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Débandade du 2 mars 2018 : à pied, on décolle plus vite

Publié le mardi 6 mars 2018  |  L`Observateur Paalga
Deux
© Autre presse par Anne Mimault
Deux hommes fuyant les assaillants durant l`attaque de l`état-major général des armées à Ouagadougou le 2 mars 2018.
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Au premier coup de feu, et surtout après la puissante déflagration du 2 mars 2018 aux alentours de l’état-major général des armées, ils ont, par instinct de survie et fuyant le danger, abandonné, qui sa voiture, qui sa moto, qui encore son pousse-pousse ou ses articles de commerce. 72 heures après cette chaude matinée, ils ont été invités, dans un communiqué du parquet du Tribunal de grande instance de Ouagadougou, à se présenter devant le Tribunal militaire pour les formalités afférentes au retrait de leur engin. La scène du crime étant toujours bouclée, nous avons dû nous résoudre à accoster quelques propriétaires pour recueillir leur version des faits.



Lundi 5 mars 2018, les commerçantes et commerçants du grand marché de Ouagadougou s’activent à étaler leurs marchandises. La sérénité semble la chose la mieux partagée trois jours après la double attaque de vendredi. Mais sur les lèvres, les débats suscités par cet événement malheureux ne sont pas près de s’estomper. Si d’aucuns continuent de raconter les faits tels qu’ils les ont vécus, d’autres en sont toujours à se demander comment cette atrocité s’est produite.

En ce début de journée, avec des rayons du soleil déjà cuisants, la préoccupation principale de Kadidiatou Bassolé est le retrait de sa moto, il y a quelques jours garée à quelques mètres de la scène du crime. Etudiante en stage dans une entreprise de téléphonie mobile, elle s’était présentée sur les lieux le lendemain de l’attaque (ndlr : samedi 3 mars) dans l’espoir de repartir avec sa bécane. Ce jour, des forces de sécurité lui diront de repasser 48 heures plus tard. C’est donc chose faite. «Comme tous les jours ouvrables, à partir de 6h, je laisse ma moto au parking jouxtant le mur de la Chambre de commerce. Je n’ai pas vécu la situation dès les premières heures. J’étais sur l’avenue Kwame Nkrumah, dans une banque où je faisais des transactions», nous informe Kadidiatou Bassolé.

Venu pour la même cause, Serge Atidaga, lui, est resté confiné dans l’immeuble faisant office de siège. Il est contrôleur interne dans une société de téléphonie mobile. Il a eu l’information relative au retrait des engins grâce à ses collègues de service. «Je viens de récupérer ma moto après avoir présenté ma Carte nationale d’identité burkinabè (CNIB) et ma carte grise. Le vendredi, quand nous avons entendu la détonation, les questions se bousculaient dans nos têtes. Ensuite, nous avons aperçu une épaisse colonne de fumée noire s’échappant de l’état-major général des armées. Les agents de sécurité de l’entreprise nous ont dit de rester dans les bureaux, le temps que la situation se stabilise. Nous étions à l’étage, les vitres ont été brisées et c’était la débandade, la panique ; ça courait dans tous les sens», raconte-t-il. Pendant ces moments de stress et d’angoisse, s’il y a une chose qui l’a interloqué c’est bien l’attitude de quidams qui voulaient être plus proches du foyer incandescent au lieu de se sauver.



«Les gens doivent faciliter le travail aux FDS»



«On ne le souhaite pas mais quand ce genre d’événements survient, il faut laisser les lieux aux forces de défense et de sécurité afin qu’elles interviennent dans de bonnes conditions. Pendant que certains fuyaient, d’autres ont sorti des téléphones portables pour filmer ou faire des clichés. Ces personnes ne sont pas de la presse, elles ne sont pas habilitées à le faire et s’exposent inutilement. Je crois qu’il est préférable de permettre aux hommes aguerris en la matière de gérer la situation. Je félicite au passage les FDS. Puisse Dieu nous venir en aide et qu’Il fasse en sorte que nous n’ayons plus à revivre d’attaque», souhaite Serge Atidaga.

Salif Ouédraogo et son binôme, eux, se trouvaient à l’Institut français. Ils y étaient pour un travail de plomberie. «Pendant qu’on travaillait, on a entendu paf ! Pour nous, cela provenait d’un pétard. Entre-temps, il nous fallait de l’eau chaude et profitant de ce temps mort, nous sommes sortis fumer une cigarette. Avant d’allumer la clope, nous avons entendu un deuxième paf ! Il y a eu une déflagration. Mon collègue a dit que c’était une bombe. Du coup, c’était la débandade. J’ai pu me réfugier au camp Guillaume», raconte le plombier. Selon ses propos, c’est vers 17h qu’il est ressorti de l’enceinte militaire. Son binôme, avec un sac contenant le matériel de travail et un tube, lui, ne se rappelle même plus où sa course folle l’a conduit. Il sait seulement qu’il avait essayé de joindre Salif au téléphone mais que ses tentatives s’étaient soldées par des échecs, ce qui l’avait rendu plus anxieux.

Adama Yougo, vendeur d’eau et de gâteaux, a également pris ses jambes à son cou dès les premiers coups de feu. «Les gens couraient dans tous les sens, les tirs s’intensifiaient, je me suis enfui en abandonnant mon pousse-pousse. Ce jour-là, je n’avais encore vendu aucun sachet d’eau ; la glacière était toujours pleine mais comme vous pouvez le constater, il ne reste plus grand-chose », indique-t-il sans se questionner sur ce qui est arrivé à son «pactole», comme pour dire qu’il loue le Très-Haut de lui avoir permis de s’en tirer sans égratignure.



Aboubacar Dermé
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