaux qui organisent le service minimum. Il n’y pas de grève sans effet. Si on cesse de travailler, il y a des conséquences. C’est pourquoi nous avons toujours déposé des préavis. Pourquoi les gens ne demandent pas au gouvernement ce qu’il fait pour empêcher les grèves ? Il faut que les gens comprennent qu’on n’ignore pas les effets de la grève. On sait bien que si on n’est pas là il y a des conséquences sur les patients. Si le gouvernement ne réagit pas, on peut faire une autre grève comme on peut trouver une autre façon de faire pression. »

Propos recueillis pas FD
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