L’Institut Free Afrik a réalisé une étude sur la gouvernance dans la mise en œuvre du PNDES. Une étude qu’elle a discutée au cours d’un atelier du 12 au 14 janvier afin de l’améliorer. Le dernier jour de l’atelier a été consacré à la « gouvernance sécuritaire et défi terroriste ». Le Dr Ra-Sablga Ouédraogo, directeur de l’institut, a restitué l’étude, abordé les enjeux du thème puis proposé des recommandations.
Ra-Sablga Ouédraogo a commencé par rappeler l’attaque de 2016 à Nassoumbou qui a occasionné « une douzaine de morts ». Le Burkina enregistre aujourd’hui « plus d’une centaine » d’attaques. L’étude note « une situation de guerre inédite qui contraste avec une impréparation des acteurs stratégiques qui doivent apporter des réponses pour faire face au défi ». Ra-Sablga Ouédraogo déplore la pose de mines anti-personnel dans le Sahel qui pourtant « constitue une plateforme commerciale avec des centaines de millions de dollars chaque année ».
L’étude veut montrer l’impréparation des FDS qui « font face à une situation qu’elles ne connaissent pas parce qu’elles n’y étaient pas préparées ». Selon le président de Free Afrik, en plus de la « géographie antidémocratique et inefficace de l’armée », les FDS n’ont pas toujours de bons rapports avec les populations. L’étude note aussi une crise de commandement de l’armée, alimentée en partie par les corruptions ; un problème d’équipement de formation et de motivation. « Les troupes qui combattent au Nord ont des primes journalières inférieures à 5 000 F CFA », précise le Dr Ouédraogo. Un autre aspect est que « notre armée n’a pas la gouvernance qu’il lui faut ». Il en veut pour preuve le soldat qui a passé l’arme à gauche par défaillance de bouclier devant Aziz Istanbul, alors que, regrette-t-il, le même problème a été rencontré lors de l’attaque de Capuccino plus d’une année auparavant. En plus, le soldat a été inhumé sans la « présence des plus hautes autorités » notamment les ministres impliqués.
Par ailleurs, la situation sécuritaire a un impact négatif sur l’économie, relève l’étude. En effet, explique Dr Ouédraogo, elle implique des coûts supplémentaires aux hôtels ou restaurants pour leur sécurisation en même temps que la demande clientèle est en baisse, surtout dans le Nord.
« Réarmer la gouvernance pendant qu’il est encore temps »
Pour Ra-Sablga Ouédraogo, il y a une sorte d’insouciance, « peut-être une sorte d’inconscience du niveau de gravité » de la question chez les politiques. « Nos autorités politiques ne sont pas pour le moment à la hauteur de la situation », ajoute-t-il. Selon l’étude, le monde syndical n’est pas assez impliqué dans la question. En effet, estime le directeur de Free Afrik, les syndicats ne parlent pas assez du défi terroriste alors que, déplore-t-il, certains travailleurs ne peuvent plus exercer leur fonction dans la zone septentrionale.
Même si la situation est inédite, Free Afrik estime qu’il est encore possible de la reprendre en main. Pour ce faire, elle recommande de rompre avec les stigmatisations, qui dénotent une « ignorance de notre identité au cœur de la situation ». Selon l’étude, c’est plus notre faiblesse que la force de l’adversaire qui explique cet état ». Ce serait donc irresponsable, estime Dr Ouédraogo d’évoquer l’aspect international du terrorisme pour le justifier. Il en veut pour preuve que certains pays n’ont jamais été attaqués au cours de cette décennie. En outre, il invite les uns et les autres à assumer leur part de responsabilité pour une « mobilisation forte autour du problème », toute chose qui permettrait d’enrayer ce phénomène. C’est pourquoi il estime qu’il faut « réarmer la gouvernance pendant qu’il est encore temps ».
Leroi Arthur Zongo
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