L’association « Suudu Baaba » qui signifie en langue peul « la patrie, la communauté » a organisé une conférence publique sur la mendicité, le 24 mars 2018 à Ouagadougou. Placée sous le thème « Mendicité et communauté peulh », cette activité s’inscrit dans le cadre de l’élaboration d’une feuille de route pour l’éradication de la mendicité dans les rues de Ouagadougou de la tranche d’âge de 5 à 18 ans d’ici à l’horizon 2025. Parrainée par Mamidou Koné, directeur de cabinet, représentant le ministre de l’Enseignement supérieur, de la recherche scientifique et de l’innovation, cette conférence a surtout mobilisé des chefs peuls de 35 provinces.
« En résumé, l’Islam interdit la mendicité ». C’est par ces propos que Dr Amadoum Dicko a conclu sa conférence. A l’unanimité, le public à majorité peuls a condamné la mendicité au sein de leur communauté. « Un homme, c’est oser faire ce qu’il ne peut pas, et la femme, c’est faire ce qu’elle peut. Le fait d’avoir abordé ce sujet sensible de la mendicité, c’est déjà trouver une piste de solution », a déclaré Moorè Diallo, chef peul de Léo. L’association Suudu Baaba qui signifie en langue peul « la patrie, la communauté » a voulu, à travers cette conférence, témoigner sa contribution à l’éradication de ce fléau au Burkina Faso, notamment dans la ville de Ouagadougou d’ici à l’horizon 2025. Comment y parvenir et par quels moyens ? A l’issue de cette activité, la communauté peul entend désormais faire de la lutte contre la mendicité son cheval de bataille en s’y impliquant à fond. Elle a décidé d’encadrer 50 enfants talibés peuls dans le cadre de la réalisation de la première phase pilote au compte de l’année 2018. Ces enfants seront sensibilisés et pourront suivre leur apprentissage du Saint Coran dans un centre d’accueil. « Toute personne qui voudrait leur offrir des sacrifices, aides ou dons pourra les rejoindre dans ce centre d’accueil », a dit Nabiga Barry, président de l’association « Suudu Baaba ».
Levée de fonds interne
Mamidou Koné, directeur de cabinet, représentant le ministre de l’Enseignement supérieur, de la recherche scientifique et de l’innovation, a encouragé l’organisation d’une telle conférence qui témoigne du dévouement de « Suudu Baaba » pour la cause du développement communautaire et socio-culturel des peuls. « Il appartient à tout un chacun de s’y mettre pour l’éradication de ce phénomène de mendicité qui a la peau dure », a-t-il laissé entendre. Pour mener à bien la mission à elle confiée, elle a adopté trois sources de levée de fonds : l’invitation de chaque salarié peul à une cotisation annuelle de 10 000 F CFA, la collecte de la Zakat (l’aumône légale annuelle) des millionnaires au sein de la communauté peul, l’incitation de tout Peul riche voulant aider quelqu’un à faire le Hadj à le faire au compte de la lutte contre la mendicité. Séance tenante, une somme de 100 000 F CFA a été collectée. Pour Nabiga Barry, cette somme collectée marque déjà l’engagement des uns et des autres pour une cause noble. Aux termes de cette rencontre qui a réuni plus de 300 personnes venant de 35 provinces, selon les organisateurs, l’association « Suudu Baaba » propose comme solution au fléau de la mendicité, entre autres, le travail au démantèlement des réseaux qui utilisent les talibés à des fins de mendicité et le regard de la mendicité comme pouvant servir de menace si elle est utilisée pour le recrutement des terroristes. Dans cette foulée, elle propose la recherche d’un financement du projet Suudu Baaba « Eradication de la mendicité dans les rues de Ouagadougou de la tranche d’âge de 5 à 18 ans d’ici à l’horizon 2025» et demande à l’Etat burkinabè de mettre en place une subvention annuelle aux profits des centres de talibés et aux établissements coraniques. La conférence a été ponctuée par un sketch sur la lutte contre la mendicité et une remise symbolique de certificat d’engagement aux personnes physiques et morales qui soutiennent l’association dans la lutte contre la mendicité.
Par Hamadi BARO (Collaborateur)
LES CATEGORIES DE MENDIANTS AU BURKINA
On distingue quatre catégories de mendiants dans notre pays :
1-Les personnes invalides (personnes handicapées, personnes âgées) qui mendient pour vivre ;
2-Les enfants en situation de rue et les enfants issus des foyers coraniques qui mendient par nécessité ou par contrainte ;
3-Les mères des jumeaux qui mendient pour respecter la coutume ;
4-Les migrants saisonniers (Touaregs et autres).
En 2008, le ministère de l’Action sociale et de la solidarité nationale a mené une étude sur le phénomène de la mendicité dans les villes de Ouagadougou, Bobo- Dioulasso, Ouahigouya et Tenkodogo. Cette étude a permis de dénombrer 11 642 talibés dont 140 filles. Il y a 203 foyers coraniques à Ouagadougou avec en moyenne 50 talibés par foyer. En 2013, le CERFI a dénombré 7 502 foyers coraniques sur l’ensemble du territoire national.