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Albert Djiguemde, Sg du SAMAE « Les autorités actuelles ne font rien pour améliorer la gouvernance d’ensemble de notre diplomatie »

Publié le vendredi 27 avril 2018  |  Le Pays
Albert
© Autre presse par DR
Albert Djiguemdé, SG du Syndicat des agents du ministère des Affaires étrangères (SAMAE)
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Depuis plus d’un mois, les travailleurs du ministère des Affaires étrangères, sous la houlette du Syndicat des agents du ministère des Affaires étrangères (SAMAE), sont en sit-in. Depuis plus d’un mois donc, c’est juste quelques heures qui sont consacrées au travail dans ce département. Nous avons rencontré le SG dudit syndicat, Albert Djiguemdé, pour en savoir davantage sur les raisons qui font perdurer ledit mouvement.



« Le Pays » : Depuis un mois, les travailleurs du ministère des Affaires étrangères sont en grève. Quels sont, de façon précise, les points de blocage qui justifient encore votre grève ?



Albert Djiguemdé : Contrairement à ce que vous dites, nous ne sommes pas en grève mais en sit-in depuis le 22 mars dernier. Il vous souviendra que le 29 juin 2017, le gouvernement a signé avec notre organisation un protocole d’accord, suite à la lutte que nous avions engagée à l’époque. Ce protocole qui comporte 11 points, était censé être intégralement mis en œuvre en fin septembre 2017. En dépit des nombreux échanges que nous avons eus avec l’administration des Affaires étrangères, aucun point de ce protocole, jusque-là, n’a reçu un traitement satisfaisant. Et pour mettre de l’huile sur le feu, le directeur de cabinet du ministre Alpha Barry s’est rendu coupable de violations de libertés syndicales en empêchant un des nôtres de prendre service au cabinet du ministre, pour la simple raison qu’il est membre du bureau syndical. Ce qui a précipité notre mouvement de sit-in et nous met dans l’obligation de demander son départ sans délai. Outre ces deux points, il y a la question des intérims qui n’a pas encore connu un dénouement heureux. Pour récapituler, la mise en œuvre intégrale de notre protocole d’accord, le respect strict des libertés syndicales avec le départ du ministère des Affaires étrangères de Oumarou Soro et la fin des intérims aussi bien à la centrale que dans les ambassades et consulats généraux, sont les trois points de revendications qui font l’objet du présent sit-in.

Il nous est revenu que les autorités du ministère ont accédé à certaines de vos revendications, notamment le cas de votre camarade qui attendait son certificat de prise de service. N’est-ce pas un geste de bonne volonté qui devrait amener à cesser votre mouvement ?

Ah bon ! A quel moment s’est manifesté cet acte de bonne volonté ? Cet acte que vous qualifiez de bonne volonté, n’est intervenu que le 18 avril dernier, après une énième correspondance que nous avons adressée au ministre Barry la veille. Contrairement à ce que vous dites, la régularisation de la situation de l’agent lésé n’est pas un point de revendication. Ce qui est en cause, c’est l’atteinte aux libertés syndicales. Souvenez-vous qu’en 2007, les libertés syndicales de 105 militants du SAMAE dont je faisais partie, avaient été bafouées de manière très arbitraire. Pouvons-nous, 11 ans après, et de surcroît dans un contexte post-insurrectionnel, tolérer que des individus s’érigent en fossoyeurs de nos libertés que nous avons chèrement acquises ? Je dis non. Du reste, il transparaît clairement que les trois points de revendications sont toujours sans réponse satisfaisante, comme je vous le disais tantôt. En tous les cas, nous sommes au regret de constater que les autorités actuelles de notre département ne comprennent que ce langage qui pourrait davantage se durcir si rien n’est fait pour accéder à nos revendications dans les meilleurs délais.



Qu’entendez-vous par « durcir le langage » ?

Je dois préciser que le SAMAE a engagé une lutte responsable et civilisée. Je prends à témoin tous les usagers des services du ministère sur la conduite responsable de notre lutte empreinte de courtoisie, de tempérance et de sérénité sans grand tapage médiatique. La preuve est que vous pensiez que nous sommes en grève alors que nous sommes en sit-in. Il est dommage de constater que les autorités du ministère prennent cette façon responsable comme une faiblesse et font dans le dilatoire au lieu de s’assumer pleinement. Donc, nous nous réservons le droit de passer à une étape supérieure.

Ne pensez-vous pas que ce mouvement qui s’éternise, ternit l’image de la diplomatie du Burkina Faso ?



Ce mouvement a comme objectif de redonner à la diplomatie burkinabè son lustre d’antan. Seulement, les autorités actuelles ne font rien pour améliorer de manière efficiente la gouvernance d’ensemble de notre diplomatie, obligeant le SAMAE à monter toujours au créneau pour se faire entendre et faire prendre en compte ses préoccupations qui, du reste, participent au renforcement du rayonnement international du Burkina Faso. Nous avons usé graduellement des moyens légaux à notre disposition, sans succès jusqu’au présent sit-in dont les résultats se font toujours attendre. C’est donc à notre corps défendant que nous avons entamé ce mouvement en abandonnant un instant nos bureaux pour réclamer la mise en œuvre intégrale du protocole d’accord, le pourvoi aux postes d’intérim ainsi que le respect des libertés syndicales. En somme, notre lutte est une lutte citoyenne et une lutte citoyenne ne saurait ternir l’image du pays. Du reste, d’autres pays ont connu des diplomates en mouvement. Le cas des diplomates israéliens, français, américains et plus près de nous, le cas ivoirien relayé par vos confrères de Jeune Afrique, sont illustratifs. Pour des raisons diverses, ces mouvements peuvent s’étendre sur un jour, deux jours, des semaines, des mois ou sur une longue durée. Les diplomates maliens ont fait une année dans leur mouvement d’humeur. Je peux donc conclure que notre mouvement ne dessert pas l’intérêt national.



D’aucuns estiment qu’il y a des problèmes qui minent le département de la diplomatie burkinabè. Êtes-vous de cet avis ?



(Rires), Bèeeh, s’il n’y avait pas de problèmes, nous ne serions pas en mouvement. Cela nous semble assez évident tout de même. Pour être plus sérieux, de mémoire d'homme, c'est une première qu'en l'espace de six mois, le SAMAE se voit obligé de prendre à témoin, par trois fois, l’opinion publique nationale et internationale sur le climat social délétère qui prévaut au sein du département chargé de la mise en œuvre de la politique étrangère du Burkina Faso. Nous avons, à l’occasion de ces différentes sorties médiatiques, relevé la légèreté et l’amateurisme avec lesquels notre diplomatie est aujourd’hui conduite, aussi bien au niveau du respect des principes de gestion administrative, du management des ressources humaines que dans l’appropriation des principes élémentaires en diplomatie. Nous en sommes même venus à solliciter l’implication personnelle du chef de l’Etat pour que cette diplomatie retrouve son lustre d’antan. C’est vous dire que le mal est profond. C’est l’occasion, pour nous, d’interpeler de nouveau les plus hautes autorités de notre politique étrangère sur les nécessaires réformes qui s’imposent pour une diplomatie efficace et performante.

Interview réalisée par Michel NANA
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