Partant de la crise du système éducatif, l’association « Prendre son envol » estime qu’il est temps de mettre fin aux revendications tous azimuts en cours qui risquent de compromettre l’avenir de notre pays. Pour elle, trop, c’en est trop. « Notre insurrection mérite mieux que le spectacle ». Lisez !
L’association « Prendre son envol » saisit l’occasion qu’offre le nouvel an pour présenter ses vœux les meilleurs à tous les Burkinabé sans exception, de la ville à la campagne, de l’intellectuel au non-lettré, des personnes nanties aux plus défavorisées.
C’est ensemble et dans cette diversité que nous avons toujours assumé notre histoire commune passée comme récente dans un esprit de tolérance et de recherche de cohésion.
Notre pays a connu une agitation sociale plus que nulle autre pareille les deux précédentes années et cette nouvelle année a débuté dans un contexte qu’il convient d’appeler « la crise de l’Education ». Une crise engendrée par une série de grèves et de perturbations diverses et par la triple décision des enseignants de surseoir aux évaluations des élèves, de bloquer les copies des élèves et d’observer chaque jeudi un sit-in. Il s’agit là d’une situation on ne peut plus préoccupante du fait que l’année scolaire 2017-2018 est menacée de nullité. Et nul patriote, nul acteur de la société civile ne peut rester indifférent à cette situation alarmante. C’est ce qui fonde l’association « Prendre son envol » à réagir pour interpeller les acteurs de cette crise.
Chers frères et sœurs du Burkina Faso,
Nous voulons à l’entame de la nouvelle année, lancer un message d’apaisement à l’endroit de tous.
Notre association n’a eu de cesse de dénoncer et de décrier le manque d’anticipation de ce gouvernement. La preuve est ce piège des statuts autonomes et particuliers dans lequel il est tombé. Nous l’appelons à ne pas rompre le dialogue avec les syndicats de l’Education afin de trouver ultérieurement une solution pérenne à cette crise.
Mais l’heure est aussi venue pour nous d’en appeler à nos frères et sœurs du monde syndical de l’Education. Nous leur demandons de considérer l’intérêt général, c’est-à-dire celui de la Nation entière. Nonobstant la pertinence de leurs revendications légitimes qui visent l’adoption d’un statut valorisant des personnels de l’Education, l’amélioration de l’accès à l’éducation et des conditions de vie et de travail ainsi que la revalorisation de la fonction enseignante, nous leur demandons au regard de l’incidence financière et des risques fort élevés d’une année blanche qu’elles entraîneront de fléchir leur position pour sauver l’année en cours. L’exemple des années blanches dans nos universités est édifiant du moment où les étudiants et les parents en sont toujours à payer les frais. Une année blanche porterait de gros préjudices aux élèves et aux parents que nous sommes et dont eux-mêmes font partie. Et si elle avait lieu, le gouvernement n’en serait pas le seul responsable ; les revendications maximalistes des syndicats de l’Education en seraient aussi responsables.
Chers frères et sœurs du Burkina Faso,
A la faveur de l’insurrection populaire d’octobre 2014, les libertés se sont renforcées devenant à la fois totales et anarchiques, les contestations se sont multipliées avec des grèves à la fois sauvages et abusives. Pour la seule année 2017 l’on enregistre près de 70 grèves et mouvements d’humeur, soit plus d’un mouvement par semaine. Ainsi nous assistons à la montée en puissance du corporatisme dans la Fonction publique. On croirait que ce sont les fonctionnaires seuls qui ont mené l’insurrection et qu’à ce titre, ils devraient en être les seuls bénéficiaires. L’association « Prendre son envol » qui fut l’une des OSC à prendre une part active dans la survenue de l’insurrection (nous faisons partie des 12 OSC à signer la déclaration du 21 octobre 2014 pour appeler le peuple à la désobéissance civile) constate que les uns et les autres mènent leur contestation, leur grève, leur mouvement d’humeur ou leur plainte en rappelant que c’est du fait de l’insurrection qu’un régime nouveau est parvenu au pouvoir et qu’en conséquence, il se doit de résoudre leurs revendications. L’association « Prendre son envol » voudrait rappeler que l’insurrection est venues, certes, pour les fonctionnaires mais aussi pour les paysans. Pour les paysans mais aussi pour les artisans. Pour les artisans mais aussi pour les indigents. Pour les indigents que pour les Burkinabé de la diaspora. Le peuple burkinabè compte actuellement plus de 19 millions d’habitants pour moins de 200 000 fonctionnaires (à peine 1%) qui engloutissent à eux seuls 50% des ressources propres de l’Etat. C’est injuste. Ce pays n’est pas constitué que de fonctionnaires. Parmi les victimes de l’insurrection populaire, il n’y a presque pas de fonctionnaires. Aussi au-delà des enseignants de la Fonction publique, L’association « Prendre son envol », refuse que les fonctionnaires de façon générale compromettent l’avenir de ce pays. Trop c’est trop. Il faut arrêter ces revendications abusives. Les retombées économiques doivent profiter à tous et non aux seuls fonctionnaires. Par ailleurs, il vaut mieux que les fonctionnaires soient payés tout le temps avec des salaires modestes qu’une partie du temps avec de gros salaires. Il faut en effet éviter qu’un jour le pays n’aboutisse à une cessation de paiement des fonctionnaires.
Chers frères et sœurs du Burkina Faso,
L’association « Prendre son envol » constate que les faramineux avantages financiers accordés aux magistrats sous la Transition et entérinés par le pouvoir actuel sont sources de jalousie et de convoitises de la part des autres démembrements de la Fonction publique. Aussi demandons-nous au président de l’Assemblée nationale et aux honorables députés d’avoir le courage de revenir sur cette loi qui favorise les magistrats. Les arguments de taille qui peuvent prévaloir pour justifier cette révision sont que, d’une part, la Justice ne fonctionne pas jusqu’à présent au prorata de ses émoluments rendant l’insatisfaction persistante. D’autre part, cette loi au profit des magistrats met en ballotage notre système éducatif, voire l’unité et la stabilité nationales. Mieux valant tard que jamais, il faut absolument procéder à la relecture de cette loi.
Frères et sœurs,
Notre insurrection mérite mieux que le spectacle de voracité et de pillage du budget de l’Etat que les fonctionnaires de façon générale sont en train de nous imposer.
Fait à Ouagadougou, le 13 janvier 2018
Le Président
OLLO BASILE DAH